2050. L’échéance semble lointaine. C’est pourtant demain. L’Union européenne s’est engagée à la neutralité carbone dès le milieu du XXIe siècle, afin de limiter le réchauffement climatique. Il faut même limiter le réchauffement global de la planète à + 2 °C, par rapport à 1990. Limite au-delà de laquelle les effets du dérèglement climatique seraient catastrophiques, et difficilement prévisibles. En 2019, les émissions mondiales de CO2 ont atteint 38 gigatonnes, alors que l’on estime que les puits naturels de carbone (sols, forêts, océans) ne sont capables d’éliminer que 9,5 à 11 gigatonnes de CO2 ; il est donc urgent de réduire les émissions. Dès 2030, il faut surtout avoir réduit d’au moins 55 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, selon les engagements pris par la Commission européenne dans le cadre du projet Fit for 55.
En 2010, le think thank The Shift project est lancé pour porter ce discours sur les enjeux de la décarbonation. Autour de publications scientifiques, l’association a notamment diffusé un plan de transformation de l’économie française, en publiant des rapports concernant la décarbonation de quinze secteurs (à retrouver ici) : industrie lourde ; industrie automobile ; logement ; agriculture ; santé ; culture ; mobilité ; fret ; usages numériques… Ce sont des propositions pour réussir à atteindre ces objectifs de 2050, afin de respecter les Accords de Paris, engageant 196 pays.
Conférences, débats publics
Pour diffuser ces connaissances, un réseau associatif s’est tissé en France, reposant sur des bénévoles, The Shifters. Une antenne locale a été lancée dans le nord Franche-Comté en mai 2022. « Nous portons le langage du Shift Project », indique Michel Romand, directeur d’Isthy, le futur centre de tests des réservoirs hydrogène, à l’Aéroparc de Fontaine. Cette association compte près de 20 000 personnes sur le terrain. Le groupe local dénombre une vingtaine de participants.
« Nous faisons de la sensibilisation et nous fournissons des informations pour la prise de décision », remarque Michel Romand, également référent du débat public des Shifters pour le nord Franche-Comté et pour la région Bourgogne-Franche-Comté. « Nous ne sommes pas là pour donner la solution, complète François Baudin, chef de projet éolien chez Locogen, référent du groupe local. Nous expliquons. » Et les deux hommes d’insister : « Le message consiste à relayer l’idée qu’il faut décarboner nos vies, individuellement et collectivement. » S’ils ne livrent pas LA solution, ces passionnés de techniques et de sciences peuvent glisser des astuces. Ils se disent « engagés » et non pas « militants ». « Ce sont des questions qui font peur, admet François Baudin, mais on les met sur la table. »

Avant d’aller porter la parole du Shift, les bénévoles doivent bachoter et passer un système de validation en interne, pour vérifier la maîtrise des connaissances. Ils peuvent ensuite transmettre les études du Shift, dans un format « conférence » (Teach the shift) dans les universités, par exemple. L’antenne locale propose des conférences depuis le mois de novembre. La deuxième étape consiste à pouvoir participer à un débat public, qui peut rassembler des élus ou des acteurs économiques et qui impliquent d’autres codes, notamment dans les échanges et les réponses. « L’objectif est de parler au plus de gens possibles », insiste Michel Romand, animé par l’envie de transmettre et de faire monter en compétences la population. Le groupe local participe également au conseil de développement de Pays de Montbéliard Agglomération, installé il y a quelques semaines.
Dans le nouveau programme du Shift Project, sur la résilience des territoires – qui étudie six types de territoires (villes, campagnes, métropoles, montagnes, littoraux, outre-mer) – le groupe local se saisit de la thématique « montagne ». Pour faire remonter des analyses, des données et des initiatives du terrain vers Paris. Par contre, si les Shifters portent la parole du think tank, ils ne mènent pas d’études. Il pourrait, à rebours, mettre en place des indicateurs locaux sur des thématiques, permettant de suivre les évolutions d’un territoire. Pour pousser à la prise de conscience. « Nous sommes obligés de bouger », terminent Michel Romand et François Baudin. Le compte à rebours a commencé.
- Coordonnées pour rejoindre le groupe local ou solliciter l’organisation d’une conférence : belfort@theshifters.org