Pas forcément très visibles, les élections consulaires organisées à la chambre des métiers et de l’artisanat (CMA) agitent de sacrées rivalités. Les enjeux nationaux ont des répercussions régionales et locales. Le scrutin s’est tenu du 1er au 14 octobre. Le dépouillement est prévu le 19 octobre. 71 000 électeurs ont été appelés à se prononcer dans la région.
Pas forcément très visibles, les élections consulaires organisées à la chambre des métiers et de l’artisanat (CMA) agitent pourtant de sacrées rivalités. Les enjeux nationaux ont des répercussions régionales et locales. Le scrutin s’est tenu du 1er au 14 octobre. Le dépouillement est prévu le 19 octobre. 71 000 électeurs ont été appelés à se prononcer dans la région.
Les petites phrases ponctuent les conférences de presse des candidats. On décèle dans les discours des piques à peine dissimulées. On se pare, de part et d’autres, de ses plus beaux atours pour être le meilleur représentant des « petits » artisans ». On critique surtout le poids du « grand patronat » d’un côté. Le manque d’ouverture et de collectif de l’autre. On défend l’indépendance ici. On milite pour plus de présence sur le terrain là. Si ce n’était que ça ! Sur les réseaux, les discours sentent aussi le souffre et les reproches ne sont pas loin d’être des mises en accusation. On prête parfois des propos aux uns. Information et désinformation ont alimenté une campagne peu visible mais qui n’a rien à envier aux élections politiques classiques. Tous les ingrédients étaient là.
Ces élections consulaires permettent d’élire les représentants au sein de la chambre des métiers et de l’artisanat Bourgogne-Franche-Comté. L’artisanat regroupe 250 métiers, divisés en quatre secteurs : bâtiment ; services ; fabrication et alimentation. Ces chambres ont subi un profond bouleversement ces derniers mois. Depuis le 1er janvier 2020, le niveau départemental n’a plus d’identité juridique. Les chambres sont devenus des chambres des métiers et de l’artisanat de région (CMAR).
En Bourgogne-Franche-Comté, selon des données de la chambre consulaire, l’artisanat représente 61 529 entreprises, 167 259 actifs et 9 687 apprentis formés. Dans le Territoire de Belfort, on comptabilise 2 735 entreprises artisanales, pour 7 818 actifs. 38 % des entreprises sont dans le bâtiment, 33 % dans les services, 16 % dans la production et 13 % dans l’alimentation. En 10 ans, le nombre d’entreprises est passé de 1 873 à 2 735 dans le Territoire de Belfort. En France, l’artisanat représente 1,3 million d’entreprises et 3,1 millions d’actifs.
Dynamique nationale
Les rivalités sont fortes entre les deux listes qui se disputent le pouvoir à la tête de la chambre des métiers et de l’artisanat de Bourgogne-Franche-Comté et par extension, du Territoire de Belfort. La liste « Voix des artisans » affronte la liste « Fiers d’être artisans », des déclinaisons locales de dynamiques nationales de mouvements syndicaux interprofessionnels. C’est bien l’enjeu du scrutin : la représentativité nationale de voix syndicales patronales.
La première nommée est soutenue par l’U2P, l’union des entreprises de proximité, regroupant l’union nationale des professions libérales et l’union professionnelle artisanale (UPA), dont est issue la Capeb, la confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment. La seconde liste est notamment soutenue par la CPME, la confédération des petites et moyennes entreprises, et la fédération française du bâtiment (FFB). C’est en 2016 qu’un bras de fer est né entre ces deux grands mouvements syndicaux nationaux, avec une déclinaison régionale. Depuis, il y a systématiquement deux listes et on tente de prendre la majorité. Localement, l’opposition est bien vivace, animée par deux organisations bien présentes dans le territoire, la CPME 90 et la Capeb du Territoire de Belfort.
C’est un scrutin de liste régional, mais avec des listes réparties par département. 24 personnes sont à élire dans le Territoire de Belfort, même si les listes sont composées d’au moins 35 noms ; chaque liste doit comporter au moins 4 candidats des 4 secteurs (bâtiments, services, fabrication et alimentation) parmi les 18 premiers candidats. Des obligations de parité existent également. Chaque chambre départementale comprend 25 membres élus et le niveau régional, compte tenu du nombre de départements en Bourgogne-Franche-Comté, compte 96 élus siégeant au niveau régional, dont 24 seront au bureau de l’instance. Les représentants sont élus pour cinq ans. La liste terrifortaine de « La voix des artisans » est menée par le façadier Antonio Cabete, dont l’entreprise est installée à Trévenans. Il est sortant et était trésorier de la chambre régionale lors du dernier mandat. Il brigue le poste de Christian Orlandi, qui était président de la chambre dans le Territoire de Belfort. La liste « Fier d’être artisans » est menée par Nicolas Morel, couvreur et charpentier à Giromagny.
Les deux listes revendiquent la proximité, la volonté de simplification administrative et la défense des artisans face au pouvoir public. « La voix des artisans » évoque de son côté « une politique active » pour le développement d’activités artisanales dans le centre des villes et des villages. « Fiers d’être artisans » cible le besoin d’intégrer l’écologie dans les pratiques et d’accompagner les entreprises dans la transformation économique et l’innovation.
Le débat de la fusion
Ces dernières années, les chambres consulaires – chambre des métiers et chambre de commerce et d’industrie – ont connu de profondes mutations. Des voix questionnent l’opportunité de les fusionner. Une idée qui entraîne une levée de boucliers chez les artisans des deux listes. Cette idée a surtout été évitée pendant cette élection, de peur qu’elle ne porte préjudice aux candidats. La liste « Voix des artisans » écrit même dans son programme son refus d’une fusion et la liste « Fier d’être artisans » a dû préciser sur Facebook qu’elle ne portait pas non plus cette idée, évoquant une « désinformation » de ses adversaires. Ambiance. Certains demandent quand même de regarder, par exemple, l’opportunité d’avoir un guichet unique pour les créateurs d’entreprises, faisant remarquer que de nombreux entrepreneurs sont des doubles ressortissants des chambres consulaires.
Le dépouillement de ce scrutin est programmé ce mardi 19 octobre, à la préfecture régionale, à Dijon. Les résultats seront connus dans la journée. Il est possible que la majorité départementale ne soit pas la même que la majorité régionale. Depuis 2016, les chambres des métiers se politisent drastiquement. Les rapports sont à couteaux tirés. Et le regroupement régional renforce le phénomène.