Plus de 118 millions d’euros. C’est le montant des créances dues par la société Gaussin, basée à Héricourt, selon un document daté de juin 2024 consulté par Le Trois et versé à la procédure de la société au tribunal de commerce de Vesoul.
Le 24 septembre, ledit tribunal a converti la procédure de sauvegarde lancée le 3 avril en procédure de redressement judiciaire (lire notre article), pour une période de six mois ; un point de situation sera fait par le tribunal le 5 novembre « afin d’évaluer la trésorerie de l’entreprise, ainsi que l’évolution du carnet de commandes », indique l’entreprise dans un communiqué de presse en date du 30 septembre. La direction travaille à un plan de « continuation », comme elle l’avait confirmé à l’AFP, le 29 septembre, dans le cadre d’une période d’observation de six mois ; elle court jusqu’au 3 avril 2025.
Déjà un contrat annulé
Les administrateurs judiciaires, nommés au printemps, ont lancé, par ailleurs, un appel d’offres pour envisager un plan de cession de l’entreprise. La date limite de dépôt des offres a été fixée au 4 novembre à 12 h.
Selon une source qui connait bien le dossier, cette dette est constituée majoritairement de créances à l’égard de fournisseurs, mais aussi à l’égard de clients dont les contrats ont été annulés pour non-exécution. Dans son communiqué de presse du 30 septembre, Gaussin confirme l’annulation de la commande Airbus par l’avionneur, « en raison des difficultés liées à la livraison du châssis du MPV #6 par la société Metalliance » ; la société Metalliance a été cédée à Corail-SM, au cœur de l’été. Ce problème de commande s’ajoute à de nombreux différends entre l’ancienne filiale Metalliance et Gaussin ; une procédure judiciaire est engagée par Gaussin pour récupérer l’équipement qu’il a acheté.
Cette annulation de commandes pose la question de la capacité de Gaussin à générer du chiffre d’affaires, en produisant ses véhicules, sachant que la société ne dispose plus de la capacité de production de l’usine de Metalliance, à Saint-Vallier (Saône-et-Loire). Dans le cadre d’un plan de continuation, l’entreprise n’a que dix ans, maximum, pour rembourser ses dettes. Si le chiffre d’affaires est limité et les dettes élevées, « c’est impossible économiquement à faire », indique un observateur du dossier. Par ailleurs, l’usine d’Héricourt est en activité partielle depuis le printemps.
Résultats négatifs en 2022
En 2023, Gaussin a enregistré un chiffre d’affaires de 35,7 millions d’euros, contre 57,1 millions d’euros en 2022. Et en 2022, son résultat accusait un déficit de 29,7 millions d’euros. Les résultats 2023 n’ont toujours pas été publiés. Plusieurs reports ont été obtenus auprès du tribunal de commerce de Vesoul. Ils seront publiés le 30 novembre, indique Gaussin.
Le 18 juin, le conglomérat industriel et militaire tchèque CSG (Czechoslovak Group), actionnaire de référence de la société (plus de 20 % du capital), a pris le contrôle (lire notre article) en concentrant quatre des cinq sièges du conseil d’administration, à la suite d’une importante crise de gouvernance (lire notre article). Christophe Gaussin, alors président-directeur général, devenait seulement directeur général de la société. Le conglomérat tchèque a déjà injecté quelque 25 millions d’euros dans l’entreprise, selon nos informations.
En 2015, Christophe Gaussin avait été condamné par l’autorité des marchés financiers d’une amende de 500 000 euros. On lui reprochait d’avoir surévalué son carnet de commandes, diffusant ainsi une fausse information au marché. La société avait reçu une amende de 100 000 euros.
L’entreprise comptait 74 salariés, au 31 mai 2024, selon un document de son assemblée générale du 18 juin, effectif en baisse de 25 % sur un an indique-t-elle. Sollicitée, l’entreprise Gaussin n’a pas répondu à nos demandes.