L’entreprise Cristel, localisée à Fesches-Le-Châtel, dans le Doubs s’est lancée comme pari de réduire au maximum son empreinte carbone. Pour cela, elle s’est ouverte à une entreprise créée en 2017, Ananké.
L’entreprise Cristel, installée à Fesches-le-Châtel, près de Montbéliard, s’est lancée comme pari de réduire le plus possible son empreinte carbone. Pour cela, elle s’est rapprochée d’une entreprise créée en 2017, Ananké, et a accueilli son premier démonstrateur en conditions réelles. Le but : valoriser la chaleur fatale produite par les fours pour la réinjecter dans ses réseaux.
L’entreprise Cristel produit des articles de cuisine et des ustensiles haut de gamme; elle se mobilise beaucoup pour la transition écologique. Réutilisation de l’eau, recyclage, système de chauffage : l’entreprise s’engage à réduire le plus possible son empreinte carbone. Mais avec des fours qui chauffent en continu à plus de 400°C toute la journée pour cuire les articles de cuisine, la tâche est loin d’être simple. Il fallait, déjà, régler la question de la “chaleur fatale” qui s’échappe des fours (l’énergie thermique produite qui n’est ni revalorisée, ni récupérée). « Voir la chaleur des fours de cuisson de la ligne de dépôt de revêtement antiadhérent s’échapper dans la nature ne pouvait nous satisfaire », expose le directeur général de Cristel, Emmanuel Brugger. « Je ne me faisais pas à l’idée que des fumées à 500, 600 degrés puissent chauffer les petits oiseaux, pointe le directeur. Il a fallu trouver une solution pour recycler cette énergie.»
C’est là que les histoires se lient. Là où la jeune entreprise Ananké a apporté à Cristel l’objet de ses désirs : un démonstrateur, nommé Kéos, qui récupère la chaleur fatale pour la transformer. Développé par les équipes de R&D, le module qui abrite une machine bicentenaire de type Ericsson, valorise la chaleur fatale pour la transformer en énergie utile : air comprimé, électricité.
« Ce démonstrateur a été une évidence pour nous », raconte le directeur. Au mois de janvier, le dispositif est installé au niveau de l’un des fours de Cristel. Il permet à l’entreprise de transformer sa chaleur fatale en air comprimé sans aucun recours à l’électricité. Et cela lui permet de réinjecter cet air comprimé directement dans ses machines de production. Avec le dispositif, Cristel soulage son propre compresseur électrique de 20 kilos/watt et économise de l’énergie. En termes de coût, le directeur estime que la machine pourra être rentabilisée en six ou sept ans. « Peut-être moins, vu la hausse de l’énergie.»
« En valorisant sa chaleur fatale, l’industriel ne mobilise pas d’énergie du réseau, mais génère une énergie utile, et de surcroît décarbonée. La consommation énergétique est alors moindre, pour une production équivalente ou supérieure », détaillent dans un communiqué les fondateurs d’Ananké.
Une entreprise créée en 2017
Cécile Duong, chargée de la communication d’Ananké, raconte que le projet est né alors que les fondateurs travaillaient pour le groupe Assystem. « Ils travaillaient déjà dessus depuis un moment… Ils ont fini par récupérer leur bébé et ont monté leur propre entreprise, déposé leur brevet.» Un an plus tard, ils obtiennent le grand prix de l’ingénierie. Et de trois employés au départ, l’entreprise grandit pour aujourd’hui compter dix-sept personnes.
Les créateurs d’Ananké exposent : « Nous avons voulu accélérer la transition écologique ». D’où l’idée de récupérer la chaleur fatale, pour la valoriser. Sur le principe, dans les grosses entreprises, ce sont des choses qui se font déjà. Mais encore très peu pour les industries qui ont une production inférieure à 1 mégawatt. Pourtant, elles sont très nombreuses. Les créateurs en ont dénombré 37 000, via l’Ademe.
Thibault Cartigny, directeur général et cofondateur d’Ananké, souligne que l’entreprise Cristel a permis de « démontrer la faisabilité technique du projet en situation réelle ». Une étape importante entre le prototype et la présérie. Actuellement, Ananké recherche d’autres entreprises susceptibles d’être intéressées par ce dispositif, qui permet de couvrir des températures de fumées à partir de 150°C et au-delà de 500°C. Dans le détail, les fondateurs expliquent que, lorsque les fumées qui alimentent le démonstrateur atteignent 900°C, le dispositif est en mesure de produire la même quantité d’air comprimé qu’un compresseur de 20 KW. Dans ces conditions, son rendement est de 10%. Mais les ingénieurs voient déjà plus loin : « Les développements en cours permettront d’atteindre ces mêmes performances dès 450°C » , expliquent-ils, des étoiles plein les yeux.