Après l’élection de Charles Demouge à la présidence de Pays de Montbéliard Agglomération (PMA), samedi 11 juillet, la tension politique est à son comble. Les commentaires virent au règlement de compte. On ressort les vieux dossiers. Un climat de tension qui questionne la gouvernabilité de cette assemblée alors que la première échéance arrive, ce jeudi 16 juillet : l’attribution des délégations de chaque vice-président.
Après la réélection de Charles Demouge à la présidence de Pays de Montbéliard Agglomération (PMA), samedi 11 juillet, la tension politique est à son comble. Les commentaires virent au règlement de compte. On ressort les vieux dossiers. Un climat de tension qui questionne la gouvernabilité de cette assemblée alors que la première échéance arrive, ce jeudi 16 juillet : l’attribution des délégations de chaque vice-président.
« Vendredi soir, on savait que Martial Bourquin ne pouvait pas gagner », valide un proche du maire socialiste d’Audincourt. Le désistement de Marie-Noëlle Biguinet, qui confirma en soirée son ralliement à Charles Demouge, a conforté la majorité de droite. Martial Bourquin ne pouvait espérer ravir le siège de président de l’agglomération que sur les cendres d’une droite divisée, qui détient les principaux pôles de l’agglomération. Quelques heures après, Charles Demouge est élu président de Pays de Montbéliard Agglomération. Mais sans applaudissements. Sans engouement. Enregistrant une victoire à la Pyrrhus !
« Pacte Montbéliard-Audincourt »
Samedi, personne n’officialise un accord entre Charles Demouge, qui avait besoin des voix de la gauche pour gagner, et Martial Bourquin. Mais les faits ne laissent aucun doute. L’absence de report de voix vers la candidature de Nicolas Pacquot entre le 1er et le 2e tour est le premier élément. L’intégration de cinq vice-présidents issus de la gauche dans l’exécutif de Pays de Montbéliard Agglomération est le second élément. La gauche a voté en partie pour un candidat de droite. Et a négocié ce soutien.
Depuis, les communiqués de presse se succèdent. D’abord, on a salué la victoire de Charles Demouge. Puis chacun a dégainé. Nicolas Pacquot a été le premier, dimanche en début d’après-midi. Amer. Il renomme PMA en « Pacte Montbéliard-Audincourt ». « Tous les beaux discours de campagne ont été reniés dans les minutes qui ont suivi l’élection du président », tance-t-il. S’il dénonce l’alliance PS-LR, il s’étonne aussi du rapprochement de dernière minute entre Marie-Noëlle Biguinet et Charles Demouge, « alors qu’ils en étaient incapables pour des projets d’intérêt général, comme le Conservatoire ». Celui qui a conçu un programme de 138 pages en collaboration avec une quarantaine d’élus remarque que la ville centre sort affaiblit de ce scrutin, avec deux vice-présidences contre trois auparavant.
« Pacte républicain »
Lundi, les cinq vice-présidents issus de la gauche – Damien Charlet (Audincourt), Magali Duvernois (Exincourt), Renaud Fouché (Audincourt), Henri-Francis Dufour (Vieux-Charmont) et Sophie Radreau (Bavans) – répondent. Au téléphone, Magali Duvernois confirme l’existence « d’un pacte républicain » entre Charles Demouge et Martial Bourquin. Et assume. « Les 28 voix de Martial Bourquin ont évité́ un blocage de l’agglomération et [ils] sont partis sur un accord de gouvernance : ni plus ; ni moins », explique le groupe dans une déclaration à la presse. Les élus veulent surtout se justifier. Ils ne font pas confiance à Nicolas Pacquot. « Comment peut-on concevoir nous, élus de gauche, accorder notre confiance à un homme qui en plein confinement, alors que les violences intrafamiliales ont augmenté́, alors que les CCAS de nos communes ont été submergés de demandes dû à une recrudescence de la pauvreté, se permet des attaques publiques d’une rare violence contre les plus pauvres d’entre nous ? dénoncent-ils, avant de noter : L’accord de gouvernance a empêché́ l’arrivée à la tête de l’agglomération d’un aventurier aux propos populistes. » Populiste. Le mot est lâché. Ils lui reprochent aussi de reprendre le vocabulaire du Rassemblement national (RN) en invoquant « l’erpès », pour souligner l’association LR-PS.
Le groupe embraie sur la proximité du maire d’Étouvans avec La République en Marche (LREM). Si Nicolas Pacquot continue d’affirmer être sans étiquette, il a aussi reçu le soutien des deux députés marcheurs ces derniers jours, Frédéric Barbier et Denis Sommer (lire plus loin). Damien Charlet, Magali Duvernois, Renaud Fouché, Henri-Francis Dufour et Sophie Radreau vont plus loin et rappellent que Nicolas Pacquot a été suppléant de Valère Nedey (Les Républicains) aux législatives de 2017. Ironie de l’histoire, samedi, Nicolas Pacquot a présenté la candidature de Nadine Mercier contre celle de Valère Nedey ; elle a été élue.
Chère victoire
Le coût de la victoire est cher pour Charles Demouge. Il a dû céder cinq vice-présidences pour espérer avoir les voix. Et Martial Bourquin compte bien s’appuyer sur cet avantage, alors qu’il n’a recueilli que 28 voix sur 112 lors du premier tour de l’élection du président, ce samedi. Dans un communiqué envoyé samedi soir, il affirmait que les élus de gauche « [formeront] un groupe politique qui devra peser au sein de l’exécutif ». « Nous serons présents comme force de proposition et Charles Demouge, comme il s’y est engagé́, devra entendre et respecter ces nouvelles orientations, car à cette condition que l’agglomération pourra avoir une gouvernance sereine qui saura répondre aux défis du quotidien et de l’avenir », mettent en garde les cinq vice-présidents socialistes. Nicolas Pacquot de remarquer que cet accord fait que « des territoires entiers ne sont pas représentés, comme le plateau de Blamont, le secteur de Pont-de-Roide, la vallée du Rupt ».
Concernant cette gouvernance, le député Denis Sommer, également conseiller communautaire, regrette que l’agglomération reparte « pour 6 ans avec l’incapacité à faire vivre le Pôle Métropolitain… l’absence de politique ambitieuse en matière de tourisme, l’autoritarisme dans la conduite de la collectivité, une vision étriquée de l’avenir du territoire ». Selon lui, le responsable de cette situation n’est autre que Martial Bourquin.
Vieux dossiers
Car après ces premiers échanges, Denis Sommer et Frédéric Barbier sont entrés dans la danse. « Dois-je rappeler qu’un front républicain désigne lors d’une élection, le rassemblement des partis de droite et de gauche contre le Front National, devenu Rassemblement national, interpelle Frédéric Barbier. Dois-je également rappeler qu’en 2015 lors de la législative partielle, un certain Charles Demouge a refusé le Front républicain alors que le FN était aux portes du pouvoir de la 4e circonscription du Doubs ? Dois-je rappeler qu’en 2017, lors des élections législatives, Martial Bourquin s’est aussi fait très discret quant à la question de soutenir le candidat de sa propre famille qui affrontait une nouvelle fois le Front national ? » On tire à boulets rouges.
« Martial Bourquin n’a pas d’amis, il n’a que des serviteurs ! Et malheur à ceux qui osent le contredire », tacle de son côté Denis Sommer. L’ennemi intime est un ancien du Parti socialiste. « Plus personne n’a désormais de leçons de gauche à recevoir de Martial Bourquin », renchérit Frédéric Barbier, ancien socialiste également. Martial Bourquin de rétorquer, sur les réseaux sociaux : « Des députés qui ont voté sans état d’âme les ordonnances travail, la fin de l’impôt sur la fortune, la flat-taxe, la fin des contrats aidés, la baisse des APL et tellement d’autres mesures antisociales, se permettent de donner des leçons. »
« Les petits accords entre meilleurs ennemis auxquels nous avons assisté samedi ont, à n’en pas douter, laissé des traces peu glorieuses dans le paysage politique du pays de Montbéliard », écrit finalement Frédéric Barbier. « Je signale pour rappel qu’il y a quelques années Denis Sommer faisait, dans notre dos, un pacte de gouvernance avec le président de droite de l’époque et pour faire allégeance il avait voté sans état d’âme la privatisation de l’eau », a renvoyé Martial Bourquin. On se renvoie coup pour coup, pour justifier ses décisions. PMA est devenu un ring où se noue un véritable pugilat.
La nouvelle mandature ne débute pas sous des auspices sereins. Derrière, le président réélu appuie son projet sur une volonté de dialogue, de travail ensemble et le souligne en développant une promesse de campagne qui consiste à créer un conseil des maires au sein de l’agglomération, pour mieux les associer. Ce qui est présenté comme un engagement politique est surtout une obligation réglementaire inscrite dans l’article 1 de la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 : « La création d’une conférence des maires est obligatoire dans les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. » Ça promet.