Un comité social et économique (CSE) extraordinaire s’est tenu ce mardi à General Electric, à Belfort, à la suite d’une constatation de danger grave et imminent (DGI) de la commission santé, sécurité et condition de travail (CSSCT).
Un comité social et économique (CSE) extraordinaire s’est tenu ce mardi à General Electric, à Belfort, à la suite d’une constatation de danger grave et imminent (DGI) de la commission santé, sécurité et condition de travail (CSSCT). La direction rejette l’idée d’une enquête autour des trois décès prématurés de trois salariés de General Electric, survenus au mois de juin.
Ce n’est pas ce dossier qui va rapprocher les différentes parties du dialogue social dans l’entité turbines à gaz de General Electric. Et selon nos informations, la réunion organisée ce mardi était même relativement tendue. Cette réunion, c’était un comité social et économique (CSE) extraordinaire, convoqué après la constatation d’un danger grave et imminent (DGI) par trois membres de la commission de santé, sécurité et condition de travail (CSSCT). Cet avis a été décidé à la suite d’une succession d’alertes : un climat de tension relaté par des médecins à l’automne 2017 ; une expertise de novembre 2018 évoquant l’exposition à des risques psycho-sociaux forts ou très forts de 63 % des salariés (retrouvez notre enquête publiée au mois de mai sur cette situation de tension) ; et le décès prématuré de trois salariés, au mois de juin.
La disparition des trois salariés (deux à la suite d’une crise cardiaque et un après un accident vasculaire cérébral, tous en dehors des horaires de travail) a encouragé le CSSCT à solliciter une enquête, via une démarche de danger grave et imminent. Le CSE extraordinaire, après une réunion préliminaire ce lundi, devait se positionner sur cette question. « La direction conteste le bien-fondé du DGI et réfute tout lien entre sphère professionnelle et les trois décès », déplore Francis Fontana (Sud), à la sortie de la réunion. Il n’y aura donc pas d’enquête, comme le demandait la procédure. « Il réfute tout lien, confirme Philippe Petitcolin, secrétaire du CSE et délégué syndical CFE-CGC, avant de glisser, d’un ton interrogateur : Mais sans faire d’enquête. » Suivez son regard… En filigrane, l’intersyndicale regrette la position obtuse de la direction. De son côté, un proche de la direction déclare : « Ce qui ferait du bien aux salariés, c’est d’avoir des informations, qu’ils n’auront que s’il y a quelqu’un autour de la table. » Depuis plusieurs années, le dialogue social est loin d’être simple.
La direction évoque une présence accrue
« Après un examen très attentif (…), la direction (…) considère que les faits présentés ne relèvent pas d’une situation de danger grave et imminent telle qu’énoncée dans le code du Travail », précise la direction, dans un communiqué adressé à l’issue de la réunion. « Consciente du besoin d’accompagner les salariés le mieux possible dans la phase difficile que traverse l’entreprise, [la direction] a invité les partenaires sociaux à travailler avec elle afin d’optimiser l’ensemble des dispositifs de prévention des RPS existants », poursuit-elle. Elle glisse que les dispositifs ont été renforcés depuis deux mois, « avec notamment une présence accrue sur le terrain des équipes RH, du service de santé au travail, de salariés volontaires formés, et d’un service d’assistance psychologique. »
Si la direction semble présenter un intérêt pour ces questions depuis quelques mois, l’intersyndicale a rappelé à plusieurs reprises ces dernières semaines que depuis 2009, elle alerte sur le sujet. Des choses ont été lancées. Puis arrêtées et classées sans suite. D’autres ont été faites unilatéralement par la direction. Pourtant, en 2017, les médecins du travail confient leur inquiétude et alertent « sur le climat de tension qui règne au sein de l’entreprise ». Ils constatent « des symptômes d’épuisement, d’anxiété, de troubles du sommeil, de fatigue psychique et physique ». Selon les médecins, cela entraîne des « conflits relationnels », voire de la « violence verbale ». À cette époque, près de 80 personnes étaient suivies par les médecins pour « souffrance mentale ». L’expertise publiée à l’automne 2018 s’étonnait de son côté, que « malgré les interpellations des membres du CHSCT, de l’alerte des médecins du travail (automne 2017, NDLR) qu’aucune action de prévention concrète permettant d’identifier les facteurs qui dans le travail exposent ou pourraient exposer à des risques psychosociaux et de fait à une dégradation des conditions de vie au travail », n’ait été lancée. La question est de savoir, aujourd’hui, si les mesures prises après l’annonce du plan social sont suffisantes pour rétablir une situation déjà délicate.
Dans les mains de l’inspection du travail
Ce CSE s’est terminé sans accord entre les représentants du personnel et la direction sur les mesures à prendre. De fait, au regard de l’article L4132-4 du code du Travail, « l’inspecteur du travail est saisi immédiatement par l’employeur ». « L’inspecteur du travail met en œuvre soit l’une des procédures de mise en demeure (article L4721-1), soit la procédure de référé prévue aux (articles L4732-1 et 4732-2) », poursuit l’article. Dans le premier cas, si l’inspection du travail constate « une situation dangereuse », il peut, par l’intermédiaire du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, « mettre en demeure l’employeur de prendre toutes mesures utiles pour y remédier ». Dans le deuxième cas de figure, il peut saisir « le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque (…) lorsqu’il constate un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique d’un travailleur ». Ce dossier n’est pas terminé.