+ 78 %. En moyenne, c’est l’augmentation individuelle de la rémunération, entre 2021 et 2022, des membres de l’équipe dirigeante d’Alstom, hors p-dg, s’étonne le député de La France Insoumise de la 2nd circonscription du Territoire de Belfort, Florian Chauche, ce mercredi, à l’Assemblée nationale. Lors de sa première question au gouvernement, il a interpellé le ministre délégué, en charge de l’industrie, Roland Lescure, sur ce dossier. Selon les données qu’il a récupéré dans le document d’enregistrement universel, l’enveloppe pour l’équipe dirigeante en 2020-2021 était de 6,5 millions d’euros, contre 9,9 millions d’euros pour l’année comptable 2021-2022. « Les françaises et les français sont particulièrement sensibles aux inégalités de salaire », souligne-t-il, rappelant le contexte inflationniste et le besoin d’un « partage des richesses plus juste ».
Dans sa réponse, Roland Lescure a rappelé la fusion du groupe Alstom et de Bombardier (l’actionnaire principal du nouveau groupe est la caisse des dépôts et placement du Québec, à hauteur de 18 %), entraînant une équipe de direction « plus large ». « Vous comprendrez bien que la rémunération de l’une soit supérieure à celle de l’autre car il y plus de personnes à rémunérer », a-t-il indiqué. Dans un communiqué de presse envoyé par la suite, Florian Chauche précise que le document universel fige le périmètre pour justement permettre des comparaisons, indiquant qu’il y avait 21 personnes dans l’équipe de direction en 2020-2021 et 18 en 2021-2022, quand le montant est passé de 6,5 à 9,5 millions d’euros.
Délocalisations
Roland Lescure a surtout motivé les hauts salaires par la concurrence mondiale. En fusionnant, Alstom et Bombardier ont formé un opérateur mondial de matériel ferroviaire, même s’ils sont encore très loin du Chinois CRRC. « On ne gagnera pas la coupe du monde avec des joueurs rémunérés comme des joueurs de ligue 2 ou de ligue 3 », a imagé le ministre. « Si je reprends son analogie, tance Florian Chauche dans son communiqué, c’est comme si dans l’équipe de France, Deschamps avait le salaire de Bernard Arnault et Mbappé celui d’un joueur de l’ASM Belfort ! »
Roland Lescure précise toutefois que les hautes rémunérations doivent être attachées à « des objectifs de long termes » et qu’elles ne doivent pas être « au détriment des salariés de l’entreprise elle-même ». Les négociations salariales sont programmées en février, replace le député. « Ne vous attendez pas à des miracles, craint le député. La « prime importante » dont parle le ministre est en réalité́ de 800 euros pour les salaires de moins de 3 000 euros brut/mois et 700 euros pour ceux compris entre 3000 et 3500 euros. Cela ne touche que 40 % des salariés. »
Florian Chauche a surtout profité de cette tribune pour questionner le ministre sur les intentions industriels d’Alstom. « Le groupe Alstom semble pousser le cynisme encore plus loin », déplore le député, évoquant le plan stratégique Alstom in motion. Il regrette que l’industriel affiche l’ambition de délocaliser 40 % de ses études et 60 % de sa fabrication dans « des pays à bas coût », « à l’heure où la relocalisation industrielle est un enjeu majeur pour notre pays et où la prise en compte du bilan carbone de nos activités est un souci de premier plan ». Le ministre a répondu, pour la partie fabrication, que la signature de contrats impliquait toujours une production sur place. « Des marchés franco-français payés pas le contribuable ont une part importante de leur fabrication qui sera faite en Inde ou en Chine (le métro de Toulouse par exemple), dénonce enfin le député. Et je répète que 30 % aujourd’hui, 40 % demain des études de produits français sont ou seront sous-traitées à Alstom Inde. »