En 2024, le cancer du sein demeure le plus fréquent chez les femmes en France, avec environ 61 214 nouveaux cas diagnostiqués chaque année. Cela représente 33 % de l’ensemble des cas de cancers féminins. Bien que le taux de nouveaux cas de cancer du sein ait peu évolué ces dernières années, l’incidence globale du cancer continue de croître en raison de l’augmentation et du vieillissement de la population. Selon les données les plus récentes, environ 12 600 décès dus au cancer du sein sont enregistrés chaque année en France. « Cette pathologie, détectée à un stade précoce, peut cependant être guérie dans plus de 90 % des cas », indique le docteur Christine Devalland, anatomopathologiste à l’hôpital Nord-Franche-Comté. Au quotidien, elle étudie des prélèvements, notamment au microscope, pour diagnostiquer les cancers. Et a pour sous-spécialité le cancer du sein.
Aujourd’hui, le moyen le plus efficace du dépistage du cancer du sein est la mammographie. « Malgré l’efficacité de cette technique, les femmes se font de moins en moins dépistées », constatent le Dr Devalland et le Professeure Catherine Gay, aussi responsable de l’institut du sein à l’HNFC. Pour plusieurs raisons : des difficultés pour obtenir un rendez-vous, le caractère inconfortable – voire vraiment douloureux – de la technique, l’irradiation, ainsi que pour d’autres personnes, le manque de temps ou la volonté de ne pas savoir si elles sont malades. Et dans les pays en développement, cette méthode, onéreuse, ne peut être envisagée pour un dépistage en masse.
Trouver des alternatives
« Il fallait que l’on trouve des alternatives pour que les femmes adhèrent », narre Christine Devalland. Mais aussi trouver un dispositif qui puisse s’adresser aux femmes en dehors des âges de dépistage, de 50 à 74 ans. « Beaucoup de femmes en développent après 74 ans. »
L’hôpital nord Franche-Comté s’est associé au laboratoire Femto-ST pour associer intelligence artificielle et médecine sur cette question. C’est ainsi que le projet d’un soutien-gorge connecté a émergé. Avant les essais, l’hôpital a fait appel à des psychologues, des philosophes ou des anthropologues, des sociologues pour travailler sur le projet et mener des enquêtes sur l’adhésion. « Elle a été assez forte », racontent les spécialistes.
Un premier modèle, issu d’un projet franco-suisse, avait été développé en 2019. La collaboration a pris fin après le Covid. L’hôpital nord Franche-Comté, avec l’aide de Sup Microtech, a lancé un nouveau projet, le « Bra Connect » avec un prototype muni de capteurs thermiques, en 2022. On sait qu’une tumeur peut avoir une variation de température de 0 à 8 °C, liée à une inflammation. Le capteur thermique cherche à cibler ces données. « Les signaux seront traités par des approches d’intelligence artificielle », poursuit le médecin.
Un procédé breveté
Aujourd’hui, le modèle est proche, en termes de fiabilité, de la palpation que peut effectuer un expert. Les essais cliniques sont en cours, et l’hôpital recherche encore quelques patientes, atteintes ou non de cancer, qui peuvent se signaler dans les quinze prochains jours à l’hôpital (jusqu’au 15 novembre, environ). 70 patientes témoins sont déjà dans l’essai clinique.
Comment se déroule l’essai clinique ? Les femmes portent le soutien-gorge pendant trente minutes, toujours dans une même salle pour éviter les variations de température. Les données sont transférées au chercheur, pour faire avancer l’algorithme. Pour le moment, la sensibilité du soutien-gorge connecté est de 66%.Les essais devraient se terminer en 2025.
Un brevet a été déposé pour protéger le projet. Le but est qu’il soit adopté, par la suite, par une start-up pour le développer. Et un futur projet est déjà en réflexion : un soutien-gorge avec des capteurs « en densité ». « Ce sera quelque chose qui se rapprochera de l’échographie », explique le Dr Devalland.