Mercredi soir, dans la bâtiment 2 du Quasar à Montbéliard, l’ambiance était du type OK Corral.
Dans le bâtiment 2 du Quasar à Montbéliard, mercredi soir, l’ambiance était du type O.K Corral. Il était débattu, par les cinq intercommunalités de l’aire urbaine, la mise en place d’un réseau commun de transport dit AOM unique (autorité organisatrice de la mobilité) pour faciliter le transport de tous dans le Nord Franche-Comté.
Le Grand Belfort, la Communauté de communes du Pays d’Héricourt, des Vosges du Sud et du Sud Territoire VS Pays de Montbéliard agglomération (PMA). Les présidents des intercommunalités ont débattu ce mercredi de la mise en place d’une entité unique de transport dans le Nord Franche-Comté. Pour les aider, une étude a été commandée au cabinet Mensia sur les différentes méthodes pour organiser les déplacements et les transports dans l’aire urbaine.
Deux solutions s’offrent à l’actuel syndicat mixte de transport Nord Franche-Comté, détaille le rapporteur de l’étude. Première option: la mise en place d’un réseau commun de transport unique, une AOM (autorité organisatrice de la mobilité), en choisissant un président au gouvernail. Seconde option: le renforcement du syndicat du transport, qui nécessite des changements de statut et l’accord de chaque intercommunalité à chaque étape du processus de décision, avec des votes distincts lors des conseils de communauté. Le rapporteur expose : « Les deux solutions sont possibles et offrent des choses assez similaires. Seule distinction : avec le syndicat, si une seule personne bloque, tout s’enraye. »
Grand Belfort, Communauté de communes du Pays d’Héricourt, Vosges du Sud, Sud Territoire : tous les présidents de ces intercommunalités sont d’accord pour dire que le modèle à adopter est l’AOM unique. Pour eux, le modèle permettra de prendre des décisions plus rapidement, plus efficacement et d’adopter un message politique fort pour donner une crédibilité au Pôle métropolitain. Mais Pays de Montbéliard Agglomération considère que le renforcement du syndicat tel qu’il est est suffisant. « PMA ne se refuse pas l’horizon d’une AOM. Mais pour le moment, nous ne connaissons pas les limites de ce modèle. Où est l’horizon infranchissable ? », s’est questionné Damien Charlet, vice-président de PMA chargé des mobilités et des transports. Il a exprimé le souhait de continuer à travailler ensemble, en poursuivant des réflexions sur l’évolution du syndicat. Il a aussi exposé que garder de l’indépendance les uns par rapport aux autres permettra de moindres procédures administratives, et un moindre éloignement des décisions dans les intercommunalités.
Dans un communiqué remontant au 12 avril, Charles Demouge, président de PMA avait déjà exprimé son avis sur la question en estimant que « le syndicat permet parfaitement la création et la gestion de lignes interdépartementales » et qu’il était « la bonne structure pour travailler à cet enjeu majeur pour les étudiants du Nord Franche-Comté et pour les habitants du Pays de Montbéliard.»
Un avis très loin d’être partagé par Damien Meslot, maire de Belfort et président du Grand Belfort, qui voit dans cette décision de la mauvaise volonté de la part du président de Pays de Montbéliard Agglomération, Charles Demouge. « Nous avons l’impression que PMA sort les freins sur toutes les politiques communes. Si on ne construit pas maintenant, nous resterons un nain politique », s’est énervé Damien Meslot.
2 lignes interdépartementales comme argument de chantage
Deux lignes interdépartementales sont prévues pour être opérationnelles à la rentrée de septembre 2022. L’une est une ligne étudiante desservant les trois sites universitaires. L’autre, une ligne Nord-Est de l’agglomération reliant la gare TGV et l’hôpital Nord Franche-Comté.
Mais Damien Meslot menace de couper tout fonds sur ce projet si PMA n’y met pas du sien : « PMA a proposé des lignes pour permettre à ses communes de se désenclaver et c’est le syndicat qui doit payer pour ça. Si vous n’allez pas plus loin, le Grand Belfort n’a pas à financer pour les lacunes que vous avez », a-t-il adressé à Damien Charlet. « Nous n’avancerons plus tant qu’il n’y aura pas d’AOM unique. Plus d’argent, plus rien ». Des propos soutenus par les autres présidents d’intercommunalités. La messe est dite.
Si l’idée de mettre en place des groupes de travaux ont émergé pour trouver un accord – ou plutôt, forcer PMA au consensus -, lorsque le rapport portant sur l’adoption des deux lignes interdépartementales revient sur la table, le chantage reprend. Dans l’autre sens, cette fois. Damien Meslot dit qu’il votera contre, et Damien Charlet menace de se retirer du tour de table pour les groupes de travaux. Finalement, le président du syndicat décide de retirer le rapport de l’ordre du jour. Il évoque des questions de légalité pour franchir les zones départementales : « Nous attendons un retour sur un courrier envoyé au préfet ».
A la fin, rien n’est engagé. Tout reste à faire et la frustration se fait ressentir. Et un mot reste en suspens : « gouvernance ». Alors qu’on ne sait pas vraiment ce qui empêche un consensus, Fernand Burkhalter l’évoque : « Vous savez, il n’y aura pas de tabou sur la gouvernance. Bien sûr, cela peut poser problème et c’est normal », tandis que Damien Charlet lève les yeux au ciel, y revient plus tard : « Il y a une vraie question autour du modèle de gouvernance ». Des questions restent aussi en suspens concernant la délégation de service publique à laquelle PMA est liée jusqu’au 1er janvier 2024. « Nous déciderons au mois de septembre si nous la renouvelons, ou si nous revenons à un mode de régie comme à Belfort », évoque Damien Charlet par téléphone. En tout cas, les négociations sont mal engagées.