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Belfort : et si on mangeait un repas comme en 2050 ?

Le 30 novembre, un repas comme en 2050 organisé à Belfort. | ©Adobe stock
Entretien
Une association organise un dîner original, à Belfort, le 30 novembre : un repas, comme en 2050. Un repas qui prend en considération le réchauffement climatique, mais aussi les dérives liées au système alimentaire mondial. Le repas se veut local, bon et bon pour la planète.

« Le futur a déjà commencé » est une phrase prononcée par Edgard Morin, en 1972 ; elle a même été dite aux Salines d’Arc-et-Senans (Doubs). 1972, c’est aussi l’année du club de Rome, du rapport Meadows sur les limites de la croissance. « Il y a une grande prise de conscience qu’on va dans le mur », relève Daniel Gilbert, professeur des universités en biologie, à l’université de Franche-Comté. C’est aussi le nom d’une association, créée en 2023, « de médiation climatique », ajoute celui qui est à son initiative. Elle vise à toucher les gens « qu’on ne touche jamais » pour les sensibiliser aux questions du climat ; cette année, la question alimentaire est souvent revenue dans les actions. Elle travaille notamment avec le Grand Belfort autour de la réalisation d’une fresque de l’alimentation, déclinaison de la fameuse fresque du climat, qui permet de comprendre les mécanismes du réchauffement climatique.

Le 30 novembre, l’association organise un repas, comme en 2050. Mais pas d’insectes à l’horizon. Un repas de 2050 est « bon pour la santé, bon à manger et bon pour la planète », résume Daniel Gilbert. Il vise à réduire son empreinte carbone, mais aussi son empreinte écologique, qui mesure l’espace nécessaire à un produit alimentaire pour être produit, stocké mais aussi traité. Autant d’éléments, par exemple, qui peuvent jouer sur d’autres facteurs, comme la qualité des eaux présentes autour. « Pour un repas classique, en France, on va utiliser 6 m2 de sol », replace l’enseignant-chercheur. La volonté de l’association est de descendre cette empreinte écologique à 2 m2.

Prendre en compte le coût global

Qu’aura-t-on dans l’assiette ? « On va manger des choses qui ressemblent à aujourd’hui », observe Daniel Gilbert. Mais d’abord, il faut se poser des questions : le produit vient-il de loin ou est-il local ; sa production génère-t-il une forte empreinte carbone, à l’instar de la viande ; va-t-on l’optimiser, en limitant le gaspillage. Le repas est préparé par le chef Romain Marion, fondateur de la société coopérative Carte blanche, qui nourrit un demi-millier d’élèves en bio, circuit-court et sans gaspillage, dans le Doubs.  

Sur l’optimisation, Daniel Gilbert rappelle par exemple que l’on jette environ 30 % d’un légume, à l’instar des fanes de carottes. Le repas de 2050 ne se veut pas forcément végétarien. La viande peut avoir sa place, mais elle doit être en quantité limitée et produite à proximité de chez soi et non pas à l’autre bout du monde. Les produits doivent être locaux et il faut « impliquer les gens de l’agriculture », en créant des liens avec des visites, des participations aux récoltes… Pour 2050, il évoque par exemple la création d’une coopérative agricole municipale. Avec toujours, en ligne de mire, un objectif : « Que ce soit bon au goût et pour être en bonne santé. »

« Le fait que l’on considère qu’acheter une voiture c’est la même chose que d’acheter de la nourriture, c’est n’importe quoi, dénonce Daniel Gilbert. Cela ne peut pas répondre aux mêmes règles. » L’association veut montrer le coût global, pour une société, d’un produit. « Pour la société, une carotte pas bio est beaucoup plus chère qu’une carotte bio », souligne-t-il. Ce n’est pas le cas dans les supermarchés. Et pourtant, en France, au moins 10 millions de personnes sont concernées par une eau du robinet dont la qualité n’est pas garantie, « du seul fait de cinq substance », rappelle Le Monde. Il veut ramener dans le débat public la question « des coûts complets ». Il espère que les productions de 2050 n’utiliseront pas « de pesticides ». « Nous avons des eaux de plus en plus chargées en pesticide, alors qu’il y a de moins en moins d’eau douce du fait du réchauffement climatique, s’alarme-t-il. Nous sommes dans une situation sanitairement intenable. »

Daniel Gilbert suggère de mieux payer les agriculteur et de les aider pour les pratiques durables : si on finance de la même manière les pratiques durables et les pratiques non durables, il n’y a aucun intérêt de le faire interpelle-t-il. Avec un message : la nourriture n’est pas une marchandise comme les autres. Et les agriculteurs ont un rôle essentiel, notamment dans la définition du paysage. « Il est important que les pays assurent leur propre sécurité alimentaire, mais il faut mieux s’occuper de ses agriculteurs et les inciter à faire plus d’effort pour la protection de l’environnement. » Autant de questions et de sujets qui se cachent sous l’assiette de ce diner comme en 2050.

Le repas est servi à l’aveugle et les gens sont installés en tablée, pour pouvoir discuter autour de ce qu’ils mangent. Une dizaine de plats seront servis, avec la boisson.

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