« Si nous sommes là, c’est pour vous parler de l’érosion de nos emplois… », commentent ensemble les membres de la CGT de Stellantis Sochaux-Belchamp. Premier paramètre qui inquiète le syndicat : « aucune annonce », « aucune information » sur la sous-traitance ou sur les marchés à discuter dans l’année, note Aurore Boussard, déléguée syndicale pour Sochaux. De plus en plus de chantiers sont réinternalisés, ce qui a des conséquences sur la sous-traitance. Le transport de véhicule neuf ? Réinternalisé. La fabrication de pièces plastiques non peintes ? Réinternalisée à Rennes. En discussion ici (lire notre article). « Les sous-traitants sont inquiets. À Trecia (fabrication de panneaux de portes à Étupes, sous-traitant de Stellantis), ils n’ont plus de projet sur le moyen terme », continue Aurore Boussard.
Quant à l’emploi interne, il n’est pas meilleur, commente le syndicat. Damien Geoffroy, délégué syndical à Belchamp, remarque que chaque année, l’effectif est un peu plus bas sur l’activité de recherche et développement (R&D). « Nous étions 871 personnes au 31 mai 2024, 939 en 2023, 1 028 en 2022 et 1 189 en 2017 », liste-t-il. « Et dans ces chiffres, il faut compter les congés sénior. » Il déplore une activité de R&D en berne. « Cette année, nous avons arrêté l’activité des bancs moteurs. Il n’en reste plus qu’un. C’était pourtant l’une de nos activités historiques. » Il précise que cette activité a été transférée au Maroc et en Italie. « Il n’y a plus de projet non plus sur la mise au point moteur », poursuit-il.
L’électrique comme « alibi »
Pour les délégués syndicaux, l’électrique a fait beaucoup de mal aux effectifs. « Il y a eu peu d’intégration, les gens ont été mal formés sur les nouvelles technologies électriques et sont repartis dégoûtés », commente Damien Geoffroy.
Aujourd’hui, Sochaux sort environ 60 véhicules à l’heure, selon le syndicat. « Les commandes sont bonnes…mais il y a besoin de moins en moins de salariés pour l’électrique. » Pour Damien Geoffroy, l’électrique a aussi des conséquences sur l’activité de R&D. « Tout est abouti en R&D sur le moteur thermique. En sachant que chez nous, nous avons avancé de cinq ans la fin du thermique… » Finalement, les délégués syndicaux voient ce passage anticipé à l’électrique comme un « alibi pour réduire les effectifs et reproduire dans les pays à bas coût. »
Ils relatent des mails les incitant régulièrement à quitter l’entreprise. Et la mise en place de webinaires, pour rencontrer des entreprises extérieures. Une manière de motiver les salariés à partir volontairement qui met en rogne les délégués syndicaux. « Beaucoup, usés, finissent par partir sans projet professionnel. »
L’effectif total de Stellantis dans le pays de Montbéliard, fin juin 2024, est de 5 443 personnes. Auquel il faut enlever 216 congés séniors, et 167 congés mobilité, toujours selon la CGT. En tout, 5 060 personnes travaillent sur site. Le 4 novembre, une salve d’intérimaires arrivera pour monter une demi équipe de nuit (lire ici). 450 postes sont voulus, dont 70% d’intérimaires. Mais cela ne convainc pas le syndicat.
Leur demande ? De l’embauche. « Il n’est pas normal que nous ayons 1 000 intérimaires mais pas d’embauche. Tout cela a un effet domino sur le reste. Moins il y a d’emplois, moins on fait fonctionner dans le pays de Montbéliard l’éducation, l’immobilier, la sous-traitance… » Depuis plusieurs années, ils réclament aussi un 32h pour « que tout le monde puisse travailler ». Et des salaires plus hauts. Ils appellent à manifester le 1er octobre pour une hausse des salaires et la suppression de la réforme des retraites.
Sollicitée, la direction n’a pas encore réagi.