Le Trois –

Industrie : « T’es une femme, tu ne peux pas porter. Je le ferai plus tard »

Adeline Matter, alternante chez Engie, en études d'ingénieur, parle de la féminisation en industrie.

La Vallée de l’Énergie organise ce mardi une conférence à destination des étudiants, afin de valoriser le parcours de femmes dans l’industrie. Rencontre avec Adeline Matter, jeune alternante ingénieure chez Engie. Qui raconte son parcours jusqu’à l’industrie.

La Vallée de l’Énergie organise ce mardi une conférence à destination des étudiants, afin de valoriser le parcours de femmes dans l’industrie. Rencontre avec Adeline Matter, jeune alternante ingénieure chez Engie. Qui raconte son parcours jusqu’à l’industrie.

« Cela ne m’était jamais venu à l’idée ! » Cette phrase, on l’entend souvent. Jeunes, les femmes ne pensent pas forcément aux emplois de l’industrie. Question de culture. De présupposés. D’a priori. « On a trop le cliché que c’est un métier d’homme, avec des charges », sourit Adeline Matter. Cette jeune femme de 21 ans suit un cursus pour obtenir un diplôme d’ingénieur, à Télécom Physique Strasbourg. Elle suit ce cursus en alternance, chez Engie, qui travaille pour l’industrie. Elle occupe un poste d’assistante responsable d’affaires, à l’agence de Montbéliard. Ce mardi, elle participe à l’évènement RéELLES, organisé par la Vallée de l’Énergie, qui souhaite valoriser les femmes dans le milieu de l’industrie. Au cours de la conférence, ouverte à des étudiants, « des professionnelles issues d’entreprises diverses, partagent leur parcours de vie et livrent leurs réalisations, leurs échecs, les freins rencontrés mais surtout les solutions adoptées pour contourner ou composer avec certains obstacles », explique la Vallée de l’Énergie dans sa présentation.  

« Les usines s’ouvrent »

En France, les femmes n’occupent même pas un emploi sur trois dans l’industrie (29,2 %). Et dans l’emploi total, seulement huit femmes sur 100 qui ont un emploi (8,3 % exactement) travaillent dans l’industrie, alors que ce taux est de 18,8 % chez les hommes. Dans la promotion d’Adeline Matter, il y a 24 personnes, et 4 femmes. « Les écoles tentent de mettre cet aspect en avant, rappelle la jeune femme. Depuis 3 ans, la brochure de notre école, c’est une femme. » Et elle a l’impression qu’il y en a de plus en plus. Dans sa formation précédente, à l’IUT d’Haguenau, elles étaient 6 femmes, sur 40, dans sa formation Génie électrique et informatique industrielle (GE2I). Mais l’année d’avant, elles n’étaient que 2 ! À l’occasion d’un stage chez un équipementier automobile, elle a aussi travaillé dans un service où il n’y avait que des femmes… La mission ? Étudier les machines-outils, qui sont « pensées pour les hommes ». L’enjeu était d’avoir des machines plus flexible et qui ne dépendent pas d’une morphologie. « Les usines s’ouvrent », apprécie l’élève ingénieure.

Aujourd’hui, elle n’a pas envie de faire autre chose. Mais même au lycée, elle n’y pensait pas. Elle a un bac S, option SVT. Loin des sciences de l’ingénieur. On l’a d’abord orientée vers médecine. Un échec. C’est une rencontre fortuite qui l’a conduite dans cette voie. En cours de réorientation, elle découvre l’IUT d’Haguenau. Pendant la visite, elle découvre la salle de travail. Puis elle rencontre des gens. Lit des revues. Elle sait ce qu’elle veut. Un job-dating lui fait découvrir la gestion de projet. Ce qu’elle aime. Et elle signe à Engie.

Et sa condition de femme, au sein de ce milieu industriel, qu’en pense-t-elle ? « Avez-vous déjà vu les calendriers des fournisseurs ? » interpelle Adeline Matter, sourire aux lèvres, pour évoquer les calendriers pornographiques qui ornent les salles de pause ou les toilettes. Quand elle est arrivée, on a tenté de les cacher. Un peu gêné, souvent ! Cette culture est encore bien présente. Une autre fois, elle veut lever une charge. « T’es une femme, tu ne peux pas porter. T’en fait pas, je le ferai plus tard », lui glisse un ancien de la boîte. Ça part d’un bon sentiment. « C’est bienveillant, mais maladroit », sourit-elle. Les clichés ont la vie dure. Celle qui se voit, dans 10 ans, toujours dans la gestion de projet, ne doute pas de l’évolution des mentalités. « Je suis vraiment confiante sur la suite. On a des débats sur ces questions, entre nous, à l’école. » Et c’est à l’école que tout commence. Et elle va glisser aux étudiants qui assistent à la conférence que l’industrie n’est pas réservée qu’aux hommes. Une étape de plus.

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