Afin d’anticiper la mise en place du passe sanitaire dans les bars, hôtels et restaurants, le préfet du Territoire de Belfort a mis en place une expérimentation qui a démarré le mercredi 28 juillet.
Afin d’anticiper la mise en place du passe sanitaire dans les bars, hôtels et restaurants, la préfecture du Territoire de Belfort a mis en place une expérimentation qui a démarré mercredi 28 juillet. Les quatre restaurants concernés sont le Cookovin à Méroux, La Petite Charrue à Vauthiermont, Le Relais d’Alsace à Foussemagne et le Bistroquet à Belfort.
Le Cookovin, Méroux, 11 h 45 vendredi 30 juillet: le chef, Frédéric Pastorino, accueille le préfet du Territoire de Belfort, Jean-Marie Girier pour faire le bilan des deux premières journées d’expérimentation du passe sanitaire. Pour le préfet, c’est l’occasion « de voir sur des zones différentes du Territoire comment cela se passe. Petits et grands restaurants, avec une ou deux entrées, le dispositif du passe sanitaire “en avance” est utile pour mieux accompagner les restaurateurs dans la mise en place. » Acceptation, perte de temps: les restaurateurs racontent les prémices du passe sanitaire dans le Territoire de Belfort.
« La mise en œuvre est compliquée »
Le chef de Cookovin l’affirme: la mise en œuvre a été compliquée. « Il faut essayer de générer le minimum de stress chez les clients. Le midi, les clients ont 45 minutes pour manger. Rien ne doit changer pour eux, mais nous, on est en ébullition ». S’il s’est résigné au passe sanitaire, c’est parce que les deux confinements ont été extrêmement difficiles pour lui et ses équipes : « Mentalement, je n’arriverais pas à revivre un confinement de sept mois. Je n’y arriverais pas. Pour les équipes aussi, ça a été très dur. A la reprise, ils étaient épuisés. »
Mise en place d’un sas, contrôle des passes et pédagogie ont été nécessaires pour cette expérimentation. Surtout avec les personnes âgées : « On a dû passer du temps avec les personnes âgées pour leur expliquer, pour leur montrer l’application ». Il continue : « Le premier jour, ça a été un chaos total. On a été dépassés. Le fait de tester maintenant le passe sanitaire est une bonne chose. Ça nous permet d’anticiper le grand moment. »
« Pour ceux qui ne veulent pas se faire vacciner, c’est un peu le dernier repas du condamné »
Frédéric Pastorino l’affirme avec un brin d’humour : « Pour ceux qui ne veulent pas se faire vacciner, c’est un peu le dernier repas du condamné ». Pour le moment, ils sont encore accueillis, mais bientôt, les restaurateurs devront les refuser.
Dans le restaurant Le Relais d’Alsace, à Foussemagne, on s’inquiète. Le chef, Christophe Gincourt annonce : « Ça va être très compliqué. Au vu des remarques que l’on a eues, on sait que sur nos 30 couverts, on aura facilement 30-35% en moins quand le passe sanitaire sera définitivement en place. L’impact, ça c’est sûr, on va l’avoir ».
Même chose à Vauthiermont, à la Petite Charrue : « Cela ne fait que deux jours et plusieurs clients n’ont pas voulu venir à cause de l’expérimentation du passe. Dans notre clientèle, un tiers n’est pas vacciné, environ. Ça laisse présager une perte de chiffre; ça fait peur. On espère tourner avec les vaccinés », s’inquiète le chef. Heureusement, la musique n’est pas la même partout. Par exemple, moins d’inquiétude du côté du Bistroquet à Belfort. « Ma clientèle est composée à 95% de chefs d’entreprise. Ils savent comment ça marche et sont pour la plupart tous déjà vaccinés. On n’a pas eu de soucis véritables d’organisation. Un sas à l’entrée sera nécessaire, mais on a moins peur de perdre de la clientèle que certains collègues » affirme le chef du Bistroquet à Belfort.
Trois fois plus de temps pour accueillir les clients avec le contrôle du passe
Au restaurant La Petite Charrue à Vauthiermont, on s’amuse à compter le temps en plus pour contrôler les passes sanitaires, installer les gens, expliquer et faire de la pédagogie. Mercredi, le chef a passé 1 h 28 pour accueillir 44 clients. C’est trois fois plus par rapport au temps qu’il passe habituellement à l’accueil. « C’est une perte de temps énorme et l’accueil en pâti un peu. Ça crée des bouchons à l’entrée » rappelle Francis Luczak, le chef.
Le chef du Cookovin se fait les mêmes réflexions : « Aujourd’hui, il fait beau. Mais quand il va pleuvoir, le problème des bouchons à l’entrée va se poser. » Les quatre restaurants laboratoires sont unanimes sur ce point. Le temps passé à contrôler représente un enjeu d’organisation énorme. « On a perdu dix minutes sur un service de quarante-cinq minutes » explique Frédéric Pastorino, chef du Cookovin.
« Quant aux réactions des gens, on a quand même un peu peur »
Cette expérimentation permet aux quatre restaurants de prendre la température avant l’heure. Au Cookovin, à Méroux, et au Bistroquet, à Belfort, l’acceptabilité a été bonne. « Quelques questions, mais ça été dans l’ensemble » argue le chef du Bistroquet. Même constat pour Frédéric Pastorino. Mais le discours n’est pas le même partout et certains craignent les réactions de la clientèle. « On a joué le jeu. Chez nous, on a surtout fait ça pour voir la réaction des gens. Aujourd’hui, on a peur de se faire agresser. Et puis, ce n’est pas notre rôle de contrôler ! » argue Christophe Gincourt, chef du Relais d’Alsace à Foussemagne
Certains ont déjà pris la décision. A La Chaumière, au Ballon d’Alsace, le discours est clair : « On n’est pas dans l’optique de trier les gens. On n’est pas là pour faire la police. On attend les dernières directives, mais si ça se confirme, on fermera. » Le patron de La Chaumière continue : « En plus, imaginez-vous. Un groupe de 8 hommes arrivent, 6 sont vaccinés et 2 non. Comment on les retient ? On ne veut pas se retrouver en danger, mais on ne se mettra pas hors-la-loi pour autant. On fermera. Le passe sanitaire est inapplicable comme tel. »
Le préfet, interrogé sur ce sujet, précise que pour ceux qui décident de rester fermer, il n’y aura pas d’aides financières comme lors des confinements : « Le passe sanitaire, quand il sera en vigueur, s’appliquera aux restaurateurs de façon réglementaire. Ceux qui ne respectent pas la loi ne seront pas aidés. »
Le masque redeviendra-t-il obligatoire dans le Territoire de Belfort ?
C’est non. Le préfet préfère ne pas remettre en place l’obligation du prt du asque dans Belfort. « Evidemment, lors d’événements qui rassemblent du monde, comme les puces, il est en vigueur. Mais sinon, réimposer le port du masque semble compliqué. L’acceptabilité s’effondre au fil du temps. C’est justement le rôle du passe sanitaire de permettre de ne pas le remettre en place. Aujourd’hui, notre cap, c’est la vaccination des 12-18 ans qui ne s’élève qu’à 30% pour le moment. »