À l’initiative de trois infirmières, l’association hospitalière de Bourgogne-Franche-Comté a mis en place un groupe de parole destiné aux familles et aux proches des patients souffrant de troubles psychiques. Rencontre.
À l’initiative de trois infirmières, l’association hospitalière de Bourgogne-Franche-Comté a mis en place un groupe de parole destiné aux familles et aux proches des patients souffrant de troubles psychiques. Rencontre.
De lourdes portes viennent de se refermer devant vos yeux. Vous vous retrouvez seul. Derrière, un proche est hospitalisé dans une unité de soins psychiatriques sans consentement, comme l’unité Salvador-Dali, sur le site Messagier de Montbéliard, géré par l’association hospitalière de Bourgogne-Franche-Comté (AHBFC). Vous avez pu signer l’hospitalisation. Un sentiment de culpabilité vous envahit. Vous êtes en colère. Vous ressentez une profonde douleur. Ce sont des épisodes « violents », convient Annie, infirmière, au centre médico-psychologique de Montbéliard à la Petite-Hollande, géré aussi par l’AHBFC. « On n’est pas toujours prêt. »
Il existe déjà des programmes d’accompagnement des familles. Ils sont très construits. Très structurés détaille l’infirmière. « Mais on constatait que les familles qui arrivaient dans ces programmes psycho-éducatifs pouvaient avoir de la colère, de la douleur, observe celle qui accompagne déjà les familles avec d’autres dispositifs. Il fallait trouver un endroit pour décharger. » Pour décharger la colère. Pour décharger l’incompréhension.
En septembre 2021, trois infirmières de l’association ont donc développé le groupe de parole Proch’Parole, qui se réunit une fois par mois (lire à la fin de l’article). Il est destiné aux « familles de patients qui souffrent de troubles psychiatriques », résume Annie. « Cela répond à un besoin », estime l’infirmière. Le groupe de parole cherche aussi à « démystifier », replace Cécile, infirmière dans l’unité Salvador-Dali. Une image qui souffre des croyances populaires et parfois de l’écho médiatique des faits divers. « Il faut faire tomber les tabous », résume Pascale, également infirmière au CMP de Montbéliard. « Ce projet était une évidence », valide Françoise Morey, cadre de santé, qui confirme « l’enthousiasme » de la direction, quand il a été proposé par les trois infirmières. Le dispositif est ouvert à tous.
La famille, un allié thérapeutique
Il faut « rassurer sur ce qui est derrière la porte », insiste Cécile, avant de rappeler que « c’est du soin ». Le groupe de parole propose également un lieu pour échanger, car l’unité de soin n’est pas toujours l’endroit le plus propice. Ce lieu doit aider à comprendre et à accepter. Les temps de parole réunissent aussi au moins deux familles, afin de favoriser les échanges d’expérience et l’écoute entre pairs. Si besoin, Proch’Parole peut faire appel à des traducteurs.
« La famille est importante pour le patient. On aura une meilleure stabilité sur le long terme », rappelle Annie. « La famille est un allié thérapeutique, résume Cécile. C’est une sureté à la sortie. » Pascale d’embrayer : « Ce sont les familles qui connaissent le mieux les patients. » Elles peuvent aussi prévenir les rechutes. Elles sont un maillon essentiel et les soignants cherchent à créer « une alliance ». Ce groupe de parole doit y contribuer en facilitant les échanges.
Si les familles sont des atouts, elles peuvent aussi être fragilisées. Isolées. Les risques de dépression sont particulièrement élevés. « Elles sont centrées sur le proche et toute la dynamique de la cellule familiale est changée », observe Annie. « Les familles s’oublient », alertent les trois infirmières. « Il faut [donc] prendre soin des familles », insiste Pascale. Et ouvrir une porte sur les troubles psychiques, pour mieux les accompagner. C’est l’ambition de Proch’Parole.
Jeudi 28 juillet, prochaine séance, de 16 h à 18 h, centre médico-psychologique de Montbéliard, 9 avenue Léon-Blum. Tél. : 03 81 90 76 10