Une justice facile à saisir, rapide et proche des enjeux des citoyens, c’est ainsi qu’est présentée la juridiction administrative à Besançon lors de la venue du vice-président du Conseil d’État, Didier Tabuteau. « Nous sommes des juges de proximité », explique la présidente du tribunal administratif de Besançon, Cathy Schmerber. Pour de multiples raisons, détaille-t-elle. Déjà, parce que le tribunal administratif, géré par le Conseil d’Etat, permet à tout citoyen, entreprise ou association de contester une décision de l’Administration. Et ce, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 depuis la mise en place d’un service de télé-recours sur internet. « Nous avons encore des possibilités de recours par téléphone ou accueil physique pour les personnes qui ne sont pas à l’aise avec l’outil numérique », complète Didier Tabuteau.
Cette facilité de contact a permis à 2 052 affaires d’être jugées en 2022, dont 134 en urgence (référé) au tribunal administratif de Besançon, et ce sur l’ensemble de la Franche-Comté. Et cela continue d’augmenter. En 2023, sur les dix premiers mois de l’année, 1 854 affaires ont déjà été jugées, dont 124 référés. Il y a également une montée en puissance du nombre de procédures en référé (dossier urgent traité en 48 heures). « Ce type de procédures rencontre un succès croissant. C’est le signe du succès, cela veut dire que nous sommes perçus comme des juges que l’on peut saisir rapidement » , pointe Cathy Schmerber. Cette justice « nouvelle » pose tout de même quelques problèmes, notamment de personnels. Au tribunal administratif, ce sont 10 magistrats et 14 agents de greffe qui font vivre le tribunal et qui font « face à la diversité des saisines ». Une chambre des référés traite des dossiers urgents. Ce qui nécessite une mobilisation importante.
Pour autant, cela n’entraîne pas de lenteurs sur les autres procédures, nous assure-t-on. Le délai de réponse est de 8 mois et 2 jours pour le tribunal administratif de Besançon. Un délai inférieur à la moyenne nationale. Derrière, il y a « un taux d’appel excellent », avec 76,5% des décisions validées en appel, explique Pascale Rouselle, présidente de la Cour administrative d’appel de Nancy.
« L’affaire d’une vie »
La présidente du tribunal administratif mesure l’implication des citoyens dans les procédures engagées. « Souvent, un dossier est l’histoire d’une vie pour un requérant », explique la présidente. Que ce soit sur des conflits de la vie quotidienne (permis de construire, impôt), ou pour des questions qui touchent aux enjeux du territoire (travaux publics, environnement, sécurité). Le rôle du tribunal administratif est de vérifier que l’Administration respecte le droit. Elle peut enjoindre à verser des dommages et intérêts. « Dans tous les cas, notre coeur de métier restera toujours de trancher les litiges. »
Les dossiers en eux-même portent sur des sujets très divers : sécurité, enseignement, urbanisme… La plupart du temps, ce sont des questions en lien avec le quotidien. « De plus en plus, nous avons des dossiers en lien avec l’environnement, sur des sujets avec des objectifs contradictoires selon les différents acteurs », narre Cathy Schmerber.
Pour le tribunal administratif, l’année 2023 a par exemple été marquée par plusieurs affaires notables, comme la protection des troupeaux contre les attaques de loups, l’usine d’incinération des ordures ménagères de Montbéliard, la chasse et l’encadrement de l’usage des armes à feu, l’écoquartier des Vaîtes à Besançon, ou encore le préjudice d’anxiété lié à l’amiante chez Alstom. Il y aussi de « plus petits dossiers », mais qui ont « toujours une importance ». « Le tribunal administratif est le tribunal des grandes affaires mais aussi des plus modestes. »
Se faire mieux comprendre
Le but de cette journée avec Didier Tabuteau a aussi été de tisser du lien auprès de tous les acteurs de la vie locale dans la ville d’implantation. « Le juge administratif doit être compris et comprendre. » Pour comprendre, il est important d’être bien implanté dans les villes et d’échanger avec les réseaux d’acteurs de la vie locale. Il faut aussi passer du temps avec les membres du barreau des avocats, par exemple, qui ont « des relations avec les justiciables que nous n’avons pas car nous ne sommes pas en lien direct », explique encore la présidente.
« Être compris », ensuite, en se tournant vers la jeunesse. Le tribunal entretient notamment des liens avec l’université de Franche-Comté avec l’accueil de stagiaires, en master essentiellement, mais aussi des stages de 3e pour faire naître des vocations. « Le tribunal privilégie l’accueil des collégiens issus des établissements les moins favorisés de la région.»
Des efforts restent encore à faire pour mieux se faire comprendre, car le droit n’est pas une matière facile à manier et que les règles sont parfois difficiles à retranscrire en étant pédagogues. « En tout cas, nous faisons tous les efforts possibles pour que les gens comprennent bien, même s’il y a encore du travail », détaille Didier Tabuteau. Le but de tout cela : « Se positionner comme un acteur de la vie locale. »