Au Canada, une loi de protection générale pour les sapeurs-pompiers existe. Elle permet de mieux reconnaître les cancers qui affectent de nombreux sapeurs-pompiers comme maladies professionnelles. Et identifie une corrélation entre ces maladies et des contaminations liées aux fumées, mais aussi à l’amiante, et à de nombreux produits chimiques. En France, un seul cancer, celui du nasopharynx, est reconnu comme maladie professionnelle chez les pompiers professionnels, contre 28 aux États-Unis. En 2003, le rapport Pourny sur la santé, la sécurité et la prévention évoquait les problèmes de contamination. Mais depuis, les professionnels ont le sentiment amer que la prise en compte des risques a peu évolué (lire ici).
Jeudi 16 mai, une grande mobilisation des sapeurs-pompiers, en intersyndicale, a eu lieu à Paris. Un préavis de grève porté par neuf organisations syndicales a été déposé, pour démontrer que « les soldats du feu sont les grands oubliés du ministère de l’Intérieur et du gouvernement ». Les revendications concernent en grande partie l’absence de prise en compte des risques qu’encourent les soldats du feu dans le cadre de leur exercice.
Des propos entendus et soutenus par Florian Chauche, député La france insoumise de la 2nde circonscription du Territoire de Belfort. Il a déposé une proposition de résolution sur l’exposition aux risques des sapeurs-pompiers, en collaboration avec le député Damien Maudet. Une résolution qu’il a présentée en conférence de presse alors que les sapeurs-pompiers se mobilisaient à Paris ce 16 mai.
« Le sujet monte petit à petit, mais ce n’est pas encore assez », expose-t-il, d’où cette proposition de résolution. Celle-ci a été signée par 98 députés, de la majorité et de gauche. 7 groupes au total sont signataires.
Un suivi plus exhaustif
Dans cette résolution, plusieurs demandes. D’abord, on attend un meilleur suivi des interventions, pour savoir quel pompier a pu être confronté à quels polluants (PFAS, amiantes, fumées toxiques, perturbateurs endocriniens, reprotoxiques, hydrocarbures aromatiques polycycliques…). Ensuite, la résolution quémande des visites médicales plus poussées et un suivi post-professionnel, car « c’est souvent après la prise de retraite que se déclarent des maladies ».
Enfin, on attend un suivi psychologique, qui paraît indispensable au député et qui pense également aux opérateurs téléphoniques, « qui ont été traumatisés pour certains après le Bataclan ». Aujourd’hui, ce suivi n’existe pas, ou peu. Bruno Mary, ancien sapeur-pompier du service départemental d’incendie et de secours du Territoire de Belfort (Sdis 90), atteint d’une leucémie, en témoignait lors d’un précédent sujet (notre article) : « Les thérapies, on se les faisaient à nous-même. Si ça ne passait pas, tu changeais de métier. Sinon, il fallait s’endurcir. » Notamment pendant la période Covid. « On n’avait absolument pas été préparés. »
La résolution demande aussi la mise en place d’un pacte capacitaire sur les équipements. A l’heure actuelle, les cagoules utilisées lors des feux de forêt ne sont pas filtrantes, explique-t-il. « Pourtant, il existe des cagoules qui filtrent 70 à 90% des fumées. »
Des aménagements sont aussi sollicités pour décontaminer les équipements en retour d’opération. Pour ne pas ramener des poussières qui pourraient contaminer les collègues qui n’étaient pas sur place. « Il y a des réflexes à acquérir là-dessus », replace le député. « Il faut que le gouvernement s’en saisisse pleinement », poursuit-il. Le député espère que le fait que la proposition de résolution soit transpartisane permettra au gouvernement de s’y intéresser plus facilement pour que celle-ci soit débattue à l’Assemblée.