Les fers à repasser sont en action, ce vendredi matin, au cœur du 35e régiment d’infanterie de Belfort. On se prépare activement à la cérémonie de passation de commandement prévue en ville-ville de Belfort, en fin de matinée. Le colonel Philippe Le Duc transmet son commandement au colonel Franck Duchemin.
L’activité a été intense pendant 24 mois. Alors qu’il prenait son bâton de chef de corps, au début de l’été 2023, le colonel Le Duc filait à la frontière est de l’Europe pour prendre le commandement du bataillon de l’Otan stationné en Roumanie (lire notre article). Quatre mois de mission, dans le cadre du dispositif Aigle, de renforcement du flanc Est de l’Otan, pour dissuader les velléités russes. Dans le prolongement, les unités belfortaines ont filé en Grèce puis en Pologne, pour des exercices interalliés d’ampleur.
« Le bilan est extrêmement positif et riche », confie le colonel Philippe Le Duc, depuis le bureau qu’il s’apprête à quitter. Ce lundi, il prend ses fonctions de chef d’état-major de la 4e brigade d’aérocombat, qui regroupe les régiments d’hélicoptères de combat de l’armée de terre ; cette brigade est intégrée au commandement des actions dans la profondeur et le renseignement (CAPR), créé en 2024, dans laquelle est aussi intégré le 1er régiment d’artillerie de Bourogne (notre article).
Recrutement actif
Lors de la sa prise de poste, en 2023, le régiment était « particulièrement touché par le phénomène de sous-recrutement », replace-t-il. Aujourd’hui, « nous sommes bien alignés sur les effectifs », apprécie-t-il. Le régiment a notamment profité des séquences liées aux commémorations de la Libération « pour être présents et nous montrer ». Localement, mais aussi dans toute la Bourgogne-Franche-Comté et le sud Alsace ; l’histoire du régiment est liée aux maquis de Bourgogne et à la libération du sud Alsace ce qui étend sa sphère d’influence.
En 2024, le régiment a recruté 237 personnes, dont 40 directement, grâce à la cellule mise en place dans le régiment. Une nouveauté qui permet de « compléter les angles morts » du recrutement, assuré à l’échelle nationale. Il a aussi porté une volonté nationale de « faire entrer la jeunesse dans la caserne ». Sur de courtes périodes ou pour des découvertes.
Ces séquences mémorielles ont également permis de « réactiver l’ADN » du régiment. Ce dernier a été recréé, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à partir des effectifs des forces françaises de l’intérieur (FFI) des maquis de Bourgogne. Son histoire est celle de soldats professionnels, d’appelés, lors des grands conflits, mais aussi de résistants. « Un Gaillard (surnom des militaires du 35e RI, NDLR) est là pour défendre son pays, qu’il soit professionnel, volontaire ou réserviste, relève le colonel Philippe Le Duc, qui souhaite justement effacer ces différences que l’on pouvait avoir entre les différentes formes d’engagement. Il n’y a qu’un Gaillard à la fin. »
La place des drones
Dans sa nouvelle affectation, l’ancien chef de corps fera face à de nombreux défis, notamment un espace aérien « de plus en plus contesté par les drones ». Ces drones seront aussi un défi pour son successeur, passé par le régiment entre 2021 et 2023, comme chef du bureau opération instruction (BOI) ; il a même accompagné le colonel Le Duc en Roumanie.
Il arrive de l’état-major de l’armée de terre, où il était affecté à une structure qui suivait tous les programmes des systèmes d’armes. Il a travaillé sur les véhicules blindés, mais aussi sur toute la connectivité du combattant. Ce Saint-Cyrien, breveté de l’école de guerre, est aussi passé par Polytechnique. Comme capitaine au 92e régiment d’infanterie, à Clermont-Ferrand, il a été projeté dans le cadre de Serval, dès le début des opérations.
Son commandement va être consacré aux fondamentaux. C’est une phase de grands exercices, de « remontée en puissance », après une phase opérationnelle intense. Il faut intégrer les nouvelles recrues, qui représentent environ un quart des effectifs, venues renforcer le régiment lors de ces 24 derniers mois. « Ces jeunes, il faut les qualifier », indique le nouveau chef de corps. Et les adapter aux nouvelles méthodes, notamment impliquées par la place prise par les drones. Des éléments qui font planer une menace constante, depuis les airs, sur la tête des Gaillards. « Cela ajoute une pression qu’il faut apprendre », explique l’officier supérieur.
Le 35e RI au défilé du 14-Juillet à Paris
En 2024, le 35e régiment d’infanterie avait défilé à Paris lors des cérémonies du 14-Juillet avec des éléments volontaires de son expérimentation de volontaire découverte de l’armée de terre (VDAT). Cette année, le régiment y retourne, avec près de 250 hommes. Deux compagnies vont défiler et quatre VBCI. Le colonel Duchemin en sera à son 4e défilé sur les Champs-Élysées.
Les drones vont aussi avoir une place plus grande dans leur manière de combattre. Ils vont équiper chaque unité de combat ou véhicule, conformément à la politique de dronisation de l’armée de terre. Le premier drone accessible, c’est le poids plume black hornet, d’une trentaine de grammes, sorte « de jumelles déportées », qui permet d’éviter d’envoyer une unité trop près de l’ennemi.
Le 35 sera aussi un régiment expérimental de la nouvelle munition téléopérée Damoclès, à partir de l’automne ; le régiment avait déjà été régiment expérimental lors de la mise en place du VBCI. Cette munition se pilote comme un drone, mais peut-être aussi utilisée pour faire feu. C’est ce qu’on appelle des munitions rôdeuses. Ces drones embarquent une charge explosive. Cet équipement permet d’être très réactif et de s’adapter aux mouvements sur le terrain de l’adversaire. Elles volent, couvre un large territoire qui permet de détecter et de faire feu de suite ; cela permet de s’affranchir du risque de déplacement des unités visées entre l’acquisition de la cible, la programmation d’un tir, son feu et son arrivée sur la cible : le risque existe toujours que celle-ci se déplace dans ce laps de temps.
Le régiment doit être redéployé en Roumanie fin 2026. Et il participera à un grand exercice, Orion, au printemps 2026, ainsi qu’un autre, international, en Suisse.
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Photos prises par ©35e RI – caporal-chef Matthieu
