Être immergé pour prendre conscience, c’est l’idée derrière le dispositif « Les couloirs de la violence amoureuse » . Mercredi 4 octobre, l’association Solidarité femmes et le centre d’information sur les droits des femmes et des femmes (CDIFF) ont commencé à faire visiter les couloirs de la violence amoureuse (lire un complément ici). Un outil imaginé par une maison d’aide et d’hébergement des femmes victime de violences conjugales au Québec, nommée La passerelle.
Dans une salle, une structure métallique de 6 mètres sur 11 entièrement voilée abrite huit pièces, huit « couloirs ». Un vidéo-projecteur dans chaque salle permet de visualiser un film de quelques secondes représentant un jeune couple de lycéens. Chaque vidéo est un stade. Les premiers émois. L’installation de la jalousie. La peur. La crise. Les promesses que cela ne se reproduira plus. L’abus. L’agression. La plainte. Le but de ces vidéos est de travailler avec les jeunes sur l’installation insidieuse de la violence dans les relations, qui démarrent de plus en plus jeunes depuis quelques années.
Les films, très professionnels, permettent facilement de s’identifier à la victime ou même à l’agresseur. Le jeune homme n’est pas le cliché du mauvais garçon. C’est un jeune homme perdu, qui se questionne. On a l’occasion de se glisser dans sa tête pour montrer qu’un jeune qui installe cette violence a besoin de se faire aider. Après chaque séquence, un intervenant questionne le petit groupe formé de six personnes. « Est-ce que vous considérez que ce que vous avez visionné était déjà de la violence ? », « La jeune fille avait-t-elle raison de s’excuser ? », « Cette réaction vous paraît-t-elle appropriée ? », « Qu’auriez-vous fait à sa place ? ».
À partir de lundi 9 octobre, des dizaines de classes du Territoire de Belfort allant de la 4ème à la terminale iront visiter ces couloirs. Invitée à les découvrir en avant-première, Jessica Vonderscher, procureure de la République du Territoire de Belfort, explique : « Souvent, quand nous faisons des stages sur les violences conjugales au tribunal, on nous dit que ce sont des choses qu’il faudrait apprendre à l’école. Au stade des stages, c’est souvent déjà trop tard. » Le préfet, Raphaël Sodini, opine. L’outil a impressionné. Et les deux représentants se questionnent sur les bienfaits d’un outil de ce type à long terme dans le territoire. « Il faut qu’on soit présent sur ces questions dès la 4ème, avec des piqures de rappel jusqu’à la terminale », détaille Jessica Vonderscher.
Les couloirs de la violence amoureuse permettent de se questionner sur l’installation de la violence, les notions de consentement, de harcèlement, de violences psychologiques, de culpabilisation, de chantage, de divulgation de photos érotiques, de tolérance. Des conseils sont délivrés tout au long du parcours sur les personnes ressources à qui se référer à chaque stade de l’installation des violences. Il est aussi question, à la fin de la vidéo et de la séquence, des peines encourues pour montrer aux jeunes la gravité des faits, même s’ils sont mineurs. Ses couloirs pourraient devenir un outil pédagogique à long terme dans le département ; la réflexion est lancée pour cela. Et la créatrice de l’outil, Isabelle Harvey, n’y voit pas d’opposition. « Nous n’avons pas fait ça pour l’argent. Il faut que ça essaime. S’il peut y avoir une reproduction, tant mieux », s’est-elle réjouie, proposant même son aide pour le réaliser.