C’est l’histoire d’une naissance. Ou d’une renaissance. D’une résilience en tout cas. Printemps 2020 : la planète s’arrête sous les coups de boutoirs du covid-19. La société MS-Innov (Mintaka system innovation) encaisse. Depuis 2015, l’entreprise fait de la prestation de services dans le domaine industriel et plus particulièrement dans le domaine automobile. En cinq ans, la croissance est très rapide. Mais l’arrêt est brutal. En septembre 2020, les industriels ne signent plus de prestations. Le chiffre d’affaires de l’entreprise est réduit à la portion congrue. Julien Morel, le gérant, doit se résoudre à licencier.
Il n’abandonne pas pour autant. Depuis quelques temps, l’équipe travaille sur des innovations, en lien notamment avec l’université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM). L’entreprise opère alors un virage drastique. Elle redevient une start-up et vise le statut de PME industrielle, produisant le premier robot collaboratif made in France, façonné par une entreprise aux capitaux français. Une fierté. MS-Innov a même cédé l’activité de prestation de services qui lui restait, fin 2022, pour basculer totalement dans le nouveau projet. Qui est en passe de se concrétiser.
Le cobot est un robot collaboratif, c’est-à-dire qu’il peut travailler à proximité d’un humain, contrairement au robot qui œuvre dans une cage. Le cobot Morfose est conçu et fabriqué par MS-Innov, dans ses locaux du Techn’Hom, à Belfort; l’entreprise s’y est installée à l’été 2022. Et il sera présenté ce samedi 1er et dimanche 2 juillet au salon “Fabriqué en France”, à l’Élysée.
Le marché des cobots est particulièrement dynamique, même si la France accuse un certain retard. « La cobotique est le marché le plus dynamique de la robotique, estimé à 8 milliards d’euros d’ici trois à 4quatre ans », indique Julien Morel, convaincu. Lorsque MS-Innov était un bureau d’études, elle a pu mesurer les problématiques de l’industrie française et ses besoins de modernisation des moyens de production. La compétitivité passe par des investissements dans la robotique. Mais elle est là pour soutenir l’activité et limiter la pénibilité. Une « éthique » qui est chère à Julien Morel, qui vise aussi à sauvegarder certains savoir-faire. Le mouvement autour de la réindustrialisation doit offrir une fenêtre à ce projet, qui se tourne aussi vers l’international. « Notre volonté est d’être un des piliers français de l’indépendance industrielle dans le domaine de la robotique », assure Julien Morel.
Modulaire et sans fil
Dans ce contexte, il faut se différencier. MS-Innov a donc conçu un cobot très modulaire. Toutes les parties sont interchangeables et se complètent. On peut l’adapter à l’environnement et aux besoins du client, en jouant sur le nombre d’axes et la taille. Autre force: l’absence de fils dans le robot, ce qui lui permet de tourner indéfiniment sur lui-même, à l’image d’une lentille de phare, en mer. « On gagne du temps de cycle », souligne Julien Morel. L’énergie et la data sont transmis « via un système de frottement », glisse l’entrepreneur. Avec Morfose, MS-Innov peut monter jusqu’à 9 axes, avec le même module de base, en comptant 2 axes déportés. Le cobot dispose aussi d’une fixation aux standards européens, permettant de fixer l’outil que l’on veut.
Grâce à ce cobot, on peut faire de la manutention, du contrôle qualité, du vissage, de la peinture… « On peut même couper une pizza ou faire un massage », sourit Julien Morel. Il contient 2 200 composants. « C’est de l’horlogerie en termes de montage. » Le logiciel développé par MS-Innov, proposant un script visuel, « garantit une facilité de programmation permettant au plus grand nombre d’utiliser et de piloter un robot industriel », promet la société. Cette accessibilité fait partie de l’ADN de l’entreprise, qui a même développé des robots pédagogiques pour accompagner des élèves, étudiants ou apprenants de l’Afpa. Un des nombreux engagements pris par la société, membres Des Entreprises s’engagent du Territoire de Belfort.
En 2023, MS-Innov veut vendre 20 robots. 10 sont déjà précommandés, notamment par les sociétés Cristel, à Fesches-le-Chatel, et Epau-nova, à Mathay. MS-Innov est installé dans un espace de 720 m². Elle doit déjà pousser les murs pour envisager la production des premiers cobots ; 150 m² sont ajoutés. Et elle a aussi pré-réservé 1 500 m² au Techn’Hom en prévision de l’industrialisation prochaine. Aujourd’hui, elle peut assembler jusqu’à 70 cobots. Les premiers sortiront de l’atelier à l’automne.
Sur ce projet d’innovation, 3 millions d’euros ont été investis, dont 2,3 millions depuis la réorientation de MS-Innov, après le covid-19. L’entreprise a été soutenue par les programmes France Relance, France 2030 (avec une aide de 2,8 millions d’euros) et le fonds Maugis (lire notre article). MS-Innov finalise également une levée de fonds de 2 millions d’euros, autour de trois acteurs, qui prendront une participation minoritaire dans l’entreprise, de l’ordre de 25 %.
Autant de moyens qui doivent solidifier l’entreprise pour accompagner sa dynamique d’innovation, dont un plan est ficelé pour les quatre prochaines années. L’innovation comme le garant de l’existence de Mintaka system innovation. Son baudrier, si l’on fait référence au sens, en arabe, de ce mot, qui désigne également une étoile de la ceinture d’Orion. L’innovation, un baudrier pour toucher les étoiles. L’image est belle.
Héricourt : Gaussin présente son ATM H2
124 produits sont mis à l’honneur les 1er et 2 juillet à l’Élysée, à l’occasion de la 3e édition de l’exposition « Fabriqué en France ». Ils ont été sélectionnés parmi 2 452 dossiers. Cela fait environ un produit par département. Ils ont été retenus par un jury composé de Sophie Davant et des ministres Olivia Grégoire et Roland Lescure. Cette année, un accent est mis sur l’effort de réindustrialisation avec un stand “France 2030”, avec les “maquettes” des objets qui seront produits sur le territoire une fois que les usines financées par le plan d’investissement France 2030 seront construites et actives: ordinateur quantique, lanceur spatial, robot maritime, avion à décollage vertical ou électrolyseur à hydrogène. En 2020, les hameçons VMC, de Morvillars, avaient mis à l’honneur. En 2021, c’étaient les escaliers d’Olivier Marczak. La Peugeot 3008 de Sochaux a aussi eu ces honneurs. Cette année, l’industriel d’Héricourt Gaussin présentera son véhicule de manutention ATM, fonctionnant à l’hydrogène. Il est fabriqué à Saint-Vallier (Saône-et-Loire).