Après trois jours de blocage, les salariés des ateliers de l’entité nucléaire de General Electric ont signé un protocole de sortie de crise ce jeudi soir. Ils obtiennent des primes et des embauches potentielles. On a entre-aperçu des rapprochements entre les luttes, notamment avec Alstom. Des salariés de GE Power services ont tenu en partie le piquet pour informer sur le plan social qui agite aussi leur entité.
Après trois jours de blocage, les salariés des ateliers de l’entité nucléaire de General Electric ont signé un protocole de sortie de crise ce jeudi soir. Ils obtiennent des primes et des embauches potentielles. On a entre-aperçu des rapprochements entre les luttes, notamment avec Alstom. Des salariés de GE Power services ont tenu en partie le piquet pour informer sur le plan social qui agite aussi leur entité.
Trois jours de blocage. Et d’âpres négociations. Les salariés et techniciens de Thermal Manufacturing Belfort, les ateliers de la branche nucléaire de General Electric, qui façonnent la turbine à vapeur Arabelle et des alternateurs, ont obtenu des avancées, eux qui déploraient « un mépris » dans les négociations annuelles. Ils n’avaient aucune prime et la seule augmentation concédée était de 0,27 euros sur le panier repas. Cette fois-ci, ils sont ressortis avec une prime de performance de 1 000 euros et une promesse de la direction de recevoir les intérimaires volontaires qui souhaiteraient être embauchés, pour envisager des embauches en 2021. D’autres dossiers sont sur la table, mais aucune précision n’a été donnée. « Il y aura des enjeux dans les mois qui viennent et nous serons présents dessus », note à ce sujet Saïd Bresy, délégué CGT.
Au cours de ce conflit, on a vu des salariés d’autres entités rejoindre le piquet, notamment ceux d’Alstom, inquiet de la situation de l’usine (lire par ailleurs). Cette pression sociale a conduit à l’annulation de la présentation de la nouvelle motrice du TGV du futur à Alstom, qui devait se faire en présence de Jean-Baptiste Djebbari, ministre des Transports ; une mobilisation est prévue à Alstom ce vendredi matin à 9 h. « Nous sommes chacun isolés, mais confrontés aux mêmes problèmes », observe Saïd Bersy, qui veut faire renaître la « solidarité » entre les sites et invite à « la convergence des luttes ».
« La Direction de GE Steam Power à Belfort a conclu un accord avec les représentants du personnel de l’établissement Thermal Manufacturing Belfort concernant la mise en place d’une prime de performance pour l’année 2021. Les activités du site sont à présent revenues à la normale », écrit la direction dans un communiqué de presse.
GE Power Services, un autre plan social
Si ce conflit se termine, la tension reste palpable. Ces « mêmes problèmes », évoqués plus tôt, GE Power services les subit. L’entité est frappé par un plan social. Cette entité, de 335 personnes (au 31 août 2020) à Belfort et La Courneuve, assume des missions d’ingénierie, d’opérations sur les chantiers, de préparation, de maintenance. 46 postes sont menacés à Belfort. 18 concerne l’externalisation complète de l’activité d’envoi de pièce de rechange aux centrales électriques, partout dans le monde ; l’industriel LGE est pressenti pour reprendre l’activité. Les autres suppressions concernent l’arrêt de l’activité qui consiste à louer du matériel et de l’outillage pour la maintenance des centrales électriques. Cela va de la clé de 12, en passant par des coffres électriques, de la métrologie, des rotors… Ils sont installés dans un bâtiment de 15 000 m2, au cœur de General Electric à Belfort et sont notamment spécialisés dans la maintenance des alternateurs, ce qui fait de Belfort un centre d’expertise mondial sur l’alternateur Cette activité doit être transférée totalement à La Courneuve.
Depuis l’annonce du plan en décembre, « on a joué le jeu », confie Nicolas. De potentiels repreneurs venaient visiter l’atelier. Mais aujourd’hui, « il y en a marre d’attendre », lance Camille. « On bloque pour annuler le PSE », ajoute-t-elle alors que les salariés s’organisent pour tenir le piquet de la porte de la Découverte, pendant que leurs collègues négocient une sortie de crise.
Mardi, six contre-propositions ont été formulées pour maintenir l’activité. « Ils veulent faire des économies de mètres carrés, mais il y a de vrais risques industriels », observe Laurent Santoire, élu CGT à GE Power Systems. Le transfert de l’outillage nécessiterait plus de 500 camions ; le coût est énorme. À La Courneuve, Gautier Maurer, élu CGT, questionne aussi le bâtiment et l’espace octroyé à cette activité. Il craint que ce site ne soit pas adapté et soit « dangereux pour les opérateurs », souffle-t-il.
« Maintien de l’outil industriel »
Le départ de cette activité fait perdre « des compétences » et des « savoir-faire », sur la maîtrise des machines, des outils et sur les réponses à apporter en cas de pannes. « Tout le monde a besoin de nos outillages », abonde Nelly. « Les experts, les salariés et quelques responsables hiérarchiques questionnent la logique de ce plan », poursuit Laurent Santoire. « Et les clients s’inquiètent », enchaîne Nicolas. Lorsque l’on sait que General Electric appuie ses orientations stratégiques européennes autour du service, ce plan semble peu compréhensible en fragilisant notamment une entité dédiée au service et à la maintenance. Ce vendredi, la direction doit étudier et commenter les contre-propositions. Lundi et mardi, on poursuit les discussions autour du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), en espérant qu’une solution soit trouvée.
Que ce soit ce PSE ou l’inquiétude quant à la pérennité du site Alstom de Belfort, « l’enjeu, c’est le maintien de l’activité [de fabrication des équipements] neufs industriels, que ce soit côté General Electric et côté Alstom », analyse Laurent Santoire. « Et le maintien de l’outil industriel », ajoute-t-il.
La tension ne retombe pas à Alstom
La tension est toujours forte à Alstom. Les inquiétudes nombreuses. Hier, les salariés ont débrayé. Le ton a effrayé la direction de maintenir la présentation du TGV du futur, ce vendredi. La CGT soutient que la construction des 200 motrices à Belfort n’est toujours pas confirmée. D’autres syndicats le confirment. Les plans de charge l’évoquent aussi. Mais « les salariés veulent des garanties », insiste Eddy Cardot, de la CGT. Il est surtout très inquiet par les départs en production, qui ne sont pas remplacés. Il se questionne aussi sur l’activité du site, marquée par une baisse de charge importante dès l’été (relire notre enquête). Il demande qu’un départ à la retraite soit systématiquement compensé par une embauche, craignant qu’un à moment l’usine ne puisse pas repartir en cas d’arrêt, car elle n’aura pas les compétences. « On veut une vraie stratégie industrielle et pas capitalistique », insiste-t-il, pointant du doigt que Belfort est le seul site français qui fabrique des locomotives. Il attend des garanties pour que cette activité se poursuive. Un mouvement est programmé ce vendredi matin, à 9 h, porte des Trois-Chênes. « Le combat pour maintenir des capacités de production est essentiel », écrit-il dans un appel. « Gagnons une dynamique convergente et revendicative de toute la CGT », poursuit-il.