Lutter contre les violences dans la sphère familiale. Prévenir. Eviter la récidive. Protéger les victimes. Accompagner la prise en charge des auteurs. Voici le but du comité départemental de lutte et de prévention contre les violences conjugales et intrafamiliales qui s’est tenu vendredi 21 octobre à la préfecture du Territoire de Belfort. Il a rassemblé une chaîne d’acteurs qui s’engagent pour travailler ensemble : associations (UDPS, Armée du salut), Etat, Procureure, magistrats du siège, services judiciaires (SPIP),forces de l’ordre. Le motif de ce comité : l’augmentation des violences constatées. En zone police, sur la même période en 2020 et en 2021, les interventions pour des faits constatés sont passées de 257 à 379. Soit une hausse de 40%. Les acteurs restent modérés. Il n’y a pas forcément 40% de cas en plus, mais des signalements plus nombreux. Pour autant, c’est beaucoup trop. En termes de garde à vue, même dynamique. Elles sont en hausse. Mais cela s’explique aussi par une politique plus stricte. En cas de fait de violences, l’auteur des faits est automatiquement placé en garde à vue désormais. Lors d’une conférence de presse, les acteurs ont abordé les points en cours pour améliorer la prise en charge.
Nouveaux recrutements à la gendarmerie
Le colonel Jacques Mérinot, directeur du groupement de gendarmerie départementale. a annoncé le recrutement d’un nouvel intervenant social pour épauler lors des dépôts de plainte. Ils seront désormais deux à accompagner et guider vers des associations.
Deuxième action à la gendarmerie : 3 personnes sont aussi désormais formées sur la question des violences conjugales et intrafamiliales. Avec des missions clefs : l’appui technique des auditions, et une expertise sur l’audition des mineurs. La connaissance du tissu des partenaires pour accompagner. Et la mise en place d’ateliers de prévention en milieu scolaire pour renforcer la détection des mineurs en danger, explique le colonel Jacques Mérinot, directeur du groupement de gendarmerie départementale. Car il existe encore un chiffre noir concernant les violences faites sur les enfants, quelles soient psychologiques ou physiques. « Les pédiatres estiment qu’un enfant sur trois évoluent dans ces sphères (sphères violentes, NDLR) », explique la procureure de la République, Jessica Vonderscher.
L'UDPS s'engage du côté des transports de victimes
Du côté de l’union départementale des premiers secours (l’UDPS), Andy Cossard, responsable formation, a annoncé lors de cette réunion mettre en place un protocole pour transporter les victimes vers des lieux de prise en charge. « Jusqu’ici, lorsqu’il n’y avait pas de blessures nécessitant l’intervention du Samu, la victime n’avait pas de moyen de se déplacer pour des examens psychologiques ou médicaux. Elle devait y aller par ses propres moyens », explique le préfet du Territoire de Belfort, Raphaël Sodini. Et lorsque la personne n’est pas véhiculée, ou tout simplement choquée, la situation se compliquait. L’UDPS se propose donc de le faire avec son équipe de bénévoles. Avec une attention particulière aux victimes. « Nous avons fait de la sensibilisation au soutien psychologique. Pour que nos bénévoles adoptent la bonne posture et le bon vocabulaire », expose. Le dispositif fonctionnera 7 jours sur 7, avec un système d’astreinte.
Hébergement des auteurs par le SPIP et l'Armée du Salut
Les responsables du service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip) et de l’Armée du Salut ont annoncé augmenter le nombre de places d’hébergement pour les auteurs de violences. De 7 actuellement, elles devraient passer à une dizaine. Dont quatre à l’Armée du Salut, qui mènent un travail avec les services de la justice et leur propre association pour permettre aux familles victimes de ne pas avoir à déménager et permettre à l’auteur de prendre du recul et travailler sur lui-même, entouré par des professionnels. « Il faut mener des réflexions sur les soins. Le constat que l’on fait, c’est que ces dispositifs réduisent le risque de récidive. Même si c’est encore insuffisant », est-il expliqué. Le directeur de l’Armée du Salut va en ce sens. « Le fait d’être placé, éloigné, fragilise. C’est justement un travail sur les fragilités qui sera mené pour prévenir la récidive.» Dès 2023, un dispositif de prévention sera mis en place, avec la mise en place de thérapie en cas de besoin pour éviter les faits de violence.
À l'hôpital, le dispositif s'étoffe
Le dispositif de dépôt de plainte directement sur place qui est en place depuis un an va s’étoffer. Avec la mise en place d’un service d’unité médico-judiciaire pour permettre aux victimes de faire constater leurs blessures à Trévenans, directement sur place. Avant, les victimes devaient se rendre jusqu’à Besançon. « En clair, elles ne s’y rendaient pas ou rarement », a expliqué la procureure de la République.
Banalisation de la violence
La procureure de la République du Territoire de Belfort, Jessica Vonderscher, remet les faits de violence en perspective. « Aujourd’hui, il existe une banalisation de la violence au sein des familles qui n’est pas concevable.» Violences en tout genre : psychologiques ou physiques.Elle rappelle certains principes : insulter, harceler, est pénalement répréhensible. Fouiller dans un téléphone, aussi. Lancer des objets, donner une gifle, encore plus. « La sphère familiale devrait toujours être un refuge.»
Elle va plus loin. Pour elle, une partie de la délinquance est issue des violences intrafamiliales. « Certains jeunes ne rentrent plus chez eux à cause de l’enfer qu’ils vivent à la maison. Cela crée de la délinquance. Résoudre la problématique des violences intrafamiliales, c’est aussi résoudre de la délinquance.» Ce comité, pour Jessica Vonderscher, permet d’avoir de la part de tous les acteurs « un discours commun et des formations communes pour avoir tous les mêmes éléments » à la fois face aux victimes et aux auteurs. Ce qui doit permettre d’améliorer la prise en charge et le suivi.