Le Smiba, (syndicat mixte interdépartemental du Ballon d’Alsace), qui gère et exploite le site du massif sous-vosgien, a pris la décision en 2023 de mettre en place une activité de location de matériel de ski complémentaire à l’offre privée existante pour la saison 2023-2024. Le 6 janvier, La Cabane qui exerce une activité de restauration et de location de matériel de ski sur le domaine de la Gentiane, juste en face du Smiba, a déposé un référé-liberté pour suspendre la délibération du Smiba qui autorise l’ouverture de cette offre vue tantôt comme concurrentielle, tantôt comme complémentaire selon les acteurs. La société estime que cette création de boutique va conduire à une diminution de son chiffre d’affaires, ce qui lui portera préjudice.
Les gérants, Patricia Liblin et Yves Schmaltz se expliquaient, dans un précédent article, se sentir trahis par la manière dont le Smiba a opéré, sans les consulter, pour cette ouverture (lire ici). Le référé-liberté, qui consiste à demander en urgence (dans les 48 heures) une audience en tribunal, se fondait sur la privation d’une des libertés fondamentales : celle d’entreprendre. Les gérants évoquaient notamment un investissement de 60 000 euros pour l’agrandissement de leur service qui ne nécessitaient pas l’ouverture d’un service de location par le Smiba.
L’audience s’est tenue le 10 janvier 2024. La juge des référés a estimé que la condition d’urgence n’était pas satisfaite, car la location de matériel de ski ne représente qu’une partie du chiffre d’affaires de La Cabane (elle dispose aussi d’une offre de restauration). La juge considère également « qu’il existe bien un manque de matériel de ski à louer sur le massif et que cette carence conduit depuis deux saisons le Smiba à refuser de vendre des forfaits de ski aux clients n’ayant pas réussi à louer du matériel », communique le tribunal administratif de Besançon.
Le tribunal administratif a considéré que « même si la SARL La Cabane dispose désormais d’un stock de skis à louer plus important que par le passé, elle ne démontre pas pour autant être en mesure de répondre aux besoins susceptibles d’être exprimés par toute la clientèle », poursuit le tribunal. Il estime également que l’existence du service complémentaire créée par le SMIBA ne lui portera pas préjudice pour maintenir sa propre activité. Pour cela, « la condition d’urgence n’était pas satisfaite, le référé-liberté est rejeté ».
« Une mi-déception »
Fabienne Thouvenin, directrice du Smiba, n’a pas souhaité faire de commentaire sur la décision du tribunal administratif et sur la poursuite du travail avec La Cabane. De son côté, l’avocat des gérants de La Cabane, Bruno Kern, dénonçait à la sortie de l’audience des méthodes « qui du début à la fin ne sont pas honnêtes ». Des témoignages sur la qualité du service proposé par le loueur de ski ont été versés au dossier par le Smiba. « Le Smiba n’a pas à juger de la qualité de service », martèle Bruno Kern. Selon nos informations, des avis négatifs, notamment des avis Google en cascade ont été versés au dossier, par exemple. Plusieurs attestations de travailleurs au Ballon d’Alsace attestent aussi de la carence, ou alors de matériel défectueux.
Leur avocat complète après lecture du jugement : « La bonne nouvelle, c’est que le tribunal administratif s’en est tenu au problème quantitatif, et n’a pas tenu compte des attestations et commentaires sur la qualité du service. »
Pour lui, le jugement est une erreur, car il s’appuie sur l’argument que la restauration peut compenser une perte de la location de skis, puisque les deux activités ont été considérées comme à « 50/50. Or, il ne faut pas confondre chiffre d’affaires et bénéfices. Sans les bénéfices de la location, les charges du restaurant ne peuvent pas être assumées », commente-t-il. « Nous avons déposé hier soir une pièce de l’expert-comptable qui atteste que le bénéfice se concentre à 85% sur la location, mais cela n’a pas suffit. » Bruno Kern voit cela comme une « mi-déception », car la juge a seulement statué sur le caractère d’urgence. L’avocat aimerait aller « au fond », c’est-à-dire repasser devant le tribunal administratif pour juger de « l’illégalité » de ce service du Smiba. Mais pour le moment, il n’a pas encore pu joindre les gérants de La Cabane.