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GE : 307 emplois sauvegardés et un projet industriel en discussion

Après 5 mois de lutte, la CFE-CGC et Sud Industrie entrent en négociation avec la direction sur la restructuration de l’entité turbines à gaz de General Electric. Une négociation qui démarre sur un autre projet, préservant 307 postes par rapport au projet initial.

Après 5 mois de lutte, la CFE-CGC et Sud Industrie entrent en négociations avec la direction sur la restructuration de l’entité turbines à gaz de General Electric. Une négociation qui démarre sur un autre projet, préservant 307 postes par rapport au projet initial. La CGT entame aussi une négociation avec la direction. Sur le volet de la réduction des coûts. Elle ne signe pas, par contre, les accords de méthode.

« Merci pour ce que vous avez fait », glisse délicatement une salariée de l’entité turbine à gaz de General Electric, à Francis Fontana, élu syndical de Sud Industrie. Il est 11 h 20, ce lundi matin. Devant le bâtiment Te 05, avenue du Maréchal-Juin, les représentants des syndicats Sud Industrie et CFE-CGC s’expriment face caméras après l’assemblée générale organisée dans les locaux du bâtiment.

Près de 500 personnes viennent de s’exprimer à main levée sur la nouvelle proposition de la direction, obtenue de haute lutte, la semaine dernière, sous le patronage du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. La question était simple : les syndicats entrent-ils en négociations sur ces nouvelles bases ? Ou la direction dépose-t-elle le plan initial aux services de l’État ce lundi soir. « Une très grande majorité » des personnes présentes approuve l’entrée en négociation. À l’occasion de cette assemblée générale, la CGT n’est pas visible.

Les négociations commencent

Indirectement, les salariés ont approuvé un plan de restructuration de 485 départs. Ils ont aussi approuvé un plan qui maintient 307 emplois par rapport au projet initial, qui prévoyait 792 suppressions de postes dans l’entité turbines à gaz. Et les deux syndicats signataires, Sud Industrie et la CFE-CGC, sont confiants pour que cela ne se transforme pas, fin 2020, en un plan de départs contraints. « Évidemment, nous perdons quelque chose », acquiesce Francis Fontana, en s’adressant aux salariés. Il a choisi de voir le verre à moitié plein. Dès le départ, l’intersyndicale en était consciente. Mais elle a réussi à établir un rapport de force permettant de limiter la casse et surtout de construire un projet autour du 50 Hz (lire plus bas).

Les représentants syndicaux entrent aujourd’hui en négociations, sur les bases de ces nouvelles propositions. Si l’on pense que c’est la fin du chemin, c’est surtout le début d’une période décisive pour bien accompagner ceux qui vont partir et garantir l’avenir de ceux qui restent. En début d’après-midi, ils ont signé des accords de méthode qui repoussent d’une part la période légale du plan, et qui encadrent d’autres part les prochaines négociations. Jusqu’au 29 novembre, les syndicats vont négocier les contours du plan de sauvegarde de l’emploi : les mesures concernant les départs volontaires, les primes, les mesures d’accompagnement, un plan senior… Au maximum, il n’y aura que 485 départs. Et jusqu’à fin décembre, ils vont négocier le projet industriel et le plan de réduction des coûts, qui doit atteindre 12 millions d’euros d’économie chaque année. Le jour de solidarité, qui devait être supprimé, est finalement suspendu pendant 3 ans, comme l’abonnement au plan épargne d’entreprise. Il n’y aura pas non plus de modification des primes de doublage, du travail de nuit, de week-end ni sur les transports.

En contrepartie de cette proposition de la direction, les syndicats se sont engagés à retirer tous leurs recours juridiques. Celui contre l’État pourra toujours être activité si les représentants du personnel estiment que le projet industriel s’éloigne du cadre des accords signés en 2014. De leurs côtés, le Grand Belfort et la Région Bourgogne-Franche-Comté, confirment dans un communiqué qu’ils déposent leur recours au tribunal administratif. « Les collectivités s’engagent à le retirer si des engagements forts sont obtenus : centre de décision, construction d’un projet industriel, nouvelles avancées pour les acquis sociaux », écrivent-ils.  

Un projet industriel

Depuis 4 mois, l’intersyndicale a refusé de s’asseoir à la table des négociations sur la base du plan initial. « Nous avons tenu bon », relève Francis Fontana, vraisemblablement soulagé. Fatigué aussi. Aujourd’hui, Sud Industrie et la CFE-CGC sont prêts à entrer en négociations, car les bases du plan ne sont plus les mêmes. Et surtout, un dessein industriel se dessine pour Belfort. Une chose que l’on n’avait plus depuis plusieurs années dans la cité du Lion relèvent plusieurs sources. « Les organisations syndicales ont réussi à peser sur le projet industriel », se réjouit Philippe Petitcolin (CFE-CGC), alors que normalement, dans la nouvelle organisation du dialogue social, les négociations programmées dans les plans sociaux ne portent « que sur la taille des chèques », critique-t-il.

Le périmètre de cette activité industrielle sera âprement discuté jusqu’à fin décembre, pour que Belfort devienne un centre d’excellence du 50 Hz. D’ores et déjà, les syndicats ont obtenu qu’un responsable, qui répondra directement au patron du business énergie, soit installé à Belfort. Il sera responsable de l’activité turbines à gaz 50 Hz, en Europe. Il devrait également disposer de marges de manœuvre pour organiser et gérer l’activité. Il sera accompagné de responsables du secteur commercial, de la production, de l’ingénierie et de la gestion de projets. « Nous allons refaire des choses que nous faisions correctement, se réjouit un élu syndical. Mais il faut nous laisser la main. » Belfort doit avoir une certaine autonomie. Aujourd’hui, ce n’est pas assuré. C’est l’enjeu des deux prochains mois. « Le site n’est pas encore sauvé, prévient Philippe Petitcolin. Nous verrons à la fin de l’année. » Contrairement au mois de mois de mai, l’espace de dialogue existe aujourd’hui pour organiser cette pérennité.

Les piquets levés

Si aujourd’hui la CGT ne signe pas ces accords, tout le monde s’accorde à dire que l’intersyndicale a tenu jusqu’au bout. Et que c’est l’essentiel. Le fait que la CGT ne signe pas n’inquiète pas outre mesure la CFE-CGC, ni Sud. Dorénavant, a direction doit même gérer « deux fronts de négociation ». Car la CGT va négocier les économies attachées aux ateliers. Ce lundi après-midi, la CGT a paraphé un procès-verbal de protocole de fin de conflit. Les piquets de grève vont être levés. Ce protocole prévoit des mesures concernant les grévistes ou l’absence de sanction assure Cyril Caritey, de la CGT. Il a été négocié directement avec Patrick Mafféïs, le responsable Europe des opérations industrielles. « L’équipe de nuit bosse ce soir », assure-t-il également.

Réparation des rotors

Les syndicats ont aussi obtenu le rapatriement à Belfort de la production de la turbine 9F, produite aujourd’hui aux États-Unis. Le site comtois va aussi accueillir une activité de réparation de rotors. « Belfort sera le site de référence de réparation pour les turbines 50 Hz », détaille Philippe Petitcolin. De son côté, la ligne stator-combustion, installée à Bourogne et qui va être délocalisée en Hongrie, est conservée « jusqu’à affectation effective du personnel sur de nouvelles productions, soit environ 12 mois », précisent la CFE-CGC et Sud Industrie dans un tract distribué aux salariés. Le temps d’envisager une diversification.

Les applaudissements ont été nourris à l’égard des syndicats CFE-CGC et Sud Industrie, ce lundi matin. Un son de cloche différent de prises de paroles récentes, notamment sur les piquets de grève ou à la manifestation samedi, où ils avaient pu être hués par une partie de l’auditoire. Malgré le plan qui se projette, du soulagement se dégage du visage de nombreux salariés, même si certains rejettent toujours ces négociations. Ce lundi 21 octobre, un futur se dessine peut-être à Belfort. Les prochaines semaines devraient en déterminer le contour.

La direction et le ministre saluent cet accord

« Cette proposition permet (…) d’améliorer la compétitivité du site tout en veillant à la préservation des compétences, se réjouit de son côté la direction dans un communiqué de presse, avant de poursuivre : GE salue également le déblocage des sites de Belfort et de Bourogne et la reprise du dialogue social avec le souhait partagé de construire un projet industriel robuste pour l’activité gaz à Belfort. » L’industriel américain dit vouloir se focaliser sur ses activités industrielles et se concentrer sur ses clients « qui ont été impactés durant cette période difficile ». De son côté, le ministère de l’Économie et des finances réaffirme la volonté « de diversifier le site dans l’aéronautique, avec l’objectif de créer 200 emplois dans ce domaine à horizon 2023 ». Bercy affirme continuer à s’impliquer dans la préparation des accords définitifs. « Un accord sur un nouveau projet industriel pour le site a été trouvé. C’est une excellente nouvelle. Je salue l’engagement personnel des représentants syndicaux et de la direction de GE qui a permis des avancées majeures dans les négociations », a apprécié Bruno Le Maire.

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