Le président du conseil départemental du Territoire de Belfort a listé 20 propositions de transferts de compétences de l’État vers le Département.
Le président du conseil départemental du Territoire de Belfort a listé 20 propositions de transferts de compétences de l’État vers le Département pour accompagner la décentralisation et renforcer le rôle des Départements. Il a mis en garde face au mépris et a invité l’État à écouter les élus locaux qui sentent « la grogne ».
Florian Bouquet, président du conseil départemental du Territoire de Belfort, en a fait un instant solennel. Il a convoqué sa majorité. Mais aussi les directeurs de service. Le ban et l’arrière-ban. Son allocution, il l’a prononcée six mois après “l’appel de Marseille”. Cet appel formulé par des élus locaux qui demandaient un troisième acte de la décentralisation, depuis la ville de Gaston Defferre, celui qui a lancé les premières lois de décentralisation en 1982.
Le président trouve-t-il que le costume que l’on taille aux Départements est dorénavant trop étriqué? Au regard de l’événement qu’il a créé pour mettre en scène ses propositions, pourquoi pas. Il est certain que la loi NOTRe n’a pas renforcé le rôle de la collectivité en supprimant la clause de compétences générales. Les Départements ne peuvent plus intervenir en matière économique et ils ont dû abandonner leurs actions détenues dans les sociétés d’économie mixtes. Le doute est permis également lorsque, au milieu des propositions, Florian Bouquet glisse des piques à peine voilées à l’encontre du conseil régional, sur les des transports scolaires en particulier. Quoi qu’il en soit, il avait des propositions (lire par ailleurs) à formuler pour doter les Départements « de missions élargies ».
Pas une déclaration de guerre
Aujourd’hui, si le conseil départemental est reconnu comme le chef de file de l’action sociale, Florian Bouquet regrette de distribuer le RSA, mais de ne pas pouvoir agir sur l’emploi. Il regrette aussi le contexte financier. « Les collectivités sont serrées par la baisse de la dotation générale de fonctionnement (DGF), rappelle-t-il. Mais plus récemment, on a créé un nouveau mécanisme pour contenir nos dépenses de fonctionnement. » L’augmentation de ces dépenses ne doit pas dépasser 1,2 %, « alors que les charges s’accroissent », alerte le président, abordant la problématique de l’accueil des mineurs isolés.
Il ne faut pas voir dans cet inventaire à la Prévert « une déclaration de guerre », dixit Florian Bouquet. Ces propositions ne viseraient qu’à répondre « rapidement » et de manière « optimale » aux citoyens. « Ce que nous souhaitons, ce n’est pas une guerre de tranchées, mais un pacte de confiance », insiste-t-il, appelant à plus « de liberté et plus d’autonomie ». Le contexte social et la grogne des Gilets jaunes ne peuvent que lui servir d’arguments. Et il ne se prive pas d’y faire référence.
Des propositions à l'échelle du Territoire
« Notre petit département a la capacité à innover », répète plusieurs fois le président. Il invite par exemple à accueillir les 13 gestionnaires de collèges comme agents du Département, alors qu’ils sont attachés à l’Éducation nationale. Une hérésie pour l’élu, alors qu’ils gèrent de l’argent du Département. Il demande aussi à gérer le bâti des sept lycées du Territoire de Belfort. « Cela pourrait apporter de la mutualisation et une puissance plus forte au Département. » Il demande d’intégrer la médecine scolaire aux compétences du Département ou de lui transférer la compétence pour donner les agréments aux centres de loisirs avec ou sans hébergement, comme il le fait déjà pour les assistants maternels. Il propose à l’État de prendre en charge la période permettant de vérifier l’âge d’un mineur isolé étranger. Aujourd’hui, cette période, souvent longue, est à la charge des Départements. Avec l’accroissement des demandes, la charge est importante.
Dans l’aménagement, il invite à récupérer en voirie départementale (547 kilomètres dans le Territoire), le tronçon de 21 km de la R.N. 1019. Il propose de doter le conseil départemental des compétences de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations. « Les intercommunalités se tournent vers le Département, car nous avons les effectifs et la matière grise pour gérer », détaille-t-il.
Du côté de la solidarité entre communes, le président propose de doter les Départements d’une compétence d’ingénierie publiques pour simplifier les relations contractuelles. « Aujourd’hui, on le fait, mais sans cadre légal. On n’est quand même pas des hors-la-loi », déplore Florian Bouquet.
Transferts de charges… et des ressources
Pour financer toutes ces propositions, Florian Bouquet se repose sur la constitution et l’article 72-2 : « Tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. » Le Département semble protégé. Mais le président n’est pas dupe des risques. Notamment de la prise en compte des dépenses dynamiques dans le transfert des ressources.
Lui a formulé les propositions. Pour le reste, « je laisse le soin aux législateurs de construire un projet ». Une motion sera présentée en séance plénière du conseil départemental le 16 mai. « Cela peut encore être amendé et débattu », acquiesce le président. Elle formalisera les propositions. La question est de connaître l’écho de ces propositions.
Les 20 propositions du Département
Éducation
> Transfert au Département des gestionnaires des collèges
> Transfert de la gestion des lycées au département
> Transfert au Département de la médecine scolaire.
Enfance, mineurs non accompagnés (MNA)
> Recentralisation vers l’État de la prise en charge de l’évaluation des mineurs non accompagnés (MNA)
> Le Département pourrait donner son agrément pour les centres de loisirs avec et sans hébergement
Insertion et emploi
>Favoriser le lien entre les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et les besoins des entreprises.
> Permettre au Département d’agir sur l’emploi plutôt que de le cantonner au financement du RSA
> Systématiser la contractualisation avec les bénéficiaires du RSA
> La formation ne concernerait que les bénéficiaires du RSA
Action sociale générale
> Sanctuariser le positionnement des départements en tant que chef de file “Action sociale”
> Création expérimentale d’une agence départementale des solidarités.
Réseau routier
> Transfert au département du réseau routier national (RN 1019)
> Laisser au Département le choix des tronçons pour apprécier les 80 km/h.
Milieux aquatiques et protection contre les inondations
> Transfert de la police de l’eau au Département
> Retrouver la compétence intégrale sur les deux volets de Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi)
Agriculture
> Intervenir sur tous les champs de l’agriculture, au côté de la Chambre d’Agriculture, en conformité avec les règlements européens, sans devoir conventionner avec la Région
Développement économique
> Permettre au Département de poursuivre la gestion de ses concessions
Tourisme
> Permettre au département d’intervenir globalement : en soutien de l’initiative locale (publique et privée) ; en opérateur, aménageur ou concédant de projets d’aménagement touristique.
Aides aux communes
> Faire de l’ingénierie publique une compétence à part entière du Département et simplifier les relations contractuelles avec les communes sans cadre contraint.
Vie associative
> Transfert de la gestion du fonds pour le développement de la vie associative (FDVA).