Quel symbolique politique ! Après avoir enregistré le ralliement d’Éric Woerth, Emmanuel Macron pouvait compter sur le soutien de Jean-Pierre Chevènement. L’homme d’État a accompagné le président de la République à Belfort, son territoire, ce jeudi 10 février. Une allocution où le président a relancé le nucléaire, acté le rachat par EDF de cette activité à l’Américain General Electric et surtout marqué sa politique d’une empreinte de souveraineté industrielle et énergétique, chère au Che.
Quel symbole politique ! Après avoir enregistré le ralliement d’Éric Woerth, Emmanuel Macron pouvait compter sur le soutien de Jean-Pierre Chevènement. L’homme d’État a accompagné le président de la République à Belfort, son territoire, ce jeudi 10 février (notre article). Une allocution où le président a relancé le nucléaire, acté le rachat par EDF de cette activité à l’Américain General Electric et surtout marqué sa politique d’une empreinte de souveraineté industrielle et énergétique, chère au Che.
Il est 16 h 30. Le public, qui écoute religieusement le président de la République dessiner sa vision de l’énergie pour les décennies à venir, interrompt le chef de l’État pour engager une salve d’applaudissements. Ce n’est pas celui qui est sur le pupitre qui est honoré. Mais c’est Jean-Pierre Chevènement, figure iconique de la cité du Lion, présent dans la salle. « Je veux saluer Jean-Pierre Chevènement, qui depuis des décennies se bat sur ce dossier qui n’a ménagé personne – toujours avec beaucoup de rigueur, d’engagement et de justice – y compris votre serviteur. Et ce dossier trouve aujourd’hui un aboutissement », a déclaré Emmanuel Macron, lors de son allocution.
Les symboles ont été nombreux ce jeudi après-midi. En prononçant son discours devant une turbine à vapeur Arabelle, Emmanuel Macron signifiait qu’il la ramenait dans le giron national, elle qui avait été cédée par une entreprise privée française (Alstom) à une entreprise privée américaine (General Electric), en 2014-2015. L’autre grand symbole, c’est d’avoir été accompagné tout au long de sa visite par Jean-Pierre Chevènement, 83 ans le 9 mars. En 2014, il avait dénoncé la vente à l’Américain avant de s’y résoudre quand l’option d’une co-entreprise avait été mise sur la table en juin. « Qui tient le capital, tient la décision », avait-il notamment déclaré (lire notre article). La co-entreprise n’avait pas duré longtemps, Alstom cédant totalement ses parts en 2018.
Lors des échanges avec les syndicats, Jean-Pierre Chevènement a soutenu le projet. « Je suis témoin de toute cette affaire et pour une fois les choses vont dans le bon sens. » Et d’ajouter : « Le président a mouillé sa chemise. » L’ancien ministre a aussi glissé qu’on faisait un mauvais procès à Emmanuel Macron sur la vente à General Electric, alors qu’il n’était pas encore ministre lors du lancement de l’opération, en avril 2014 ; il était à l’Élysée, secrétaire général adjoint du cabinet du président de la République François Hollande. Pour Jean-Pierre Chevènement, ce n’est cependant pas une première de soutenir des politiques de haut rang lorsque cela concerne les usines de Belfort, à l’instar de Nicolas Sarkozy lors du sauvetage d’Alstom en 2004. « Tout ce qu’on peut prendre pour Belfort, il faut le prendre », résume un proche de Jean-Pierre Chevènement, reprenant un propos que l’homme d’État lui a déjà confié.
Plus loin, lors des échanges avec les salariés, et avant le discours, Jean-Pierre Chevènement a déclaré : « Ce [qu’Emmanuel Macron] va annoncer sert la France. » Les 6 EPR 2 confirmés, et les 8 additionnels dont l’opportunité sera étudiée, donnent surtout de la visibilité et du travail au site belfortain, qui intègrera prochainement l’écosystème EDF. « Belfort aussi est en train de renaître, avec le nucléaire », a insisté Emmanuel Macron en fin d’allocution, évoquant par ailleurs le déploiement de l’hydrogène, avec McPhy (notre article), et les commandes pour le TGV du futur, à Alstom.
Jean-Pierre Chevènement n’a pas oublié Belfort. Ni ses usines, là où il a pu organiser des conseils municipaux. Son lien fusionnel avec les Alsthommes est toujours bien présent. « J’ai fait un intense lobbying auprès d’Emmanuel Macron. Belfort est sauvé », a confié le Lion de Belfort à un proche. Ce même proche d’analyser : « Jean-Pierre Chevènement aura d’avantage été écouté par ses adversaires politiques que par la gauche ces 20 dernières années. Et c’est la raison pour laquelle la gauche est dans cet état-là aujourd’hui. » Son idée de souveraineté industrielle et énergétique a été au centre de la visite présidentielle ce jeudi.