« Jusqu’ici, le rôle des CCI était surtout d’accompagner les entreprises sur leur problématique d’approvisionnement », raconte Thierry Buatois, président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Bourgogne-Franche-Comté. La donne a changé. Avec le Covid, il y a eu « de la stupeur » face aux ruptures d’approvisionnements qui sont devenues bloquantes pour les entreprises françaises. Relocaliser, réindustrialiser, ces termes sont réapparus en force en tirant des enseignements de cette crise, suivis par la guerre en Ukraine et une mise en lumière accrue de la crise climatique.
Aujourd’hui, quatre CCI régionales s’inscrivent dans un projet « coup d’essai » intitulé « accélérateur relocalisation ». Leurs rôles changent. Elles se portent garantes pour trouver des solutions pour relocaliser les productions. La CCI de Bourgogne-Franche-Comté est l’une des quatre régions porteuses avec les Hauts-de-France, l’Île-de-France et la Normandie. Depuis la rentrée, les étudiants de l’Esta et de l’université technologique de Belfort-Montbéliard (UTBM) ont lancé les travaux préparatoires en concevant des études de marché. Les chambres, elles, se sont lancées sur l’identification de partenaires capables de recomposer la chaîne d’approvisionnement au niveau local pour concrétiser les projets.
Une dizaine de projets ont été retenus pour intégrer l’accélérateur. On retrouve par exemple l’entreprise Aeris Greenwich, qui souhaite créer une fonderie de précision, Eurosit, qui voudrait relocaliser sa fabrication de chaises de bureau, Parco, qui réfléchit à une stratégie de distribution pour son vélo électrique ou encore Nidec qui souhaite rendre plus compétitives ses activités d’usinage et de bobinage de moteurs en France. L’idée est de relocaliser des pièces stratégiques : pièces d’usinages, pièces pour les centrales hydrauliques, des captures, de la cobotique…
Les 7 et 8 décembre, les différents acteurs impliqués se réuniront sur ces projets à la CCI de Belfort pour travailler sous forme d’ateliers intensifs, qui se concluront par une présentation des projets et une remise de prix par les partenaires de l’opération. Des conférences seront aussi organisées sur le sujet. Par la suite, les porteurs seront accompagnés par des « coachs » de la CCI pour étoffer le projet et évaluer les investissements et dispositifs de financement.
Une première pierre
Cette première pierre doit inspirer pour les années à venir. Car aujourd’hui, les difficultés sont encore nombreuses. « Avant, la production n’était pas considérée comme de la valeur ajoutée », rappelle Eric Oternaud, conseiller régional délégué en charge notamment de la conversion écologique de l’économie. « Alors aujourd’hui, les envies de relocalisation se confrontent à des difficultés nombreuses : notamment la perte des savoir-faire ou encore le manque de machines performantes. »
Cela ne décourage pas les différents acteurs porteurs de l’opération pour autant. Pour Carine Guillaud, qui est à la tête du site « Relocalisations. fr », repenser la production est une nécessité absolue, autant pour les entreprises que pour l’environnement. « Il faut reconstruire une industrie qui n’est pas celle d’hier. Et redonner aux entreprises l’envie de travailler et produire en France ».
Certains montrent déjà la voie. Comme Julien Morel, dirigeant de MS-innov, société productrice de robots collaboratifs qui porte l’un des projets sélectionnés. Avec 40% de composants français et 80% de composants européens, l’entreprise cherche à s’implanter encore plus localement avec pour objectif en 2024 des composants 100% européens et à 50% français. Le pari est lancé avec cette opération.