La start-up Ananke systems, qui connaît un coup d’accélérateur, va installer un démonstrateur de son système de récupération de la chaleur fatale chez Cristel, à Fesches-le-Chatel. L’entreprise y conçoit des articles de cuisson et des ustensiles de cuisine. Pour Ananke, c’est la première étape vers la commercialisation et l’industrialisation.
La start-up Ananke systems, qui connaît un coup d’accélérateur, va installer un démonstrateur de son système de récupération de chaleur fatale chez Cristel, à Fesches-le-Chatel. L’entreprise y conçoit des articles de cuisson et des ustensiles de cuisine. Pour Ananke, c’est une étape de plus vers la commercialisation et l’industrialisation.
Encore une start-up belfortaine qui prend de l’épaisseur en 2021. Comme H2SYS, Ananke systems bénéficie de plusieurs soutiens pour accélérer son développement. Le dernier en date : des subsides issus du fonds Maugis, chargé de ventiler les 50 millions d’euros de la pénalité de General Electric (notre article). Si les fondateurs d’Ananke systems porte aussi la marque du tissu industriel belfortain, ils n’ont pas pris le chemin de l’hydrogène. Mais ils ont aussi pris la route de la transition écologique. Leur idée ? « Développer des modules de co-génération qui permettent de valoriser la chaleur fatale, générée par une usine », détaille Thibaut Cartigny, directeur général d’Ananke systems, créée en 2017. La chaleur fatale est une chaleur générée par un processus de production – un four industriel par exemple – mais qui n’est pas récupérée.
Cette idée, les fondateurs l’ont façonnée depuis 2010 lorsqu’ils étaient encore ingénieurs chez Assytems. Le prestataire d’ingénierie n’avait pas vocation à industrialiser ce projet, ni à le commercialiser. Les quatre fondateurs ont donc racheté l’idée et lancé la société, installée aujourd’hui dans les locaux du laboratoire universitaire Femto-ST, à Belfort, rue des Entrepreneurs, près de l’étang des Forges.
« Cristel, un partenaire »
« En France, c’est l’équivalent de la production de six réacteurs nucléaires qui part aux petits oiseaux sous forme de chaleur fatale », rappelle Thibaut Cartigny. Leur idée, c’est donc de récupérer cette chaleur issue de processus de production et « de la valoriser sous forme d’énergie utile », poursuit le directeur général. Aujourd’hui, Ananke systems travaille sur la 5e génération de prototype. Cette 5e génération est en phase de tests, avant son installation chez Cristel. Ce sera le premier démonstrateur, « qui prouvera le bon fonctionnement de la technologie », annonce Thibaut Cartigny. Leur équipement est conçu selon les préceptes d’un moteur de type Ericsson, avec un apport de chaleur externe, une technologie développée en 1833 !
« Cristel, c’est plus qu’un client, c’est un partenaire », confie le directeur général. « C’est quelque chose d’importants pour nous, abonde Emmanuel Brugger, son homologue Cristel. Nous cherchions depuis longtemps à valoriser notre chaleur fatale. » L’entreprise est très engagée dans une production respectueuse de l’environnement (lire notre article). Dans leur usine, l’énergie calorifique des compresseurs est récupérée pour chauffer les ateliers, les eaux usées sont recyclées pour limiter la consommation et on encourage l’activité de rechapage, qui consiste à remettre un anti-adhérent dans les poêles, sans FPOA. Mais on récupère pas (encore) la chaleur fatale. « On récupère, normalement, la chaleur fatale sur de très grosses installations », explique Emmanuel Brugger. Les équipements existants ne sont donc pas dimensionnés pour les fours de Cristel. Avec Ananke systems, il dispose d’une solution adaptée. « C’est un bel exemple de synergies locales », valide Damien Dodane, autre dirigeant de l’entreprise.
Un boitier diagnostic
En parallèle de ces récupérateurs de chaleur fatale, Ananke systems a développé un boitier de diagnostic, nommé Etna. « Souvent, les industriels ne connaissent pas la chaleur fatale qu’ils génèrent », observe Thibault Cartigny. Ce boitier permet de récupérer ces formations : débit, température, taux de CO2, composition de la fumée. Les données remontent en temps réel. Ils l’ont déjà installé chez Hendrickson, à Châtenois-les-Forges, un équipementier automobile. Cet outil permet aussi de dimensionner les équipements.
Le démonstrateur d’Ananke sera installé à l’extérieur de l’usine, dans des conteneurs. La start-up disposera ainsi d’un showroom. Elle y installera tout une batterie de capteurs pour collecter de la donnée. L’équipement est vendu dans un conteneur de 10 pieds, ce qui facilite son transport et permet de les recycler, tout en limitant les travaux chez les clients.
Air comprimé ou électricité
Le système sera installé cet été sur un four de traitement thermique pour les matrices de casseroles. « Nous venons nous raccrocher à la cheminée pour installer l’échangeur thermique », détaille Thibaut Cartigny. Avec un moteur, ils valorise la chaleur fatale en air comprimé. « Les principaux émetteurs de chaleur fatale sont aussi de gros consommateurs d’air comprimé », explique le directeur général. Cet air comprimé sera donc réintroduit dans le process industriel. On consomme donc moins d’énergie pour produire cet air comprimé, donc moins de CO2. Le bilan économique et écologique est bon. Qui plus est, il n’y a pas besoin de stocker cet air comprimé, car s’il y a de la chaleur fatale, c’est qu’un processus industriel consommant de l’air comprimé est engagé ; cet air est donc directement réutilisé. « Il y a une bonne adéquation entre le moment où on le produit et le moment où on le consomme », note Thibaut Cartigny.
Cet équipement, nommé Keos, est capable de générer de l’air comprimé. Ananke systems développe un autre modèle, Ionex, qui génère, pour sa part, de l’électricité. Leur module est capable de générer une puissance électrique de 40 KW. Ils ont pris l’option de produire un équipement standard, pour faire des économies d’échelle sur la production et offrir un produit moins onéreux. On ne valorise donc pas forcément toute la chaleur fatale générée par le processus industriel ; par contre, il est possible d’utiliser plusieurs équipements sur une même cheminée pour accroître la valorisation, si besoin. Selon leurs projections, on estime le retour sur investissement sur trois ans après l’achat de l’équipement. Le développement complet du démonstrateur s’élève à 1 million d’euros. L’Ademe a octroyé une subvention de 300 000 euros.
Ananke systems, ce sont aujourd’hui quinze personnes, dont quatre fondateurs. Six personnes ont été recrutées depuis janvier. Leur objectif : être cinquante en 2024. La start-up devient une PME.