Das Solar investit 109 millions d’euros à Mandeure, dans l’ancienne usine Faurecia, pour aménager une usine d’assemblage de panneaux photovoltaïques (lire notre article), avec trois lignes de production. 450 à 600 emplois y sont espérés. C’est la première marche d’un projet plus vaste qui peut conduire à l’implantation de cinq lignes de production, au total, dans le pays de Montbéliard, et à la construction d’une usine qui fabriquerait les cellules photovoltaïques nécessaires à l’assemblage de ces panneaux. En jeu : un investissement de 650 millions d’euros et un espoir de 2 500 emplois. Des investissement plus que jamais en suspens souffle-t-on au Trois.
Les débats parlementaires qui agitent l’assemblée nationale autour de la proposition de loi Gremillet, portant programmation nationale énergie et climat pour les années 2025 à 2035, font craindre le pire. Le 19 juin, les parlementaires ont approuvé un amendement porté par le député Les Républicains (LR) Jérôme Nury, par 65 voix contre 62. Cet amendement instaure « un moratoire sur l’instruction, l’autorisation et la mise en service de tout nouveau projet d’installation de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent éolien, terrestre ou maritime, ainsi que l’énergie solaire photovoltaïque, à l’exception des projets ayant déjà reçu une autorisation administrative préalable à cette date », peut-on lire dans le document législatif.
Le moratoire menace l'usine Das Solar
Cet amendement doit mettre un coup d’arrêt aux projets d’énergie renouvelable, donc éliminer les leviers de croissance de Das Solar en France. L’amendement a été co-signé par Ian Boucard, député Les Républicains du Territoire de Belfort. Les deux députés du pays de Montbéliard – Matthieu Bloch (Union des droites) et Géraldine Grangier (Rassemblement national) – ont approuvé cet amendement instaurant ce moratoire.
La loi doit être soumise au vote, dans sa totalité, ce mardi 24 juin, à l’Assemblée nationale. Si elle est approuvée en adoptant cet amendement, est-ce que cela menacerait l’implantation de Das Solar à Mandeure ? « Oui, clairement », répond la direction de l’entreprise, en France. Le député européen Renew Christophe Grudler, qui suit ces questions à Bruxelles, dénonce « une aberration », dans un communiqué de presse. « Ce vote envoie un signal désastreux à tous les investisseurs. Il remet en cause plus de 80 000 emplois », déplore-t-il. Cette décision des parlementaires a surpris en Chine. La presse chinoise s’en est faite l’écho, pointant du doigt « les contradictions » profondes auxquelles la France est confrontée dans sa transition énergétique ». La position des élus locaux a aussi supris dans le Landerneau, alors que le pays de Montbéliard est confronté à un enjeu de diversification de son industrie automobile.
« En bloquant le solaire et l’éolien, la France se prive de contrats d’électricité verte indispensables à sa réindustrialisation et met en péril des milliers d’emplois », ajoute le député, qui estime que c’est aussi « un coup porté à notre souveraineté industrielle ».
Les défenseurs du moratoire dénoncent un coût de 300 milliards d'euros
« La hausse de 100% du prix de l’électricité en quelques années, les dégradations irréparables du cadre de vie des populations rurales ou côtières avec leurs conséquences préjudiciables et de préjudice sur la santé, résultent d’un changement de politique énergétique », justifient les signataires du texte. Qui ajoutent : « Techniquement, le développement excessif des énergies intermittentes, par la variabilité de leur production, fait courir le risque d’un black-out, tel qu’en a connu l’Espagne le 28 avril 2025. » Selon eux, le programme d’installations d’énergie renouvelable s’élève à 300 milliards d’euros, « supportés par les consommateurs ».
Christophe Grudler rappelle que l’Europe a fixé un objectif de 44 % de renouvelables à la France d’ici 2030. « La France est déjà en retard. Ces objectifs ne sont pas décoratifs : ils servent à décarboner notre énergie, créer des débouchés pour les technologies propres et bâtir un écosystème de cleantech européen », défend-il.
Cette proposition de loi sert d’indicateur au gouvernement « pour finaliser un décret fixant la nouvelle feuille de route énergétique de la France pour la période 2025-2035 et mettre le pays sur la voie de la neutralité carbone en 2050 », replace Franceinfo. Après le vote de l’Assemblée nationale, le texte file en seconde lecture au Sénat à partir du 8 juillet, qui pourra l’amender de nouveau. Il reviendra ensuite à l’Assemblée nationale. Ce calendrier, qui conduit à repousser à la rentrée le vote définitif de la loi risque de décaler les décisions de Das Solar. L’industriel chinois avait choisi la France au détriment de la Pologne ou encore de l’Italie dans son lieu d’implantation, en Europe. Cette incertitude pourrait rebattre les cartes et repositionner ces pays dans la course alors que Das Solar veut aller vite pour conserver sa position favorable sur le marché photovoltaïque.