Le colonel Philippe Pautigny, directeur du service départemental d’incendie et de secours du Territoire de Belfort (Sdis 90) depuis le 1er janvier 2021, s’apprête à quitter ses fonctions, d’ici le mois de mai. Il a été sélectionné pour rejoindre l’Administration centrale de l’État, où il intégrera la direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crise, dans le cadre d’une mise à disposition. Il exercera un rôle de responsable au niveau national sur des thématiques de prévention et de réglementation des risques incendies.
« C’est une promotion intéressante pour moi », raconte le colonel Philippe Pautigny. « Une belle reconnaissance », poursuit-il, après une carrière débutée en 1986 comme pompier volontaire. Titulaire d’un diplôme d’ingénieur en sciences et technologie à l’école polytechnique universitaire de l’université Paris-VI, il s’est engagé, un an, à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Puis, il a sillonné la France pour occuper des postes en Seine-et-Marne ou encore en Ille-et-Vilaine, à Rennes. Avant de devenir directeur du Sdis du Territoire de Belfort, il a travaillé à Bordeaux, où il était chef du pôle de planification sécurité civile et formation à la zone de défense et de sécurité Sud-Ouest.
Qu’est-ce qu’il retient de ses cinq années passées dans le Territoire de Belfort ? Son arrivée lors du Covid, où le Sdis a dû répondre rapidement à des enjeux majeurs, notamment la mise en place de centres de vaccination, « pour traverser la pandémie ». Il se souvient de la distinction préfectorale, dédiée à l’ensemble du corps, obtenue pour avoir été réactif lors de cette période.
Il note, en 2022, « la soif de changement des équipes », qui a débouché à un ajustement de l’organigramme pour ramener « une bonne dynamique ». Ce fut aussi, cette année-là, l’année de l’inspection de la direction générale sur les états du Sdis, qui a permis d’établir une soixantaine de préconisations pour moderniser le service départemental d’incendie et de secours.
En 2023, puis 2024, il s’est concentré sur le pilotage local du plan Cap 2024-2028, qui vise à anticiper les risques émergents tels que les feux de forêt, les risques climatiques et ceux liés à l’hydrogène (lire notre article). Il a aussi mis l’accent sur le volontariat et sur la mutualisation avec les départements voisins pour améliorer l’efficacité des interventions. Des enjeux qui lui tiennent à coeur. « L’un des objectifs était aussi de retrouver une administration forte », rappelle-t-il. Cela s’actera, en 2025, par l’embauche de deux capitaines supplémentaires, un lieutenant et un juriste. « De nouvelles compétences pour le Sdis », félicite-t-il.
Son mandat a toutefois été marqué par des tensions sociales, notamment en novembre 2022, lorsque les pompiers ont entamé une grève touchant à la fois les officiers et les hommes du rang. Bien que la grève ait été déclenchée pour protester contre l’application de la loi de transformation de la fonction publique (lire notre article), elle a été prolongée en raison du « mal-être » des pompiers vis-à-vis de la communication avec la direction. Ce conflit a perduré jusqu’en octobre 2023, quand les pompiers ont décidé de sortir de la grève, mais en exigeant la reconnaissance de leur malaise interne à travers un protocole. Le colonel Philippe Pautigny a évoqué spontanément cette période, qui a été « un moment difficile à passer », liée à la loi des 1 607 heures. « Cela aurait dû être fait en 2019. L’année 2022 était la dernière pour faire passer cette loi », rappelle-t-il.
En juin 2024, une plainte pour des faits pouvant revêtir la qualification de harcèlement moral a également été déposée contre la direction du Sdis (lire notre enquête). L’affaire a été dépaysée et a été confiée au parquet de Montbéliard. Une enquête a alors été ouverte.
Malgré ces tensions, le président du conseil d’administration du Sdis, Florian Bouquet, a salué son engagement. Dans une lettre que Le Trois a pu consulter, celui qui est également président du Département félicite le colonel Pautigny pour son travail et souligne la confiance qu’il lui a toujours accordée. « Tout au long de son engagement, notamment lors de périodes sociales délicates, j’ai toujours accordé ma pleine confiance à cet officier supérieur méritant », écrit-il. Il ajoute que le directeur partant reste rattaché à l’effectif du Sdis 90 et pourra, s’il le souhaite, y réintégrer un poste à l’avenir. « Ce sera avec grand plaisir que nous l’accueillerons à nouveau », poursuit-il. Dès le départ de Philippe Pautigny en mai, l’intérim sera assuré par le colonel Stéphane Berrez, actuellement directeur départemental adjoint du Sdis 90.