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Municipales : mais que se passe-t-il au Parti socialiste à Belfort ?

Un drapeau du Parti socialiste (PS) lors du rassemblement pour défendre la démocratie et l'État de droit, aprÈs le jugement de responsables politiques du Rassemblement National (RN), le 12 avril 2025.
À Belfort, le Parti socialiste est des plus convoité dans le cadre des municipales. | ©Bastien André – Hans Lucas via AFP
Enquête

Le 2 octobre, les socialistes belfortains ont élu le premier des socialistes pour mener la campagne des municipales, à Belfort. C’est Marie-Eve Bélorgey qui a été désignée. Lucas Vanitou, qui convoitait ce poste, s’est retiré avant le scrutin. Les socialistes rejettent définitivement une alliance avec la France insoumise, prônée notamment par Lucas Vanitou. Entre invectives, accusations et manœuvres politiques, Le Trois a mené l’enquête.

La rose socialiste est des plus convoitées depuis un an, dans le Territoire de Belfort. L’approche des municipales, sans aucun doute. « Tenir » la fédération revêt un intérêt stratégique, quelle que soit la force de gauche en puissance, pour aller conquérir la mairie. Une utopie, pour certains, tant la dynamique de la gauche est fragile depuis plusieurs scrutins, dans le département. Mais un succès de la gauche, tout hypothétique qu’il soit, passera inévitablement par le Parti socialiste. Tout le monde en est conscient. Pour un parti en mal d’adhérents pendant près d’une décennie et pour une fédération en crise existentielle lors des élections municipales de 2020, c’en est presque flatteur.

Jeudi 2 octobre, les militants socialistes de la Fédération étaient invités à s’exprimer pour élire le premier ou la première des socialistes, en vue des élections municipales. Au mois de juin, ils s’étaient déjà positionnés en faveur d’une ligne de rupture avec la France insoumise, dans le cadre du Congrès du Parti socialiste (lire notre article). Le scrutin de jeudi devait confirmer ou non cette tendance, mais surtout clarifier une situation devenue parfois ubuesque ! Plusieurs militants négociaient au nom du parti avec d’autres forces de gauche, sans forcément détenir de mandat.

Sans grande surprise, Marie-Eve Bélorgey, qui incarne cette rupture avec LFI, a été élue ce jeudi ; elle était la seule candidate, après le désistement de Lucas Vanitou, quelques heures avant le scrutin. Un désistement annoncé avec perte et fracas. Celui qui appelle justement à un rassemblement des forces de gauche le plus large possible, y compris avec La France Insoumise, n’y va pas de main morte à l’encontre de son ancienne challenger (voir ci-dessous). Il dénonce des manœuvres politiciennes. Estime qu’il y a des « irrégularités ». Et critique des « interférences » de la Gauche républicaine et socialiste (GRS), représentée localement par Bastien Faudot. Il demande même une commission d’enquête au Parti.

Élection après un scrutin annulé

Mais pourquoi en sont-ils arrivés là ? Le 3 avril, les socialistes français sont invités à désigner, dans les villes où il n’y a pas de maires socialistes sortants, le 1er des socialistes pour les municipales de 2026. Depuis plusieurs mois, les manœuvres ont débuté dans la cité du Lion pour prendre le contrôle de la fédération du Parti socialiste. Un parti dont la première fédérale est Marie-Eve Bélorgey. Les premiers coups sont donnés. Les premières tractations, lancées. Une guerre de tranchées s’installe à Belfort.

Mécaniquement, des « alertes » remontent au niveau national, confirme Amin Mbarki, secrétaire national chargé des fédérations, joint par téléphone ce samedi. Ces éléments interpellent le siège du parti. Le conseil national, à l’unanimité, décide alors de suspendre le scrutin terrifortain, afin d’y voir plus clair. À Belfort, les socialistes décident quand même de maintenir le vote : les militants doivent choisir entre Marie-Eve Bélorgey et Lucas Vanitou.

Quid de Maude Clavequin ?

Lucas Vanitou dénonce le rôle de Maude Clavequin dans les positions actuelles de la fédération du Parti socialiste du Territoire de Belfort. « Elle est exclue », assure-t-il, pourtant. Elle l’a été, en 2020, après avoir fait le choix de s’unir avec les forces d’Emmanuel Macron (lire notre article). L’ostracisme n’est pourtant pas définitif, confirme-t-on, à Paris. Maude Clavequin est bien membre du Parti socialiste. Elle a été réintégrée. Les sanctions ne sont jamais à vie, confirme-t-on au PS. Si la personne veut ré-adhérer, elle le peut. « Il n’y a pas d’obstacle majeur, note Amin Mbarki, Nous ne sommes pas des sectaires. Nous accueillons celles et ceux qui ont fait des erreurs et qui donnent des gages. »

Marie-Eve Bélorgey est désignée. Mais le scrutin est invalidé par le Parti socialiste, qui le juge « nul et non avenu ». Aujourd’hui, dans ses communiqués et sur les réseaux sociaux, Lucas Vanitou ne cesse de dénoncer les irrégularités de Marie-Eve Bélorgey sur ce vote. Pour autant, il a bien signé un document, que Le Trois a consulté, qui stipule que les deux candidats étaient « d’accord de maintenir le vote militant du 3 avril » malgré la décision nationale. Pour se défendre, le militant reconnaît avoir signé ce document, mais indique « qu’il n’avait pas tous les éléments en sa possession », notamment la décision du conseil national du PS d’empêcher l’élection belfortaine. Il estime que Marie-Eve Bélorgey a « caché » des éléments aux militants. Des accusations que ne peut ni « confirmer » ni « infirmer » Amin Mbarki. « Ces accusations ne sont pas fondées, se défend Marie-Eve Bélorgey, que les militants ont plébiscité ce jeudi. Dès que Lucas Vanitou est perdant, il rue dans les brancards et dit que ce n’est pas fait correctement. »

Volonté d’une médiation nationale

Déjà, dans ce scrutin du mois d’avril, se joue la position du Parti socialiste local à l’égard de la France insoumise (LFI). Cette dernière est l’une des forces vives d’une liste de gauche, assurant l’héritage du Nouveau front populaire construit en 2024, lors des législatives, en lien avec le Parti communiste, les Verts et le mouvement citoyen En commun pour Belfort.

Une situation qui fait réagir

Dans un communiqué de presse, La France insoumise dénonce la stratégie du « Parti socialiste de Madame Bélorgey et de la GRS de Bastien Faudot [de faire] le choix de la division ». D’ajouter : « Le choix de la discorde, est un cadeau fait au maire sortant et à l’extrême-droite. » Les communistes disent de leurs côtés s’être fixés comme « objectif majeur, [de] permettre le rassemblement de l’ensemble des forces de gauche dès le 1er tour ». Ils demandent de « maintenir le dialogue à gauche ». Comme un message adressé aux leaders des deux listes de gauches qui se profilent. « La reconquête de la ville de Belfort par la gauche exige au contraire l’union qui seule peut faire émerger une dynamique répondant à l’aspiration majoritaire », écrit le PCF. D’ajouter : « L’heure n’est pas à la logique de primaire de 1er tour pour mesurer le rapport de forces et définir le leadership entre deux organisations. »

Au national, on déplore ces divisions au sein du PS. Amin Mbarki reprend le dossier au mois de juin, quand il devient secrétaire national aux fédérations. Les belfortains doivent désigner le premier des socialistes pour les municipales. Il veut donc rassembler, pour organiser un vote « plus tranquille ». « J’ai proposé une médiation, par mon intermédiaire, pour mettre en place les conditions du vote », indique Amin Mbarki.

Il a rencontré, fin septembre, Marie-Eve Bélorgey et le bureau fédéral (Vivien Schwalm, Martine Daeron et Maxime Wack) d’une part ainsi que Lucas Vanitou, Léo Prassel et Christian Proust, d’autre part. Une proposition de conciliation a été faite. Un document à signer par les deux parties. Dans ce texte, qui ne devait pas être rendu public, mais que Le Trois a pu consulter, on peut notamment lire :

« Les socialistes prendront toute leur place dans la campagne municipale à venir et y exprimerons avec force les propositions et leur projet pour mieux vivre à Belfort. Un projet qui se fera en lien avec des partenaires de gauche, pour un rassemblement le plus large possible. Les socialistes continueront à rechercher les convergences nécessaires au rassemblement de la gauche, sans que le contexte actuel permette un accord avec la France insoumise. »

Lucas Vanitou n’a pas souhaité signer ce document. Ni participer au vote du 2 octobre. « Que nous participions ou pas, ils obtenaient gain de cause », critique Lucas Vanitou. Surtout, il estime que participer au vote du 2 octobre contribuait à « nettoyer une situation litigieuse ». Marie-Eve Bélorgey regrette que Lucas Vanitou ne respecte pas l’expression de la démocratie et ne soutienne pas le choix du parti : « Je suis rangé derrière Olivier Faure (Premier secrétaire du PS, NDLR), même s’il n’était pas le chef de fil du texte d’orientation que je soutenais. »

« Marie-Eve Bélorgey est la candidate des socialistes »

« J’ai constaté qu’il n’y avait pas de convergences possibles », regrette Amin Mbarki, lors de son déplacement à Belfort. Pour autant, le secrétaire national décide d’organiser le vote. Ce n’était pas aux instances nationales de trancher, replace-t-il. Mais bien aux militants locaux. Le vote a eu lieu le 2 octobre. Et a été validé par le parti dans la foulée. « J’ai voulu que ce vote règle [le différend]. Ce n’est pas le cas. Je le regrette », confie-t-il.

Amin Mbarki est bien conscient que « les socialistes de Belfort sont en train de régler un passif qui vient de loin ». « Je n’ignore rien du passé entre Bastien Faudot et la gauche lors du précédent scrutin. C’est aux camarades de juger », ajoute-t-il, confirmant que la GRS est un « partenaire »  du parti. Il rappelle surtout, qu’aujourd’hui, les militants se sont exprimés : « Marie-Eve Bélorgey est la candidate des socialistes. Lucas Vanitou n’a pas souhaité se présenter, c’est son droit. »

Lucas Vanitou réclame une commission d’enquête sur la fédération du Territoire de Belfort. À Paris, la réponse est simple : « Il faut se concentrer sur les échéances électorales. On ne va pas monopoliser de l’énergie à lancer des commissions d’enquête. » Lucas Vanitou ne soutiendra pas la fédération locale, c’est certain. Il prône toujours une union complète des forces de gauche « avec toutes les étiquettes politiques », impliquant LFI, rejetée aujourd’hui par le Parti socialiste belfortain. Il est, toutefois, conscient de « l’agressivité » de LFI, parfois, à l’égard du PS. Mais il veut localiser le débat, convaincu qu’une union dès le premier tour est le seul moyen de gagner les élections municipales. Pour Marie-Eve Belorgey, c’est l’inverse : LFI agit comme un repoussoir et pénaliserait une force de gauche associée.

Sur le rassemblement de la gauche, Amin Mbarki insiste pour dire que sa priorité est de rassembler les socialistes de Belfort. D’ajouter : « Mon souhait, c’est que le rassemblement se fasse le plus largement possible. » Avec ou sans La France insoumise ? « Nous sommes plutôt dans une situation où LFI nous attaque », convient-il. De citer Paris, Montpellier, Toulouse ou Nantes. Il n’y aura pas d’accord national. Mais cela ne veut pas dire, modère-t-il, que localement, il ne peut pas y avoir des socialistes et des membres de LFI sur la même liste, citant le cas d’Agen. À Besançon, LFI a annoncé qu’il soutenait la maire écologiste sortante, au printemps. « Il y a tellement de situations locales différentes », relève-t-il. À Belfort, les militants socialistes ont tranché : ils ne veulent pas s’associer à La France insoumise. Le dossier restera épineux jusqu’aux municipales

Qui est candidats aux municipales à Belfort ?

Le maire Les Républicains (LR) sortant, Damien Meslot, joue la montre. Officiellement, il réfléchit. Seule certitude, il n’a pas officialisé sa candidature. Rien ne presse non plus, pour lui. En 2020, il avait officialisé sa candidature le 24 janvier (lire notre article), sept semaines avant le scrutin. Christophe Grudler (MoDem) a fait part de son intention de participer aux municipales très tôt en 2025 (lire notre article). Une liste de gauche, construite autour de La France insoumise est également sur les rails, héritière du Nouveau front populaire des législatives de 2024, en lien aujourd’hui avec le Parti communiste français, les Verts et le mouvement citoyen En commun pour Belfort. Florian Chauche, ancien député LFI, devrait incarner cette liste, mais ce n’est pas encore officiel. Lutte ouvrière doit aussi présenter une liste, comme en 2020. Une troisième liste de gauche est attendue, à laquelle doit participer justement le Parti socialiste. Le nom de Bastien Faudot (GRS) circule fortement, sans que cela ne soit encore officialisé. Le Rassemblement national, qui n’avait pas de candidat en 2020, présentera sa tête de liste ce vendredi 10 octobre. Quentin Macullo, attaché parlementaire de Guillaume Bigot, devrait la mener.

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