AutoJM est né en 1975. Il y a un demi-siècle. JM renvoie à son fondateur, José Martinez. Un ancien de la Peug’. L’entrepreneur s’était spécialisé dans la revente des véhicules des salariés de la marque au lion. Il était tellement performant que tout le monde lui confiait son auto pour la revendre. Il en a fait son activité, « pour simplifier la vie des employés », raconte Raynald Thevenet, directeur général de la société depuis 2019.
Le fils Martinez, Vincent, rejoint son père dans les années 1990. Il apporte deux innovations : l’importation de véhicules neufs d’autres pays européens, bénéficiant ainsi des tarifs des pays exportateurs, moindres que dans l’Hexagone ; la vente à distance, d’abord par le Minitel, puis par Internet. La première innovation « permet de proposer des véhicules jusqu’à – 40 % », replace Raynald Thevenet, neveu de l’icône cycliste. D’ajouter : « Nous sommes le plus ancien mandataire de France. »
Les clients achètent des véhicules au prix du pays exportateur, tout en ayant « les garanties constructeurs », assure Raynald Thevenet. Leur catalogue compte une vingtaine de pays. Selon les conditions tarifaires du moment, AutoJM importe d’un pays ou d’un autre. Un jour, l’Espagne. Le lendemain, l’Allemagne. Celui d’après, ce sera en Belgique, ou depuis la Pologne. L’agrandissement de l’Union européenne porte la dynamique en ouvrant les possibilités. Avec une constante : le prix, le prix et toujours le prix. « On s’est toujours positionné sur le pouvoir d’achat », indique le directeur général, ingénieur passé par Thalès et Hewlett-Packard.
Raynald Thevenet : « La voiture plaisir a disparu »
Depuis qu’il est arrivé à AutoJM, il n’a pourtant connu que quelques mois sous de beaux auspices… C’était avant le covid. Avant la crise énergétique. Avant l’inflation. Avant la crise automobile européenne. Avant le retour de tensions géopolitiques d’envergure. À l’époque, AutoJM vendait 3 000 véhicules par an, dans un marché français à 2,2 millions de véhicules vendus par an. Aujourd’hui, Auto JM vend difficilement 1 500 à 1 600 véhicules chaque année, dans un marché français attendu en 2025 à 1,5 million d’unités vendues…
En 2020, l’entreprise se lance dans un investissement de 7 millions d’euros pour construire un outil de ventes digne de ses ambitions, à Morvillars, alors que son site d’Audincourt est exsangue (lire notre article) ; elle voulait y vendre 3 000 véhicules neufs et 3 000 véhicules d’occasion par an, nouvelle activité qu’elle ajoutait alors à son portefeuille. Les différentes crises ont douché ses intentions, surtout que le modèle économique d’AutoJM repose justement sur le volume : pour garantir des prix ultra-compétitifs, le mandataire fait peu de marges.
À cette situation déjà compliquée s’ajoutent des vents contraires. La crise concentre les acteurs du marché. À l’époque, 49 % des ventes étaient assurées par les grands groupes, replace Gérald Thevenet. Aujourd’hui, ils ont 80 % des parts de marché. Les petits acteurs indépendants, à l’instar d’AutoJM, sont réduits à la portion congrue. « Contre ça, nous pouvons lutter, soutient pourtant le directeur général, car nous sommes plus compétitifs. »
Mais le mandataire traine d’autres poids, peu favorables à la vente de voitures : l’électrification du parc automobile, qui refroidit les acheteurs, le dieselgate ou encore l’augmentation des prix liste Raynald Thevenet. « Cela pousse le consommateur à attendre et à ne pas renouveler sa voiture. La voiture plaisir a disparu », analyse le dirigeant. AutoJM est, qui plus est, positionnée sur le marché particulier ; l’entreprise ne vend pas de flottes de véhicules aux entreprises, qui portent une grande partie du volume d’achat de ces véhicules.
Dans les locaux du mandataire, on voit bien que les volumes de diesel diminuent dans la part des ventes de véhicules. Mais cette diminution est construite, souffle-t-on. Les constructeurs n’en produisent quasiment plus, pour respecter les quotas. Pourtant, lorsqu’il y a des diesels disponibles sur le parc, les véhicules ne restent pas longtemps dans les listings de la concession observe-t-on du côté des salariés d’AutoJM, avec une pointe de résignation.

AutoJM va sortir de son redressement judiciaire
Avec moins de ventes de véhicules et plus de charges pour rembourser cet investissement de Morvillars, l’effet ciseau est terrible pour AutoJM. En juillet 2024, l’entreprise prend la décision de se placer sous la protection du tribunal de commerce et s’engage dans une procédure de redressement judiciaire. Elle doit diminuer la voilure. Ses effectifs passent de 80 à 35.
Aujourd’hui, à l’aube de ses 50 ans, l’avenir s’éclaircit légèrement. AutoJM doit sortir de son redressement judiciaire à la rentrée. Un élément qui va redonner confiance à la clientèle, pour redynamiser les ventes. Surtout qu’il y a quelques motifs de satisfaction, dans ce panorama grisâtre : les ventes locales progressent. Elles pesaient 20 % du chiffre d’affaires d’AutoJM en 2019. Aujourd’hui, elles représentent 50 %. Même en volume, ces ventes sont plus nombreuses.
AutoJM continue d’appuyer sur ses forces : des véhicules beaucoup moins chers qu’en concessions classiques ; et une expérience client singulière, mise en place avec la construction de la concession de Morvillars. Quand on signe la voiture, elle attend juste à côté du bureau où est installé le client. Et on quitte le showroom en étant au volant du véhicule, à la manière d’un acheteur de Ferrari ! « Le plaisir de repartir avec son véhicule doit être le même pour tout le monde », confiait, en 2023, Raynald Thevenet, pour expliquer cette innovation qu’il a initiée (lire notre article). Depuis 50 ans, l’innovation est le moteur d’AutoJM. Et cela n’a pas de prix !