En cette journée d’hiver, les rayons du soleil arrivent à percer le voile nuageux. Ils caressent délicatement cette campagne verte et vallonnée de Haute-Saône. Sur les hauteurs de Frahier, en s’échappant vers Évette-Salbert, une prairie dessine une belle butte ; elle surplombe des étangs qui invitent à la contemplation et au repos. Au loin, on observe les Vosges saônoises et en particulier le ballon de Servance. L’air est apaisé.
Sur le terrain, Adeline Monneret s’active. Elle attend l’arrivée de 84 élèves de l’école de Frahier, qui viennent participer à un projet d’agroforesterie portée par cette quadra, à la tête de la ferme de la chèvre Grisette, à Échavanne. Adeline Monneret y élève depuis 3 ans une trentaine de chèvres de Lorraine, en agriculture biologique. Elle transforme le lait en fromage ou en yaourt, qu’elle vend en direct.
Sur cette parcelle de 2 ha, Adeline y fait du foin pour ses chèvres. Et en ce début décembre, elle y plante aussi des arbres ; près de 400 ! La parcelle sera dorénavant délimitée par quatre haies paysagères, dans lesquelles on retrouvera différentes essences : du genêt, du sureau, du saule ou encore des églantiers. Et au milieu de la parcelle, quatre lignes d’arbres fruitiers, au nombre de 73, seront aussi plantées ; des pommiers, des pruniers, des poiriers, des cerisiers, des noyers ou encore des noisetiers. Les arbres sont plantés à bonne distance les uns des autres afin de faciliter le passage des outils agricoles pour faire le foin. Et chaque ligne est séparée de plusieurs dizaines de mètres, calculés aussi en fonction de la taille des machines de la ferme. Pour allier agriculture à la présence des arbres.
Partager avec les enfants
Ces plantations s’inscrivent dans un projet d’agroforesterie. « On mixe l’agriculture avec l’écologie », explique tout simplement Adeline Monneret. Elle a répondu à un appel à projets de l’association Fermes d’avenir, « qui milite pour une agriculture qui nourrit les Français et qui rémunère les agriculteurs dans le respect des limites planétaires », comme elle le présente sur son site Internet. L’une des actions de l’association consiste à soutenir la plantation d’arbres, particulièrement dans les fermes. C’est cette association qui finance le projet, d’un montant de 3 000 euros. « Nous n’avons rien avancé du tout », apprécie l’éleveuse. L’association a mené l’étude d’implantation, recherché et acheté les plants ; les arbres fruitiers sont mêmes acquis auprès d‘une jeune pépiniériste de Vellescot, la pépinière Desbois. Le clin d’oeil local est sympa.
La ferme a simplement dû faire le travail de préparation et la plantation des arbres. De ce projet est né aussi l’envie d’associer les habitants. « J’avais très envie de faire ce projet avec les enfants, explique Adeline Monneret, une ancienne enseignante (lire notre article). Il y a un côté symbolique. On ne plante pas pour maintenant, mais pour l’avenir. Comme ces enfants, qui sont l’avenir. » Pendant une heure, ce lundi, une petite centaine d’enfants a ainsi planté des arbres et toucher du doigt des enjeux agricoles et écologiques. En même temps.
Biodiversité
Les haies champêtres ramènent de la biodiversité à la parcelle. Les arbres fournissent ombre à la prairie et sont un rempart au vent. Ils permettent aussi de remonter vers la surface l’eau et les nutriments, qui profiteront à la qualité du fourrage produit par la ferme et qui nourrit ensuite les chèvres.
D’ici 4 à 5 ans, Adeline Monneret pourra ramasser ses premiers fruits. L’opération permet ainsi de diversifier les ressources. Les fruits pourront être vendus ou transformés. Ces quatre années permettent justement de construire les futures activités autour (recettes de transformation, vente, cueillettes). Surtout, l’activité de cueillette intervient alors que l’élevage n’est plus dans une période intense, la saison haute se situant de mars à juillet pour l’éleveuse, qui produit du fromage d’avril à novembre. Les études ont aussi amené à privilégier des arbres dont les fruits ne donnent pas tous en même temps, afin de répartir, là encore, l’activité et les revenus. C’est l’objectif de la démarche : que l’approche écologique soutienne l’activité agricole.