AFP par Damien Stroka
“J’ai beaucoup attendu ce moment en réalité, malgré la pression le stress, malgré le fait que c’est une accusation horrible pour quelque chose que je n’ai pas fait”, a-t-il lancé à la cour au début de son interrogatoire sur les faits, qui a duré jusqu’en début de soirée. Interrogé par le président François Arnaud, le Chilien de 33 ans est apparu pourtant souvent en difficulté, multipliant imprécisions ou réponses peu vraisemblables.
"Achats débiles"
L’achat d’allumettes et d’un bidon d’essence près de Dijon après son arrivée en France pour y retrouver Narumi? “Pour le remplir” de carburant pour sa voiture de location. “Un achat impulsif (…) parfois je fais des achats débiles”. Tout ce temps passé à sillonner un secteur boisé près de Dole, où les enquêteurs pensent que le corps de l’étudiante, jamais retrouvé, a été déposé ? En cherchant sa route, il tombe “sur des villages, avec des lumières de Noël” et décide de profiter “de la situation…” Son cousin à Barcelone qui dit aux policiers qu’il l’a interrogé sur la strangulation ou la pendaison? “Je ne sais pas (…) Pas à mon initiative en tout cas”.
Il a longuement évoqué ses retrouvailles avec Narumi, les moments passés les jours précédents devant la résidence universitaire de l’étudiante, sur le campus de Besançon. “On a l’impression que l’épiiez”, glisse l’une des assesseuses du président. “Je ne l’avais pas prévenue que je venais (…) j’avais honte de reconnaître que je voulais la revoir”, a expliqué le jeune homme, qui a reconnu durant la première semaine être venu du Chili pour retrouver Narumi à Besançon où elle venait d’arriver pour étudier. Jusqu’à présent, il parlait d’une rencontre fortuite, après une séparation quelques semaines plus tôt.
Pour l’accusation, ce fils d’un ancien haut cadre des télécoms n’a pas supporté qu’elle mette fin à leur relation et l’a tuée en préméditant son acte : selon les enquêteurs, il l’aurait étouffée ou étranglée dans sa chambre universitaire avant de se débarrasser du corps. L’accusé, aussi soupçonné d’avoir usurpé les comptes de son ex sur les réseaux sociaux pour faire croire qu’elle était toujours en vie, a également reconnu pour la première fois lundi avoir acheté avec la carte bancaire de l’étudiante un billet de train vers Lyon, le 6 décembre. “Elle me l’avait demandé”, assure-t-il.
Autre nouveau détail : le 4 décembre, la veille de la disparition de Narumi, il dit l’avoir attendue dans sa voiture devant sa résidence universitaire et avoir apposé sur la lunette arrière une feuille avec l’inscription “Nicomi”, contraction de Nicolas et Narumi. La jeune femme serait alors arrivée vers lui émue aux larmes, explique l’accusé, qui dit n’avoir jamais parlé de cela de peur qu’on ne le croit pas. Ils seraient ensuite aller se promener avant de passer la soirée dans un restaurant près de Besançon. Narumi l’aurait ensuite invité à passer la nuit dans sa chambre, la fameuse nuit où plusieurs témoins ont entendu des cris glaçants. Elle n’a plus été revue vivante.
"Mensonges phénoménaux"
Selon l’accusé, ils auraient eu une relation sexuelle. Un rapport selon lui protégé. “On n’a pourtant retrouvé aucun préservatif” ni emballage, glisse le président. “La version est diamétralement opposée à celle qu’il avait donnée en première instance”, s’est agacé devant les journalistes Randall Schwerdorffer, l’un des avocats des parties civiles. Il a fustigé les “mensonges phénoménaux” et “les nouvelles histoires du Petit Nicolas”. Les réponses de Nicolas Zepeda sont “confuses”, a concédé l’un de ses avocats, Renaud Portejoie.
“Il s’enfonce d’une certaine façon, mais il a des avocats pour le sortir de tout ça”, a ajouté le conseil, qui a vainement réclamé le renvoi du procès sur un point de procédure. Moment très attendu de cet appel, l’interrogatoire va se poursuivre mardi avec les questions des parties civiles et de l’avocat général. Condamné en première instance à 28 ans de réclusion, Nicolas Zepeda encourt la perpétuité. Le verdict devrait intervenir jeudi.