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Sochaux : des ouvriers de Stellantis voient leur métier lié à l’emboutissage disparaître

Atelier d'emboutissage, à l'usine Stellantis de Sochaux.

Le service dédié à la fabrication des outils d’emboutissage de l’usine Stellantis de Sochaux va fermer dans les prochains mois, dans une logique de mutualisation. Salariés et syndicats dénoncent la méthode de fermeture, dans un contexte délicat pour l’emploi, lié à la crise sanitaire, à la pénurie de micro-conducteurs et à la transformation vers Sochaux 2022.

Le service dédié à la fabrication des outils d’emboutissage de l’usine Stellantis de Sochaux va fermer dans les prochains mois, dans une logique de mutualisation. Salariés et syndicats dénoncent la méthode de fermeture, dans un contexte délicat pour l’emploi, lié à la crise sanitaire, à la pénurie de micro-conducteurs et à la transformation vers Sochaux 2022.

« On nous pousse vers la sortie », souffle un salarié de l’entité PMTO, à l’usine Stellantis de Sochaux, qui souhaite garder l’anonymat. Cette unité conçoit, construit et met au point les outils d’emboutissage. Elle fabrique des équipements qui peuvent peser jusqu’à 30 tonnes, qui sont placés sous les presses et qui permettent de fabriquer les éléments de la voiture. Après l’emboutissage, on obtient par exemple des côtés de caisse. La qualification des ouvriers y est particulièrement reconnue.

Au printemps, cette unité était composée de 80 personnes. En septembre, ils ne sont plus que 30. Bientôt, elle aura disparu. Le désarrois est fort chez les salariés, qui comptent 20 ou 30 années d’expérience. « On n’a plus aucune motivation », souffle l’un d’eux, à l’occasion d’une rencontre organisée par la CGT. « On n’est plus les bienvenue », regrette un autre. « On est de trop », embraie son voisin. « On est traité comme des outils », se désespère un dernier. Au printemps, ils ont compris que le temps était compté. Leur unité allait fermer.

L’absence de reconnaissance est d’autant plus difficile à accepter que pendant des années, ils leur étaient impossible de quitter l’entreprise. Leur métier était considéré comme précieux. Ils ne pouvaient pas prétendre aux différents plans de départs volontaires. « Ils étaient bloqués », explique Benoit Vernier, élu au comité social et économique (CSE), membre de la CFDT. Aujourd’hui, leur métier est considéré comme « sensible », sans avenir à Sochaux. Et il faut partir. « On a complètement changé de discours vis-à-vis de leur métier », regrette Benoit Vernier. « On a du mal à comprendre », confirme un salarié.

Mutualisation

« Nous avons annoncé au printemps qu’il y aurait une baisse progressive de l’activité », confirme la direction du site Stellantis de Sochaux. Si le mot « fermeture » n’a pas été et n’est pas prononcé, l’issue ne fait aucun doute. Dans quelques mois, ce service sera fermé. Plusieurs sources le confirment en interne. « Il y a un problème de communication, avec des non-dits et ce n’est pas acceptable, critique Benoit Vernier. Il y a un manque de transparence qui ne peut que créer colère et déception. »

Pour la CGT, le responsable de cette situation est tout trouvé : c’est la création du groupe Stellantis. « C’est le résultat du Monopoly mondial auquel se livre les constructeurs », dénonce Michel Seguin, trésorier du syndicat CGT du site de Sochaux. « Il y a des doublons. On en sélectionne et on en supprime d’autres », complète Jérôme Boussard, secrétaire général de la CGT Sochaux.

« C’est une activité que tu peux mutualiser entre les sites », précise une source proche de la direction, confirmant la logique à l’œuvre. Dans quelques mois, il ne restera que deux sites de fabrication d’outils d’emboutissage : le site de La Janais, à côté de Rennes ; et le site emblématique d’Opel en Allemagne, à Rüsselsheim. Cette même source rejette pourtant le lien avec la création de Stellantis. Les sites restants sont issus du périmètre PSA. Et la mutualisation était déjà envisagée avant. Benoit Vernier, élu syndical mais aussi salarié de cette entité, ne se faisait pas beaucoup d’illusion quant au devenir de l’unité. L’attrition naturelle conduisait à une réduction inexorable des effectifs. Et il n’y avait pas d’embauches. « Il n’y avait pas de renouvellement générationnel », observe-t-il.

Un porte-parole d’ajouter au sujet de cette activité : « Elle est plutôt liée aux lancements de nouveaux modèles. » Aujourd’hui, si l’usine de Sochaux a bien la confirmation qu’elle fabriquera le prochain Peugeot 3008, ce lancement n’est pas attendu avant plusieurs années. La direction se concentre actuellement sur la réussite du lancement de la future usine Sochaux 2022 et sur sa capacité à produire correctement. En filigrane, cette activité n’est plus aussi stratégique.

Pourtant, selon la CGT, leur utilité ne fait aucun doute. Quand une grosse casse de l’outil intervient à l’emboutissage, les ouvriers peuvent intervenir de suite. Ce qui ne sera plus le cas. « Il y a un risque de blocage de la production », estime Anthony Rué, délégué syndical CGT. « C’est un service de proximité, avec de la réactivité, avec des professionnels qui connaissent leur métier sur le bout des doigts », rappelle Jérôme Boussard.

Contexte difficile

Du côté de la direction, on précise qu’un accompagnement a été mis en place auprès des salariés. On peut partir à Rennes, avec une prime mobilité, à Mulhouse où une équipe supplémentaire de production – si la crise des micro-conducteurs le permet – doit être mise en place pour fabriquer la nouvelle Peugeot 308. Mulhouse dispose aussi d’une usine de mécanique et d’une fonderie où l’on peut rechercher des ouvriers professionnels explique-t-on à la direction de la communication. Une prime de mobilité existe également, de l’ordre de 4 500 euros, selon nos informations.

Les salariés qui sont encore là ont plutôt le sentiment qu’on les force à partir. « Il y a un harcèlement constant pour nous faire comprendre qu’il faut quitter l’entreprise », se plaint un salarié. On les invite à bénéficier de plans de départs volontaires en cours au niveau du groupe, en vantant par exemple les primes actuelles ouvertes par le dispositif d’adéquation des emplois et des compétences (DAEC). Des « offres » sont possibles avant une certaine date. Plus après. Les salariés ont le sentiment d’être dans une vaste opération marketing. « Tout est bon pour décourager les salariés », dénonce Aurore Boussard, la secrétaire du syndicat CGT. « On souhaite que la direction s’engage à nous reclasser, à nous reformer », quémandent les cinq salariés présents à l’occasion de cette rencontre organisée par la CGT.

Les cadres et techniciens ont plutôt facilement retrouvé des points de chute. Mais c’est plus dur pour les ouvriers qualifiés. À Sochaux, les possibilités sont rares. « On est plutôt en sureffectif d’ouvriers professionnels », relève un porte-parole. Les postes ouverts le sont majoritairement au montage ou à la logistique. Les ouvriers vivent cela comme un déclassement, même si on conserve rémunération et classification confirme un proche de la direction. Se greffe à ces difficultés des problèmes administratifs où le passage entre deux services n’est pas toujours simple à cause d’équivalence de catégorie professionnelles regrette le délégué CFDT. « Cela met du sable dans les rouages », déplore Benoit Vernier. Et en décidant de quitter Stellantis pour partir chez un autre emboutisseur de la région, les ouvriers estiment qu’ils vont perdre du niveau de salaire, attaché à leur ancienneté. Pour eux, le choix est difficile. L’arrêt de la ligne de production de la Peugeot 308, le 10 septembre (lire notre article), et les difficultés de production liées à la pénurie de micro-conducteurs – déjà 97 séances de travail annulées depuis février selon nos calculs – renforcent les incertitudes et limitent les opportunités.

Avec le départ de cette fonction, certains voient la confirmation de la destinée de Sochaux. « C’est de plus en plus une usine terminale », remarque un observateur avisé. Des usines seulement dédiées à l’assemblage des véhicules. 200 millions d’euros sont aussi investis pour pérenniser le site pour les prochaines décennies.

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