Microsoft a mené une expérience avec l’usine Stellantis de Sochaux. Neuf salariés ont été formés, en quelques heures, à développer des applications pour smartphones. Ils ont créé des outils numériques facilitant leurs tâches quotidiennes.
Microsoft a mené une expérience avec l’usine Stellantis de Sochaux. Neuf salariés ont été formés, en quelques heures, à développer des applications pour smartphones. Ils ont créé des outils numériques facilitant leurs tâches quotidiennes.
« On trouve régulièrement des chauffeurs perdus dans l’usine, qui ne parlent pas forcément anglais ou français », remarque Sébastien Delgado, moniteur de quai logistique, au ferrage, à l’usine Stellantis de Sochaux ; il gère une équipe de onze personnes. Cet opérateur participe à une expérience menée avec Microsoft, le conduisant à développer une application pour smartphone. Pourtant, il n’est pas développeur, encore moins programmeur. Juste intéressé par l’univers informatique, mais ce n’est même pas un prérequis ! Ils étaient neuf à participer à cette expérience, sur la base du volontariat. Certains étaient chef moniteur, d’autres techniciens, chefs d’équipe, cadres ou alternants. Les profils étaient divers.
Ces chauffeurs qui s’égarent, ce sont des soucis pour les équipes de logistique qui attendent les pièces. Et parfois un casse-tête pour le salarié croisé par hasard par ledit chauffeur et qui doit l’orienter. Ces conducteurs perdus ne sont pas un épiphénomène. Le site accueille 250 poids lourds chaque jour qui livrent les pièces du montage, sans compter ceux intervenant sur des chantiers ou les livraisons ponctuelles.
Applis opérationnelles
Sébastien Delgado a donc conçu une application facilitant leur orientation. Elle est partie du terrain. D’un constat. Il a développé l’outil à partir de Power Plateform de Microsoft. L’outil de conception est utilisable depuis Teams, une plateforme bien connue depuis la crise sanitaire ; elle est notamment utilisée pour les visio-conférences.
Son application répertorie les 19 quais de déchargement du site, encore étendu sur 200 ha et qui compte 30 km de voirie. En cliquant sur chaque quai, l’application dévoile les coordonnées GPS, que l’on peut rentrer dans son GPS. Mais l’appli génère aussi un QR code que l’on peut simplement flasher. S’ouvre alors le système de guidage de votre smartphone pour vous amener au bon quai. « Si tout le monde charge cette application sur le site, on pourrait aider les chauffeurs », estime le jeune homme. Un autre de relever : « Il faudrait la transmettre aux agents de sécurité à l’entrée. »
L’appli a été conçue après quelques heures de formation et quelques heures de développement. Au cours de l’expérience, une vingtaine d’applications a été développée par les neuf premiers salariés formés. Elles sont développées à partir d’un système dit low code. Le logiciel propose déjà un environnement et une interface, ne nécessitant pas une programmation informatique traditionnelle à coder à la main.
Sébastien Delgado a déployé deux autres applications. La première remplace son pupitre-moniteur. Il y note les missions, le placement des opérateurs, les problèmes, les consignes… Elle remplace le papier qui s’entassait sur le bureau et s’embarque surtout dans la poche. La dernière applis répertorie les risques identifiés (flaque d’huile, palette mal placée, barrière de sécurité absente…). Lorsque l’on observe un risque, on le photographie, on propose l’action et on suit l’avancée de la réparation. « C’est un gain de temps, confie Sébastien Delgado. Avant, quand je constatais un risque, je devais faire une photo, trouver un ordinateur, m’y rendre, retrouver le bon formulaire… »
Certains salariés ont déployé des applis gérant le flux des stocks, d’autres la gestion des anomalies. On pourrait facilement envisager une automatisation du traitement de documents, comme des factures ou des bons de commande cite l’équipe de Microsoft venue faire une démonstration des potentialités sur le site de Sochaux, ce mardi. « L’expérience a été lancée il y a 3 mois », détaille Inès Boussemart, custumer success manager, chez Microsoft ; elle s’occupe du suivi du développement chez les clients.
500 millions de nouvelles applications d’ici 5 ans
Ces idées ont émergé du terrain ; c’était la volonté de la direction. Elles répondent à une problématique. « On cherche des applications avec des intérêts opérationnels », explique Cyril Boucherie, responsable du système de production et de la transformation digitale de l’usine, pour justifier cette méthode. « On ouvre aux collaborateurs, quel que soit leur métier, la possibilité de faire une application », apprécie Amélie Lair, chef de produit Power Platform, chez Microsoft. Cette expérience s’inscrit évidemment dans la perspective de Sochaux 2022 (retrouvez notre article). Elle marque aussi une volonté de transformation digitale du site. « On veut tendre vers le 0 papier », confie Cyril Boucherie
Aujourd’hui, on est dans une période de foisonnement d’idées. « On ne bride pas », assure le responsable. D’autres personnes seront formées. Lorsque l’on aura trop d’idées, une gouvernance sera mise en place, pour sélectionner les pistes, valider les choix ou éviter les doublons, comme le fait déjà Toyota ou la SNCF. La réalisation par un pair d’un outil facilite aussi son acceptation par l’ensemble de l’équipe.
On estime que 500 millions de nouvelles applications seront créées d’ici 5 ans, précise Inès Boussemart. C’est plus qu’au cours des 40 dernières années. 70 % de ces applications seront justement des applications de type low code. Comme celles développées par les volontaires de l’usine Stellantis. « Il y a une accélération », estime Amélie Lair. Qui corrige. « C’est une révolution. »