Le collectif Reconstruire, né au début de l’été (lire notre article), encourage la reconstruction d’une industrie française, souveraine et responsable. À quelques mois de l’élection présidentielle, il interpelle le monde politique sur l’urgence de cette reconstruction. Il organise un forum, le 20 octobre, à Belfort. Le Trois est partenaire.
Le collectif Reconstruire, né au début de l’été (lire notre article), encourage la reconstruction d’une industrie française, souveraine et responsable. À quelques mois de l’élection présidentielle, il interpelle le monde politique sur l’urgence de cette reconstruction. Il organise un forum, le 20 octobre, à Belfort. Le Trois est partenaire.
Reconstruire, c’est un collectif singulier. Il est façonné autour de syndicalistes de General Electric, Alcatel et Technip. Les trois entités ont en commun d’avoir été de prestigieuses industries françaises avant d’être vendues à des acteurs étrangers. À ces représentants s’ajoutent des experts comme Christian Harbulot, directeur de l’école de guerre économique, des acteurs du made in France comme Charles Huet, fondateur de La Carte française, mais aussi des lanceurs d’alerte comme Maxime Renahy, qui bosse sur les questions d’évasions fiscales. « Ce sont des gens qui croient en l’industrie française », résume Alexis Sesmat, délégué syndical Sud Industrie, dans l’entité turbines à gaz de General Electric.
Si la crise sanitaire a mis en avant la capacité de réaction des Français, elle a aussi mis le doigts sur les carences de son industrie et sa dépendance. « L’industrie, c’est le poumon malade de la France », estime Philippe Petitcolin, délégué syndical CFE-CGC, à General Electric, qui rappelle la destruction des emplois industriels en France en 30 ans. La Fondation Ifrap, qui s’appuie sur des données de l’Insee, estime que le secteur industriel français est passé de 4,5 millions d’emplois salariés en 1989 à 3,1 en 2017, selon l’Insee. La part de l’industrie dans l’ensemble de la valeur ajoutée des branches d’activité a aussi fortement reculé, atteignant 13,2 % en 2020 contre 25 % en 1974. Et Philippe Petitcolin de glisser également que des fleurons industriels ont été financés par les commandes publiques et qu’ils sont aujourd’hui passés sous pavillon étranger.
Pour le collectif, cette situation dramatique de l’industrie française a une cause bien identifiée : « C’est l’abandon, par le politique, de l’industrie », résume Alexis Sesmat. Philippe Petitcolin rappelle que cette politique industrielle s’inscrit « dans un contexte de guerre économique », dont Alstom fut un exemple criant. Et de rappeler : « Au lieu de préserver ses fleurons, la France a vendu à la découpe », tance-t-il. Avec ce forum, le collectif veut justement interpeller les futurs candidats à l’élection présidentielle, mais surtout les obliger à se positionner sur cette question industrielle, en formulant des propositions concrètes ; ils pourront s’exprimer à la tribune s’ils le souhaitent, en fin de matinée. Les principaux partis politiques ont marqué « un intérêt » pour le forum. Prendront-ils la balle au bond ?
« Le forum des possibles »
Du concret, il y en aura, justement, au cours de ce forum. Il les mettra en avant à l’occasion d’une table ronde, l’après-midi, en présentant La Carte française, une carte cadeau made in France de Charles Huet, la reprise par le groupe Kramer de Jacob Delafon, le fabricant d’électro-ménager vendéen Daan tech, et du local Cristel, avec la venue de Damien Dodane. « C’est le forum des possibles », apprécie Alexis Sesmat.
Avant ça, un état des lieux de l’industrie française est proposé, avec des experts de renom, dont Christian Harbulot, la docteure en géographie Anaïs Voy-Gillis, qui travaille sur les enjeux et les déterminants de la réindustrailisation de la France ou encore l’économiste Laurent Izard.
La dernière partie de la journée sera consacrée à la place des salariés dans la conduite des entreprises, sur leur connaissance et sur la ressource qu’ils représentent pour les élus. « Une politique industrielle sans associer les syndicats est vouée à l’échec », assure Philippe Petitcolin, qui, avec ses homologues, a dû dépenser une énergie folle pour déconstruire les représentations des locataires de Bercy, le ministère de l’Économie, pendant le conflit social à General Electric, en 2019. Le collectif attend la définition d’une « stratégie à long terme », qui s’appuie sur les outils existants pour défendre les intérêts français – par exemple la loi Pacte – tout en en créant d’autres. « Il faut que la France passe d’une position défensive et victimaire à une position offensive », estime Philippe Petitcolin.
Le forum sera enfin l’occasion d’évoquer le combat des Jurassiens de MBF et de la création d’une scoop, de la fondation de BH2M, à Belfort, par d’anciens salariés de GE Hydro de Belfort, à la suite de la fermeture de l’établissement. « Nous voulons mettre en lumière ces initiatives et créer un réseau d’entraide des acteurs de la réindustrialisation », formule finalement Philippe Petitcolin.
- Mercredi 20 octobre, de 9 h 45 à 17 h, salle des fêtes de Belfort. Entrée libre.