Depuis un demi-siècle, la démocratie participative est au coeur de la gestion municipale de Vandoncourt (Doubs), tradition que le maire de cette commune rurale de 850 habitants perpétue pour la faire vivre et avancer en pariant sur “la force de l’intelligence collective”.
Angela Schnaebele – AFP
Depuis un demi-siècle, la démocratie participative est au coeur de la gestion municipale de Vandoncourt (Doubs), tradition que le maire de cette commune rurale de 850 habitants perpétue pour la faire vivre et avancer en pariant sur “la force de l’intelligence collective”.
“C’est acté !” le maire de Vandoncourt, Patrice Vernier, 66 ans, confirme un soir de février à la “commission école” qu’une douche sera installée dans l’établissement. “Avec la scolarisation des enfants de trois ans, pas toujours propres, c’est important d’avoir un endroit pour faire correctement leur toilette”, lui faisaient remarquer plusieurs membres du personnel de l’école, inscrits avec plusieurs parents volontaires à cette commission qui se réunit plusieurs fois par an pour discuter des besoins de l’école.
Les 15 élus du conseil municipal de cette commune rurale de l’agglomération de Montbéliard qui domine la plaine industrielle de l’usine PSA de Sochaux consultent systématiquement l’une des huit “commissions ouvertes” avant de prendre une décision. “À 98 % le conseil municipal suit l’avis de la commission”, affirme Patrice Vernier, maire sans étiquette depuis 2001 et candidat à sa propre succession.
Une quarantaine d’habitants, non élus, participent à ces réunions originales ouvertes à toute la population et clé de voûte de la démocratie participative à l’oeuvre. “Les gens viennent apporter leurs compétences, leur savoir-faire, leurs idées”, témoigne Dominique Bouveresse, 62 ans. Lui-même s’investit “pour le bien-être de la commune” via la conviviale “commission culture”. “Il n’y a pas de frontière entre la municipalité et le reste des habitants. C’est un plus de pouvoir aborder le maire sur les problèmes quotidiens de la vie courante”, estime le président de l’Union des sociétés de Vandoncourt, qui fédère les 29 associations locales.
La commune située à 7 kilomètres de la frontière suisse a connu sa “petite révolution culturelle” en 1971, raconte Patrice Vernier. À l’époque, le nouveau maire, Jean-Pierre Maillard-Salin, avait décidé d’expérimenter “une autre idée de la démocratie” consistant à “rapprocher les citoyens de la décision municipale”. Les commissions ouvertes et les chantiers participatifs initiés par ces pionniers perdurent.
Pour l’adjointe au maire Brigitte Cottier, 63 ans, “les commissions sont essentielles, c’est le moteur de notre action”. “Si on fait les choses tout seul, on ne les fait pas bien. À plusieurs, on se distribue les tâches et on peut faire plus”, fait-elle valoir.
"Préserver l'âme du village"
La commune multiplie ainsi les réalisations, aidée de nombreux bénévoles : l’organisation d’une balade gourmande, le nettoyage du pont Sarrazin, la construction d’un gîte communal, de la Damassine, une éco-construction en paille à vocation pédagogique, ou encore celle d’une chaufferie bois, alimentée par la forêt du village. “On ne dépend plus des énergies fossiles, on valorise différemment notre forêt et on a divisé notre facture énergétique par trois, avec un réseau de chaleur qui chauffe l’école, la mairie, des appartements, la salle des associations, la bibliothèque et les ateliers municipaux”, se félicite l’édile. “L’intelligence collective lorsqu’elle est au pouvoir, permet des choses extraordinaires”, souligne-t-il.
Les familles apprécient le dynamisme de leur commune. “La démocratie participative, c’est très important, on se sent plus impliqués et concernés”, estiment Dorothée et Bruno Neto, venus à la bibliothèque avec leurs filles. Dans ce “village chaleureux, les gens ont l’habitude de participer aux animations et quand on a besoin d’eux, ils sont là, ils donnent leur avis”, constate Laure Niggli, gérante de l’épicerie de Vandoncourt.
Mais “préserver l’âme du village” n’est pas toujours facile pour le maire, ancien fonctionnaire territorial, qui tente de transmettre la “culture du nous” aux nouveaux arrivants. “Ça fonctionne, mais pas à 100%. Il faut faire de la pédagogie, essayer de les mobiliser”, dit-il, conscient de la difficulté d’allier vie de famille, vie professionnelle et d’autres activités. Malgré “la culture ouverte” du village, le Front national est arrivé largement en tête des dernières élections européennes (32%), regrette Patrice Vernier. Ses administrés “ont peur de ce qu’ils voient à la télé”, confie-t-il, “impuissant”.