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Ces maires inquiets de l’arrivée d’Amazon à l’Aéroparc de Fontaine

Trois communes ont déposé un recours contre l’installation de plateformes logistiques à l’Aéroparc de Fontaine, fin octobre. Des plateformes dont les indices concordent de plus en plus pour désigner un seul et unique client : Amazon
L'Aéroparc de Fontaine est une zone d'activités créées en 1992.

Trois communes ont déposé un recours contre l’installation de plateformes logistiques à l’Aéroparc de Fontaine, fin octobre. Des plateformes dont les indices concordent de plus en plus pour désigner un seul et unique client : Amazon. Elles s’associent à des associations de riverains et à des associations écologistes. Mais pointent surtout deux choses : les nuisances induites par ces projets sur la circulation routière et le manque de concertation.

Trois communes ont déposé un recours contre l’installation de plateformes logistiques à l’Aéroparc de Fontaine, fin octobre. Des plateformes dont les indices concordent de plus en plus pour désigner un seul et unique client : Amazon. Elles s’associent à des associations de riverains et à des associations écologistes. Mais pointent surtout deux choses : les nuisances induites par ces projets sur la circulation routière et le manque de concertation.

« Nous ne sommes pas contre le développement économique, ni contre les emplois », prévient Michel Nardin, maire d’Angeot. « On ne s’oppose pas au développement de l’Aéroparc », poursuit-il. On sent que le dossier de l’installation de deux plateformes logistiques à l’Aéroparc de Fontaine est un dossier épineux. Des plateformes dont les indices concordent de plus en plus pour désigner Amazon comme unique client final de ces deux projets portés par deux aménageurs différents : Vailog pour la plateforme de 76 000 m2, projet intitulé « Citadelle » ; Vectura pour la plateforme de 9 800 m2, projet nommé « Lana ».

Avec ses homologues maires de Larivière, Marc Blondé, et de Lachapelle-sous-Rougemont, Éric Parrot, ils ont déposé le 23 octobre un recours devant le tribunal administratif de Besançon contre l’autorisation environnementale accordée par la préfecture du Territoire de Belfort, le 22 juin, au projet de la plateforme de 76 000 m2 porté par l’aménageur Vailog. Dans ce recours, ils sont associés aux Amis de la terre, à France nature environnement 90 et deux associations de riverains, une de Fontaine et une autre de Larivière.

Déjà des nuisances

Les trois communes subissent déjà des nuisances liées à l’activité de l’Aéroparc. Prenons Lachapelle-sous-Rougemont. La commune semble à la marge de la zone d’activités. Pourtant, le trafic des poids lourds y est intense car on traverse le village pour éviter de payer le péage de l’A36 en empruntant le R.D. 83, menant à Burnhaupt, dans le Haut-Rhin. Et ces poids lourds rejoignent l’Aéroparc en passant par Angeot et Larivière, via la R.D. 11. On enregistre plus de 10 000 véhicules par jour au carrefour entre la R.D. 83 et la R.D. 11. Cela fait en moyenne près de 7 véhicules par minute ; cela donne une idée de la densité aux heures de pointe.

Ces communes sont pourtant interdites aux poids lourds en transit. « On a du mal à faire respecter cet arrêté communal », confirme Éric Parrot. Ce dernier se bat depuis 2014 pour avoir un arrêté qui interdirait les poids lourds en transit sur l’entièreté de la R.D. 83, dans le Territoire de Belfort, entre Roppe et Burnhaupt. Si les transporteurs comme XPO respectent bien le transit via l’A36, ce sont principalement leurs « sous-traitants », estiment les trois maires, qui contournent le péage en passant par la R.D. 83 et la R.D. 11.

De fait, l’arrivée de deux nouvelles plateformes inquiète les édiles. « Ce type de projet impacte fortement la qualité de vie des territoires proches », écrivent-ils dans un courrier adressé à Damien Meslot, président du Grand Belfort, en date du 23 janvier 2020, que Le Trois a pu consulter. « La situation est extrêmement préoccupante », alertent-ils. « Les camions klaxonnent ou collent de façon très dangereuse les automobilistes souhaitant rentrer dans leurs habitations, les insultes fusent, les camionnettes des pays de l’Est passent à plus de 100 km/h dès que la circulation est moins dense ou doublent quand elles estiment que ça ne roule pas assez vite, énumèrent les trois élus, avant de constater : L’impact actuel des activités de l’Aéroparc est déjà très fort. » Puis de poursuivre : « Nous craignons que cette nouvelle implantation ne fasse qu’augmenter le problème. Tant que le péage sera actif, il est si tentant de frauder pour éviter de payer ! Et les gendarmes ne peuvent pas contrôler les infractions continuellement. »

La nuisance sera forte. La sécurité est au centre de leur préoccupation. « La question n’est pas de savoir si c’est Amazon ou non, modère Michel Nardin, mais, c’est la question du trafic. » Et de relever : « On a attiré l’attention avant qu’Amazon ne soit dans le débat. »  Dans un compte rendu d’une réunion du 19 octobre, réunissant plusieurs élus de communes environnantes de l’Aéroparc, que Le Trois a pu également consulter, les élus listent des problèmes de pollution de l’air, de pollution sonore et d’usure accélérée de la chaussée. Ils énumèrent aussi les exemples de dangers dans les traversées de leurs villages, démultipliés par une augmentation de la circulation.

Tromperie ou opacité ?

Michel Nardin, Éric Parrot et Marc Blondé sont particulièrement inquiets par les conséquences du projet Lana, une plateforme dite du dernier kilomètre. C’est l’annonce de cette seconde plateforme, au mois de janvier, qui les a alertés. « On apprend que le parking comprend 650 places », relève Michel Nardin. Des places dédiées, selon plusieurs hypothèses, à des camionnettes de livraison. Lors de l’annonce, en janvier, Damien Meslot, président du Grand Belfort, et Florian Bouquet, président du conseil départemental du Territoire de Belfort, évaluaient le flux de véhicules lié à cette nouvelle activité à 150 véhicules légers, 700 fourgonnettes et 20 poids lourds par jour (notre article). Il va y avoir « un trafic intense de véhicules légers » craint Michel Nardin. « Cela concerne nos communes, mais la problématique est beaucoup plus large », poursuit l’édile.

Si les maires déposent un recours contre le projet Citadelle, c’est-à-dire la plateforme de 76 000 m2, c’est que le projet Lana, mesurant moins de 10 000 m2, n’est pas soumis à enquête publique, comme le regrettait dernièrement l’élu d’opposition Bastien Faudot. Pourtant, la probabilité que ce soit le même projet est bien là adhère Marc Blondé. « C’est sans doute ce qui nous attend », glisse-t-il. Si c’est le cas, c’est « incohérent » que l’enquête publique n’associe pas ces deux projets. « Et si c’est le même opérateur (le même client final, NDLR), il y a tromperie », estime même le maire de Larivière. Éric Parrot de regretter : « S’il n’y a pas tromperie, il y a au moins opacité. » Et ça, ça passe mal.

« Le recours est un moyen de retarder les échéances, note Marc Blondé, pour mettre en place une réflexion et une stratégie. » C’est ce qu’ils réclament. Un courrier a été adressé au président du Grand Belfort. Une rencontre a été organisée avec le préfet du Territoire de Belfort. Pour autant, jamais les promoteurs du projet n’ont travaillé de concert avec les élus locaux en les mettant tous autour de la table, ni dans la boucle. Une rencontre a été sollicitée dernièrement. Pas de retour. « Nous aurions aimé une réunion avec les communes, déplore Marc Blondé, pour réfléchir ensemble. » Ces élus évoquent par exemple des réflexions nécessaires autour des transports en commun, des mobilités douces menant à l’Aéroparc. Aujourd’hui, ces analyses sont absentes.

Qui des contournements

« Nous réclamons une réflexion plus globale », note le maire de Lachapelle-sous-Rougemont. « Une étude général des flux », poursuit Michel Nardin, surtout si les promesses d’emplois se réalisent ; on multiplierait pratiquement par trois le nombre de salariés sur la zone.

Dès l’annonce de l’installation de la première plateforme, en octobre 2019, le conseil départemental a évoqué des aménagements (carte ci-dessous). Aujourd’hui, on parle notamment du contournement du village de Frais. Le projet est à l’étude. Ce contournement partirait de la R.D. 419 entre Bessoncourt et Frais, pour rejoindre l’Aéroparc, en contournant le village par le sud et en recroisant la portion de la R.D. 419 qui relie Frais à Foussemagne. « C’est intéressant sur le papier, concède Michel Nardin. Mais il y a un effet retard important. » Le projet n’est pas attendu avant 2025 et on évoque déjà un budget de 6 millions d’euros. « Pendant ce temps-là, que fait-on ? » questionne-t-il. Les élus ont aussi évoqué l’option d’un contournement nord, qui contourne Lagrange, passant au-dessus de l’A36.

Ce projet, évoqué dès les débuts de l’Aéroparc, relie la R.D. 83, l’A36, la R.D. 60 et la R.D. 419. La partie à l’est de l’autoroute a été aménagée par le Département. Pas celle à l’ouest de l’axe autoroutier, du côté de Lachapelle-sous-Rougemont et Lagrange. Selon nos informations, le conseil départemental est pourtant propriétaire de ces terrains pour cet aménagement. Mais le coût est plus important : il faut doubler un pont sur l’autoroute.

Promesses

Pour Michel Nardin, en plus des délais de réalisation, ces contournements « ne suffisent pas ». Le problème, c’est le péage. Ce que confirme Éric Parrot. Il signale que ces contournements n’amènent aucun bénéfice à Lachapelle-sous-Rougemont. Tant que le péage est là, certains l’évitent et traversent son village, via la R.D. 83.

Dans une lettre datée du 21 octobre du président du Grand Belfort aux habitants de Lachapelle-sous-Rougemont – qui n’appartient pourtant pas à l’agglomération belfortaine –, il est écrit que « les deux exploitants (des deux plateformes, NDLR) envisagent de prendre à leur charge les abonnements de télépéage de leurs salariés pour leurs trajets domicile-travail afin de les inciter à emprunter l’autoroute ». Mais aucun engagement n’est formulé par le(s) exploitant(s). Et exploitant signifie-t-il client final ? Les mots « projettent », «conditionner » et « envisagent » ne sont pas suffisants pour les élus. De simples promesses. « Vailog peut négocier ce qu’il veut. Et l’exploitant final pourra dire qu’il n’a rien négocié, interpelle Éric Parrot. Cela ne contribue pas à nous rassurer. » Ce courrier de Damien Meslot a aussi été envoyé aux habitants des communes proches de l’Aéroparc, comme à Larivière.

Dans ce dossier, il y a beaucoup de questions. Beaucoup de mystères. Beaucoup de promesses. Mais peu d’éléments, pour les édiles, afin de se projeter, sauf s’ils sont prêts à faire un chèque en blanc. Et c’est bien ce qui semble être un facteur bloquant. Et les trois édiles ne veulent pas réduire le débat public à une opposition « pro-environnement » contre « pro-emplois ». « Il y a des sujets à prendre à bras le corps, réclame Michel Nardin. Il faut qu’on se mette autour de la table. » Seront-ils entendus ?

Ancienne base Otan désaffectée

L’Aéroparc est une zone d’activités créée en 1992 par le conseil général, sur les terres d’une ancienne base aérienne de l’Otan, à cheval sur les communes de Fontaine, Reppe et Foussemagne. Aujourd’hui, elle accueille environ 800 personnes. En termes d’entreprises, on trouve notamment le transporteur XPO, Geodis, mais aussi l’équipementier Adler France, spécialisé dans les matières plastiques. On y trouve aussi la multinationale Plastic Omnium, équipementier automobile qui fabrique notamment des pièces de carrosserie. À la création de la zone d’activités, on envisageait 2 000 emplois.  Une ferme solaire de 37 ha doit être installée, initialement à l’horizon 2022. 90 000 panneaux solaires doivent être disposés.

Avec ces annonces, ce sont 1500 emplois promis par Damien Meslot, président du Grand Belfort. Ils sont nombreux à contester la pertinence de ces projections d’emplois. L’opposition belfortaine, d’une part, mais aussi les maires de ces trois communes qui, dans leur courrier adressé à Damien Meslot, glissent « que les activités logistiques ne sont pas les plus pertinentes pour créer de l’emploi durablement ». Et de citer l’ambition d’Amazon d’ici 10 ans : des entrepôts 100 % automatisés. Ils citent ainsi l’exemple de l’entrepôt de Bretigny-sur-Orge, déjà équipé de 4 000 robots.

La réforme de la loi NOTRe a des conséquences importantes pour ces communes, avec la dissolution du syndicat mixte d’aménagement et de gestion de l’Aéroparc (Smaga). Il est géré dorénavant par le Grand Belfort, compétence en matière économique. « Je trouve cela aberrant que l’Aéroparc ne garde pas son caractère départemental, déplore Éric Garrot, dont le village fait partie de la communauté de communes des Vosges du Sud (CCST). On va déséquilibrer le territoire avec ce montage-là. » Il sait de quoi il parle ; ne faisant pas partie du Grand Belfort, il ne percevra plus chaque année d’argent issu de l’activité de l’Aéroparc. Ce sont 5 000 euros qui disparaissent de son budget de fonctionnement.

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