Décembre 2023
La Cabane, un loueur de skis situé sur le domaine de la Gentiane, accuse le syndicat mixte interdépartemental du Ballon d’Alsace (Smiba) de s’installer comme concurrent. La société estime que cette création de boutique va conduire à une diminution de son chiffre d’affaires, ce qui lui portera préjudice. Elle l’attaque en justice en déposant un recours de référé-liberté, qui consiste à demander en urgence (dans les 48 heures) une audience au tribunal.
En effet, le Smiba ouvre un local en son nom propre de location de skis à côté des caisses de vente de forfaits. Juste en face de l’actuelle boutique La Cabane. Un choix que le syndicat mixte justifie par le manque d’offres sur la station, une carence, qui a causé selon le syndicat, l’an passé, le remboursement des forfaits de plusieurs skieurs. Le Smiba, par cette installation, explique vouloir proposer des services équivalents à ceux de La Cabane, à quelques mètres d’intervalle.
Patricia Liblin et Yves Schmaltz se sont défendus. Expliquant un afflux de monde qui a causé des problèmes une saison, et détaillant avoir investi 60 000 euros pour l’agrandissement de leur local pour répondre à cette nouvelle demande. Pour eux, la concurrence les coulera de toute manière. Et ce, malgré leur offre de restauration qui ne constitue que « 10% de leur chiffre d’affaires ».
Janvier 2024
Le référé-liberté est débouté. Le juge des référés estime que la condition d’urgence n’est pas satisfaite, car la location de matériel de ski ne représente qu’une partie du chiffre d’affaires de La Cabane (elle dispose aussi d’une offre de restauration). La juge considère également « qu’il existe bien un manque de matériel de ski à louer sur le massif et que cette carence conduit depuis deux saisons le Smiba à refuser de vendre des forfaits de ski aux clients n’ayant pas réussi à louer du matériel », communique le tribunal administratif de Besançon.
Le tribunal administratif a considéré que « même si la SARL La Cabane dispose désormais d’un stock de skis à louer plus important que par le passé, elle ne démontre pas pour autant être en mesure de répondre aux besoins susceptibles d’être exprimés par toute la clientèle », poursuit le tribunal.
Il estime également que l’existence du service complémentaire créée par le Smiba ne lui portera pas préjudice pour maintenir sa propre activité. Désormais, les propriétaires attendent que le dossier soit jugé sur le fond.
27 juillet 2024
Les patrons de La Cabane lancent une pétition, appelant leur public à l’aide, demandant la fermeture de la location de skis du Smiba. Les propriétaires expliquent avoir un déficit de 30 000 euros et une trésorerie à sec. La pétition s’intitule : “Pour la survie de La Cabane, une seule solution : la fermeture de la location de skis du Smiba». Une pétition qui a recueilli plus de 1 000 signatures. L’établissement est mis en vente.
4 août 2024
Leur avocat, Bruno Kern, dépose un référé-suspension pour accélérer le dossier, car le dossier n’a toujours pas été jugé sur le fond. « L’effondrement de leur chiffre d’affaires, la trésorerie négative au bout de cette première saison en concurrence, constituaient des éléments nouveaux pour déposer ce référé-suspension. Il y avait une condition d’urgence, et les moyens développés semblaient être suffisamment sérieux », explique Bruno Kern, par téléphone, ce 27 août.
22 août 2024
La requête de référé-suspension auprès du tribunal administratif de Besançon est déboutée. Non pas sur la condition d’urgence, mais sur les moyens développés. Le juge des référés retient une absence de doute sérieux sur la légalité de la décision d’ouvrir une activité complémentaire de location de skis par le Smiba.
Le 27 août, c’est le Smiba qui communique dessus, se félicitant de son « intervention salutaire pour le rayonnement de la station ».
Bruno Kern, l’avocat des propriétaires de La Cabane, rappelle ce jour que ce « n’est pas une décision définitive », puisque le dossier n’a toujours pas été jugé sur le fond. Mais seulement, de nouveau, sur la condition d’urgence et sur les moyens. « Ce n’est pas enthousiasmant de voir que la juge ne voit pas ce qu’il y a d’illégal », commente-t-il.
Désormais, les propriétaires s’en remettent à la requête au fond déposée en février. « On attend avec impatience, depuis six mois, que le Smiba dépose son mémoire au fond », pique Bruno Kern, l’avocat. « En attendant mes clients sont dévastés et au bord de la faillite. »
L’avocat s’interroge aussi sur la possibilité d’aller devant le conseil d’Etat pour faire casser cette nouvelle décision du tribunal administratif. La décision doit être prise très prochainement, puisque les plaignants disposent d’un délai de quinze jours à partir du rendu de décision du tribunal. Aucune décision n’est prise pour le moment. « Un avocat au conseil d’Etat coûterait très cher à mes clients. Ils réfléchissent encore », conclut-il.