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Étupes : le sous-traitant automobile Technitube en redressement judiciaire

Jean-Pierre Moret, directeur général de Technitube, sous-traitant automobile installé à Étupes.
Jean-Pierre Moret, directeur général de Technitube, sous-traitant automobile installé à Étupes. | ©Le Trois – Thibault Quartier
Entretien

La société Technitube, à Étupes, est spécialisée dans le formage et le cintrage complexe de tubes en acier. Elle a été placée en redressement judiciaire le 1er juillet, par le tribunal de commerce de Belfort.

« La situation est grave. » Jean-Pierre Moret, directeur général de Technitube, ne prend pas de pincette. Et ne ménage pas les susceptibilités. Technitube a été placé en redressement judiciaire, le 1er juillet 2025, par le tribunal de commerce de Belfort. Et les perspectives sont peu réjouissantes. Pour le moment, une période d’observation de 6 mois a été actée par le tribunal. Avec un point d’étape fixé le 2 septembre.

Fin 2023. L’exercice de l’entreprise se clôt avec un chiffre d’affaires de près de 16 millions d’euros. L’usine tournait 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Fin 2024, ce chiffre d’affaires descend à 9,8 millions d’euros. Fin 2025, il ne dépassera pas les 7 millions d’euros. « Le marché s’est écroulé », commente Jean-Pierre Moret. Aujourd’hui, l’entreprise compte 79 salariés ; elle a eu jusqu’à 146 personnes. L’entreprise est spécialisée « dans le formage et le cintrage complexe de tubes en acier, inox et aluminium, de l’assemblage par soudure robotisée et le brasage au four au défilé », détaille-t-elle, sur son site Internet. 

L’usine s’étend sur 7 500 m2, dont 4 500 m2 d’atelier, très robotisés. Technitube dispose d’outils numériques de contrôle qualité 3D. Technitube produit notamment des tuyaux de refroidissement de boîtes de vitesse.

Technitube a été racheté en 2016

Début 2024, 50 % de l’activité s’arrête, alors que l’entreprise venait de produire 8 millions de pièces, l’année d’avant. « Des imbéciles veulent que l’automobile soit électrique », tance-t-il. Et son marché est intimement lié à la motorisation thermique. « Et malheureusement, ici, nous travaillons à 100 % pour l’automobile », ajoute Jean-Pierre Moret. Leur client sont des équipementiers automobiles, comme Eurocast ou l’Allemand ZF Friedrichshafen, qui subit aussi des secousses. Fin 2024, Technitube enregistre déjà un déficit de 700 000 euros, qui continue de grandir alors que les ressources continuent de diminuer. Un terrible effet ciseau.

Jean-Pierre Moret a racheté Techitube en 2016, avec Sophie Schmitt, qui est sa directrice générale adjointe. À l’époque, l’entreprise perdait 1 million d’euros par an. Ils inversent la tendance et investissent environ 4 millions d’euros dans l’usine. La fabrication est automatisée et les lignes de production ont été façonnées par les équipes de Technitube, pour en faire un bel outil de production.

Metal Service, une filial qui va bien

Technitube est détenue à 10 % par Sophie Schmitt et à 90 % par la holding MC Industrie, détenue elle-même à 40 % par Jean-Pierre Moret et à 60 % par son fils Nicolas Moret. Technitube détient, par ailleurs, à 100 % l’entreprise Metal Service, à Varennes-Changy (Loiret). L’entreprise est spécialisée dans la production de boulons d’ancrage, pour le secteur minier. Elle compte une dizaine de salariés. La société se porte très bien assure la direction générale.

Ils essaient bien, depuis l’an dernier, de pivoter l’activité et la diversifier. Des projets existent avec Atlantic, autour des pompes à chaleur, ou avec le Jurassien Signaux Girod, pour des panneaux de signalisation. Mais cela ne compense pas les volumes perdus dans l’automobile. « Nous n’avons pas eu le temps de trouver de nouveaux marchés pour compenser », admet Jean-Pierre Moret.

En plus, le sort s’acharne. Pour répondre à un projet d’un client américain, fournisseur de Stellantis, ils investissent plus d’un million d’euros dans une nouvelle ligne de production, en 2024. On évoquait, au départ, la production d’un million de pièces par an. Puis, le client annonce que ce sera 500 000. L’investissement est fait. Les gens, recrutés. Première désillusion. Et cette année, Technitube ne fera que 10 % de ce volume. Il y a une pointe d’amertume dans la voix, quand il présente cet outil flambant neuf.

Une reprise de Technitube ?

Jean-Pierre Moret est âgé de 78 ans. L’industrie, il connaît. Il est passé notamment par Bosch. Il n’a pas de mots assez durs à l’égard « des énarques » ou des promoteurs de la voiture électrique, « que les gens n’ont pas les moyens d’acheter ». Mais il est toujours là, à tenter de sauver ce qui peut encore l’être. « Il y a longtemps que je n’ai plus la foi. Je fais cela par habitude », sourit-il, avec un brin de sarcasme. Il moque aussi les discours autour de l’innovation, qui ne font pas tourner les usines, ciblant particulièrement l’hydrogène. « Avec de l’hydrogène, on fabrique des bombes », raille-t-il. « On raisonne à l’envers », déplore-t-il, encore.

Face à lui, les options ne sont pas légion. La pire, ce serait la liquidation. Sachant que la baisse des commandes a tendance à s’accélérer pour Technitube, car les clients cherchent déjà d’autres fournisseurs ou sont eux-mêmes en grande difficulté. « Les temps sont durs pour tout le monde », observe-t-il. L’entreprise joue, qui plus est, dans un marché international où les opérateurs sont installés en Asie ou en Afrique, au Maroc par exemple, où Stellantis et Renault disposent d’importantes unités de production. « On n’a aucune chance en France de vendre des produits compétitifs », déplore encore Jean-Pierre Moret.

Autre option, une reprise de l’activité, avec un industriel qui viendrait avec de nouveaux business ; avec cette option, il faut que Technitube arrive à traverser les mois difficiles devant lui. Depuis 3 ans, les deux associés essaient de vendre l’entreprise, sans succès. Le poids du marché automobile dans les résultats de l’entreprise effraie. « C’est rageant », râle Jean-Pierre Moret. Depuis une décennie, ils se sont battus pour redresser la boite, investir. Et là, ils subissent une réalité bien plus grande qu’eux. « La situation n’a rien à voir avec une personne ou une erreur de gestion », souffle-t-il en regardant cet outil de travail en souffrance.

Depuis 2020, l’industrie automobile française a perdu plus de 40 000 emplois, selon la plateforme automobile ; on compte aujourd’hui 336 000 emplois dans le secteur. Et d’ici 2035, on estime que 75 000 emplois vont encore disparaître. Concomitamment, selon Le Monde, 30 à 50 % de la production française de composants pour l’automobile vont disparaître d’ici cinq ans. Vertigineux, à l’image du chiffre d’affaires de Technitube qui va au moins être divisé par deux, en 24 mois.

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