« La Ligue des Droits de l’Homme a été créée, il y a plus de cent ans, au moment de l’affaire Dreyfus. Et, cela, pour faire valoir les droits du capitaine et mettre au jour cette terrible injustice de sa condamnation », rappelle Évelyne Petit, coprésidente de la LDH 90 (lire notre article), alors que l’association a organisé, ce jeudi 4 décembre, son assemblée générale. Hier comme aujourd’hui, la Ligue des Droits de l’Homme a pour rôle de garantir les droits des hommes et des femmes.
Au sein de sa permanence à Belfort, la LDH accueille les personnes se sentant bafouées dans leurs droits. Après un temps d’écoute, la personne est accompagnée dans ses démarches. « À la permanence, les personnes ont une formation juridique. Ils les aident à préparer des requêtes, rediscuter avec l’assistante sociale, la préfecture pour obtenir gain de cause », énumère Évelyne Petit. L’antenne locale organise aussi des actions pour sensibiliser les plus jeunes. C’est notamment le cas avec le concours annuel d’écriture. Cette année, l’association a pu compter sur 70 adhérents.
« En deux ans, on a doublé le nombre d'accueils »
« Notre grosse inquiétude, c’est la permanence. En deux ans, on a doublé le nombre d’accueils », déplore la coprésidente. Elle l’observe au quotidien: il y a de plus en plus de personnes qui sont désespérées, car elles n’obtiennent plus de réponses favorables. Elle cite l’exemple des délais de dépôt de dossier toujours variables, les dossiers qui ne sont jamais considérés comme complets, voire l’absence de réponse. « C’est terrible parce que les gens se retrouvent seuls avec une obligation de quitter le territoire (OQTF) alors qu’il peut y avoir des enfants français, des enfants scolarisés, une femme française », regrette-t-elle (lire notre article). Pour faire face à cette demande grandissante, la Ligue des Droits de l’Homme est à la recherche de bénévoles. À la fois pour cette aide administrative, mais aussi pour donner des cours de français. Des cours essentiels pour préparer les tests de français, afin d’obtenir la naturalisation.
Concernant l’emprisonnement du journaliste français Christophe Gleizes en Algérie, la coprésidente est catégorique : c’est une atteinte à la liberté d’expression. « C’est un journaliste qui fait son travail avec rigueur et est enfermé dans un pays, où, effectivement, la liberté de la presse n’est pas reconnue », déplore-t-elle. Ce mercredi, le journaliste sportif, travaillant notamment avec So Foot, a vu sa peine d’emprisonnement confirmée par la cour d’appel de Tizi Ouzou. Venu en Algérie pour un article sur le club de football local, Christophe Gleizes a été condamné à sept ans de prison pour apologie du terrorisme.
Une inquiétude : la montée de l'extrême-droite
« Elle ressort de sa tanière, la nazi-nostalgie », chante Évelyne Petit en reprenant la chanson Anne, ma sœur Anne de Louis Chedid. La coprésidente reprend ces paroles datant de 1985 en réponse à la montée de l’extrême-droite en France et dans le Territoire de Belfort. Elle dénonce l’utilisation de l’immigration comme raison des malheurs dans le monde. « C’est un bouc émissaire qui sert à ne pas voir les autres problèmes », s’agace-t-elle.
Évelyne Petit rapporte également des faits s’étant déroulés le samedi 29 novembre, lors de la manifestation contre les violences faites aux femmes à Belfort. « Nous avons été interpellés par quatre personnes appartenant à l’association d’extrême-droite Némésis », déplore la coprésidente. « Les personnes ont rappelé que les violeurs français étaient en prison et que les voleurs migrants n’étaient pas en prison. Mais c’est une hérésie », ajoute Évelyne Petit. Elle le rappelle, un des combats de la Ligue des Droits de l’Homme est le manque de condamnation des viols.
« Une partie des gens qui votent à l’extrême droite se laisse berner par un discours facile avec des idées qui sont réductrices », développe Évelyne Petit. L’une des inquiétudes de la LDH est justement cette montée des idées d’extrême-droite.
Un rôle de plus en plus compliqué à jouer
Évelyne Petit le déplore: le rôle de la LDH est essentiel, mais est de plus en plus entravé. Elle se remémore les manifestations de Sainte-Soline contre la construction de mégabassines de mars 2023. Des affrontements violents avaient eu lieu entre militants et la gendarmerie. Certains membres de la Ligue des Droits de l’Homme étaient présents comme observateurs. « Ils ont été pourchassés par la police et Gérald Darmanin, à l’époque ministre de l’Intérieur, les a traités de terroristes ».
Dans le Territoire de Belfort, Évelyne Petit l’assure, les relations entre la police nationale et la Ligue des Droits de l’Homme sont cordiales. Mais elle souligne que ce n’est pas le cas dans tous les territoires. Elle cite en exemple les grandes villes : « La Ligue des Droits de l’homme est là pour rappeler qu’on ne peut pas harceler les jeunes, on ne peut pas faire des délits factieux ». Présente depuis plus de cent ans, la Ligue des Droits de l’Homme compte bien ne pas arrêter son travail de si tôt.
Un concours national « Écritures pour la fraternité »
Comme tous les ans, la Ligue des Droits de l’Homme organise un concours d’écriture destiné aux enfants. L’année dernière, 160 enfants du Territoire de Belfort ont proposé leurs écrits sur le thème : les frontières. Est-ce que les frontières nous séparent, nous rassemblent, à quoi servent les frontières ? : autant de questions sur lesquelles les jeunes devaient plancher. « Il y avait un poème écrit par une petite fille ukrainienne. Elle raconte comment sa vie a changé et qu’aujourd’hui elle a une vie normale en France », décrit Évelyne Petit. Le sujet de cette année, lancée il y à deux semaines : faire vivre la démocratie à l’école et dans les lieux d’éducation populaire. « Les lauréats sont invités à Paris et récompensés par des prix nationaux et locaux », explique Évelyne Petit.
