Trouver « le juste milieu », entre une vision de la justice rêvée et celle des moyens. Trouver « le juste milieu » entre être assez dur et assez pédagogue, entre traiter « la grande et la petite déliquance ». Ou encore entre « répression et prévention ». Dans un long discours, Jessica Vonderscher, procureure de la République du Territoire de Belfort, a décrypté les enjeux du tribunal qui se sont écoulés toute l’année 2023 et pour cette nouvelle année 2024, lors de l’audience solennelle de rentrée qui s’est tenue le 30 janvier.
Pour réussir à trouver « ce juste milieu » pour les personnels, l’enjeu de 2023 a déjà été de désengorger le tribunal. « Nous avons organisé un grand déstockage. C’était indispensable », commente la procureure. Des procédures remontant à 2017 ou 2018 ont été classées, soit sans suite fautes de preuves, soit enfin traitées. « Elles devenaient fort trop lointaines et ne permettaient pas aux enquêteurs, de travailler sereinement. » L’année 2023 a aussi été celle de la mise en place d’une politique d’alternative aux poursuites (lire ici, ici ou encore ici) que ce soit des stages, des travaux d’intérêt généraux, ou bien encore la contribution citoyenne. « On ne peut pas faire comme si de rien n’était alors que les prisons de Franche-Comté ont des taux d’occupation de 150 voire 200%. » Avec cette politique, le taux de poursuite étant des travaux d’intérêt généraux s’établit désormais à 20%. Le taux « le plus important de France », expose la procureure de la République.
Une politique qui continue de grandir, mais qui se heurte à des contraintes. Déjà, à « une misère sociale sur laquelle on peut difficilement fermer les yeux. Chaque jour, à petite dose, nous observons une petite part de cette souffrance », détaille Jessica Vonderscher. Pour elle, cela doit permettre de se rappeler que les métiers liés à la justice « doivent continuer à être profondément humain » et continuer « d’irriguer les audiences d’empathie ».
Manque de moyens
Ces principes se heurtent aussi à des réalités parfois difficiles au tribunal. Sur le papier, le tribunal judiciaire dispose d’assez de magistrats. Mais entre les temps partiels, les arrêts maladies, les mises à disposition, le personnel présent est régulièrement débordé.« L’équilibre est fragile, les conditions sont souvent trop difficiles », expose Sandrine Batalla, présidente du tribunal, lors de son discours.
« En septembre 2023, nous avions un déficit de 10 postes pour les greffiers », expose-t-elle. L’équilibre est extrêmement fragile. Le métier souffre d’une absence de reconnaissance, mais aussi « il y a absolument besoin de revaloriser la profession », commente Ludivine Violet, directrice adjointe du greffe du tribunal de Belfort. Ce métier, au sein du tribunal, est indispensable. Car sans eux, les procédures ne peuvent pas être vérifiées, et les procès ne peuvent pas se tenir. « Le greffier est le collaborateur du magistrat. Il s’assure que chaque personne respecte le droit. Il met en forme la décision après le procès afin que la peine puisse être exécutée », détaille encore Ludivine Violet.
À cause du manque de greffiers, le tribunal judiciaire a dû supprimer plusieurs audiences, aussi bien au civil qu’au pénal. « On sentait chez les agents une souffrance prégnante », commente la présidente du tribunal. Un recrutement important a été acté. Trois agents dont deux greffiers doivent arriver en mars prochain.