On ne la voit pas, on ne l’entend pas, on ne la sent pas. Qui est-elle ? L’amiante. Sous forme de microns, de fibres, de poussières, elle est difficile à repérer. Une fibre d’amiante est 400 fois plus fine qu’un cheveu et se compose de plusieurs « fibrilles » qui se désolidarisent lorsqu’on perce, ponce ou découpe des matériaux qui en contiennent.
Problème : à ce jour, de nombreux immeubles, habitations et dépendances dont le permis de construire a été délivré avant 1997 en contiennent. Il est essentiel de prendre des précautions avant d’effectuer des travaux. Comment s’en prémunir ? Qui joindre ? Toutes ces informations figureront dans une brochure éditée par l’Adevam, l’association qui aide les victimes de maladies professionnelles liées à l’amiante en Franche-Comté. Le Grand Belfort finance l’impression de 55 000 brochures et leur distribution avec le prochain numéro de Belfort en Grand, mi-avril.
C’est un premier pas important. Jacques Rambur veut aller plus loin en « rencontrant les présidents des autres communautés de communes » pour étendre la sensibilisation à tout le nord Franche-Comté. En se posant comme lanceur d’alerte, l’association veut toucher le plus grand nombre. « L’amiante tue toujours 20 000 personnes par an, je ne sais pas si vous vous en rendez compte », martèle Jacques Rambur, président de l’association.
Des cancers nombreux
L’amiante est d’autant plus dangereuse qu’elle est une « bombe à retardement » qui déclenche des maladies avec une période de latence pouvant atteindre 10, 15, 20 voire 40 ans. Elle provoque des fibroses, des plaques pleurales, l’asbestose, des pleurésies… Ainsi que des cancers : broncho-pulmonaire, mésothéliome, larynx, estomac, ovaires, côlon. « Tout ceci n’est pas connu de tous », précise Jacques Rambur.
Si certaines de ces maladies sont reconnues par la Sécurité sociale, d’autres, comme les risques psychosociaux, restent moins prises en compte. L’association a déjà permis la création de trois nouveaux « tableaux » de reconnaissance des maladies professionnelles, notamment pour le cancer du larynx et de l’ovaire provoqués par l’inhalation de poussières d’amiante. Mais le combat est encore long. Et l’association se bat auprès des personnes qui passent la porte pour les aider dans une démarche de reconnaissance.
Avec cette nouvelle brochure, Adevam veut sensibiliser avant qu’un drame ne survienne, notamment chez les particuliers. « On a besoin de sensibiliser les particuliers aux règles strictes du désamiantage. La plupart des gens ne savent pas comment s’en débarrasser », explique Damien Meslot, maire de Belfort et président du Grand Belfort. C’est essentiel, car l’amiante peut se trouver partout chez soi. En France, il reste encore 20 millions de tonnes d’amiante non traitées, présentes dans plus de 20 000 établissements et des milliers de friches industrielles.
Où se cache l’amiante ?
La brochure qui sera distribuée mi-avril à tous les habitants du Grand Belfort explique où l’amiante peut se cacher chez soi : dans la toiture, le revêtement du sol, l’enduit des murs, le plafond, les peintures ou encore dans des bacs à fleurs. La règle, lorsqu’on sait que l’on doit manipuler des matériaux amiantés ? Faire appel à des professionnels qualifiés et formés, titulaires d’une attestation de compétence amiante.
La brochure explique aussi comment gérer les déchets d’amiante. Amiante libre ou friable ? Trop risqué, il faut faire intervenir un spécialiste. Amiante en plaques, ardoises, tuyaux ? Il faut arroser avant toute manipulation pour éviter la dispersion des poussières et emballer les déchets dans des sacs big-bag, disponibles dans certaines déchèteries ou en ligne.
En cas de doute, l’association le rappelle : contactez-la. Que ce soit pour des questions ou pour monter un dossier de reconnaissance, elle dispose désormais d’un local à la Maison du Peuple pour accompagner les victimes « en toute discrétion ». « Il y a un large panel d’aides que l’on propose », souligne Jacques Rambur. Et cela, gratuitement. L’association est aidée par un cabinet d’avocats parisien qui effectue les démarches juridiques. « Pour que les gens ne soient pas seuls face à ce dur combat », appuie Damien Meslot.
Militer pour l’éradication de l’amiante en France
En France, il n’existe qu’une seule usine de traitement des déchets amiantés depuis l’interdiction de leur enfouissement par l’Union européenne. Située dans les Landes, elle utilise la méthode de la torche plasma, qui permet de vitrifier l’amiante. Un bain en fusion porté à 1 500 °C permet à l’amiante de voir sa toxicité neutralisée.Une fois refroidie, le matériau issu de la vitrification de l’amiante est un agrégat extrêmement friable de silice de calcium et d’alumine. Ces « vitrifiats », ce qu’il reste des déchets d’amiante, sous valorisé comme sous-couche dans la confection des routes. « On milite pour avoir une usine de traitement de désamiantage de ce type. Au moins une dans la grande région Grand Est », plaide Jacques Rambur.