Quatre ans de prison, dont deux avec sursis, ont été requis mercredi devant le tribunal correctionnel de Besançon à l’encontre d’un professeur de théâtre renommé, poursuivi pour agressions, harcèlement et chantage sexuel sur dix anciens étudiantes et étudiant qu’il faisait répéter nus.
(AFP)
Quatre ans de prison, dont deux avec sursis, ont été requis mercredi devant le tribunal correctionnel de Besançon à l’encontre d’un professeur de théâtre renommé, poursuivi pour agressions, harcèlement et chantage sexuel sur dix anciens étudiantes et étudiant qu’il faisait répéter nus.
Le procureur de la République, Étienne Manteaux, a également requis une interdiction d’enseigner et une obligation de soins à l’encontre de Guillaume Dujardin, 50 ans, professeur à l’Université de Franche-Comté et créateur du Festival de Caves, poursuivis pour des faits commis entre 2014 et 2017. Le tribunal rendra sa décision le 21 octobre. Le procureur a souligné “l’emprise redoutable” du prévenu sur ses victimes, “passionnées de théâtre”, et ses “méthodes de gourou” qui “s’immiscent dans leur vie privée et connait leurs failles pour prendre le pouvoir”.
Neuf anciennes étudiantes et un ancien étudiant du DEUST de théâtre à Besançon se sont portés partie civile. “Cette emprise avait pour finalité d’assouvir ses fantasmes : obtenir qu’elles se masturbent devant lui, simulent des viols ou encore se laissent photographier nues”, a poursuivi le procureur. Jeunes femmes au sortir de l’enfance, elles trouvaient en “tonton Duj” une “figure paternel”, un “mentor théâtral” qui leur intimait progressivement de “se lâcher”, de se “salir”, voire de se “déglinguer”. Il proposait à certains de “travailler” seuls ou en petits groupes en dehors des heures de cours et leurs faisait répéter des scènes nus. Il leur demandait de “s’embrasser”, de “se goûter”, de “se toucher les parties intimes”, ont témoigné les étudiants devant le tribunal. “Je suis le « matteur » en scène”, disait-il à ses élèves.
"Brisées"
“Pour moi, c’était un jeu d’acteur”, a affirmé Guillaume Dujardin, ne “comprenant fondamentalement pas” l’effet qu’il avait produit : “j’ai fait une erreur fondamentale dans cette histoire, c’est de penser que je parlais à des amis”. “Le théâtre marchait avec les limites, toujours avec l’accord de l’acteur”, assure M. Dujardin, “la limite du sexuel, c’était mon sujet de travail et c’était ma manière de travailler de les faire se confronter à la réalité de l’art”. “On se sert de l’alibi théâtre”, a fustigé leur avocate, Me Anne Lassalle. “Le non n’était pas facile, c’était mon professeur, mon directeur de promotion, ce n’était pas n’importe qui”, a expliqué une jeune femme en pleurant, disant avoir cédé par “usure” à “une insistance permanente”.
“Brisées”, ces étudiantes devenues “femmes-objets” ont témoigné du “dégoût d’elles-mêmes” issu de ces séances et de ces relations. L’une d’elles, devenu anorexique, puis boulimique, a fait “quatre tentatives de suicides” et “a même pensé à se prostituer, tellement son corps était devenu un déchet”, a rappelé Me Lassalle. L’avocat du prévenu, Me Mikaël Le Denmat, a quant à lui plaidé la relaxe, estimant que M. Dujardin n’avait “pas imposé de jouer nu à ses élèves” et qu’il “n’y a pas d’absence de consentement” sur les dossiers d’agressions sexuelles.