Propos recueillis par Louis Grandidier et Éva Chibane – Écrit par Corentin Teissier
Comment s’est passé votre journée à rencontrer vos fans ?
C’était super! Je suis un peu novice en la matière. C’est la 4e ou 5e convention que je fais. Et j’ai commencé il y a très peu de temps. Jusque-là, j’avais toujours dit “non” parce que l’univers geek, manga, ce n’est pas du tout mon univers. Il n’y a aucun mépris dans cette remarque. Je suis juste passé à côté. Mais je me suis rendu compte que Kaamelott faisait maintenant partie de la pop-culture ; et il est associé à ces univers d’une façon ou d’une autre. Un jour j’ai dit “oui”. C’était il y a deux ans, à Colmar. C’était super sympa. Les gens étaient très gentils, agréables, souriants. J’ai passé deux jours à entendre des gens dire : « J’aime beaucoup ce que vous faites. Je suis content de vous rencontrer. Vous me faites rire. Vous changez ma vie. » On reçoit plein de bouffées d’ondes positives et réconfortantes. J’aime bien des conventions comme celles-ci (La Necronomi’Con, NDLR), moins les gros trucs énormes. Je veux avoir le temps de discuter avec les gens et non pas seulement signer des autographes à la chaîne.
Combien avez-vous rencontré de personnes aujourd’hui ?
Plusieurs centaines je pense… Je ne sais pas, je n’ai pas fait le calcul. Il y a des autographes, des photos, ça fait du monde. Il m’est arrivé de faire des plus grosses journées. Et demain ça sera plus important.
Qu’est-ce que ça fait de retrouver le rôle de Merlin plus de 10 ans après l’avoir quitté ?
Ça m’a fait super plaisir ! C’est comme quand on retrouve un copain avec qui on était très proche et que la vie nous a éloignée pendant plusieurs années et que l’on a l’impression de s’être quitté la veille. C’est vraiment ce que j’ai ressenti avec le personnage de Merlin. D’un seul coup ça remarche, parce que le personnage n’a pas changé, dans son écriture, puis j’ai vieilli et le personnage aussi ! C’est très facile de re-rentrer dedans; c’est comme rentrer dans des pantoufles qui sont bien faites à tes pieds !
Quand est-ce que le tournage du second volet de Kaamelott est prévu ?
Il est prévu, mais je ne sais pas quand. On a attendu 10 ans pour le tournage [du film]. J’espère que ça sera moins long ! (rire) On parle de fin 2023, mais je n’ai aucune autre information de ce côté-là. Quelques fois, des informations circulent sur les réseaux sociaux, mais j’y vais très peu. Un jour, je vais recevoir un coup de fil de la production qui va me dire qu’on tourne le mois prochain et qui me demandera mes disponibilités.
Vous faites plein d’autres choses à côté de votre rôle Merlin. Que faites-vous par ailleurs ?
Je suis avant tout un acteur de théâtre. C’est mon métier principal, ma passion, mon addiction. C’est là que je me sens le mieux. J’écris aussi mes propres spectacles. Je suis sans arrêt en train de travailler pour le théâtre. Je partage aussi mon expérience.
Y a-t-il une différence entre le jeu d’acteur du théâtre et celui du cinéma ?
Oui, il y a une différence. Quand j’avais passé des castings pour la télévision, on m’avait dit : « Arrête de gesticuler dans tous les sens ! » Au cinéma, il faut apprendre à déjouer, à ne pas projeter. Il faut plus intérioriser. Au théâtre, il faut libérer l’émotion pour le spectateur. Au cinéma, la caméra doit scruter l’action ; il faut donc retenir ses émotions, mettre moins de volume vocal et d’engagement physique. Il faut laisser la caméra détecter les émotions. C’est une autre pratique du jeu. C’est la même différence qu’entre apprendre à conduire une voiture et apprendre à conduire une voiture de course.
Est-ce frustrant ?
Oui c’est frustrant ! On n’a pas la maîtrise de ce qu’il se passe. Au théâtre, on est le patron. Je décide ce qu’il se passe dans ma pièce. Au cinéma, on est interrompu sans arrêt et on est la toute petite pièce d’une grande machine. Mais quand la machine fonctionne bien, c’est super beau à regarder. Ce qui se passe dans l’image, c’est ce que demande le réalisateur. Mais c’est le travail de cinquante personnes, qui font fonctionner la machine.
Avez-vous passé plus de temps sur les planches ?
L’année où j’ai le plus travaillé pour Kaamelott, j’ai tourné 12 jours. Il faut que je meuble les 353 jours restants ! Donc, j’ai toujours fait beaucoup de théâtre par rapport au cinéma ou la télévision. Je suis devenu comédien professionnel un peu tard, à l’âge de 29 ans. J’ai fait d’autres formations pour d’autres métiers. Je suis revenu via le théâtre amateur. Et maintenant, j’ai la chance de vivre de ma passion.
Qu’est-ce que vous préférez entre le cinéma et le théâtre ?
Le théâtre, mais mon banquier préfère le cinéma ! (rire) Au cinéma on est super bien traité, mais le plaisir du jeu, pour moi, est meilleur au théâtre. J’y ressens plus d’émotions. Après, je n’ai pas joué de grands rôles au cinéma, avec une dramaturgie très importante ; peut-être que ça joue aussi.
Comment êtes-vous venu à l’exercice d’écriture ?
Quand on ne m’appelle pas pour du boulot, ce qui est normal. J’avais un projet en compagnie, mais il s’est arrêté. Puis je me suis mis à écrire une comédie. Le travail d’écriture est solitaire, laborieux ; en plus, je suis très mauvais en dactylographie, donc c’est lent. Je suis en train d’écrire une pièce et j’ai dû mal. Quand j’aurais fini je serais tellement content ! J’ai bien inventé des personnages, des histoires, mais j’aime surtout quand c’est fini. J’aime pas écrire mais avoir écrit !
Avez-vous été formé ?
J’ai suivi une formation de scénario cinéma et d’écriture de scénarios qui m’aide beaucoup au théâtre. La dramaturgie m’aide bien pour écrire mes pièces. J’ai toujours eu un goût pour l’écriture en elle-même. Je suis un littéraire. J’aime bien jouer avec les mots, travailler les mots.
Aimez-vous jouer les personnages que vous avez écrit ?
Je n’ai pas joué tous les personnages que j’ai écrit. Il y a des pièces que j’ai écrites pour lesquelles je n’interviens pas en tant que comédien. Quand je m’écris un personnage, je me donne des dialogues et des répliques qui sonnent bien.
Aimez-vous jouer votre personnage dans Kaamelott ?
Avec Alexandre (Astier, NDLR), on a la même culture du langage. On se connait depuis bien avant Kaamelott. On se base sur René Fallet, San Antonio. Ce n’est pas une langue quotidienne, mais c’est une langue qui sonne bien, qui est gourmande, charnue, rythmée. Ce qui compte dans le métier d’acteur, ce n’est pas ce qu’on écrit, c’est comment on le dit. À quel moment et sur quelle énergie tu dis la réplique qui détermine si c’est juste. Alexandre est musicien et on le sent dans son écriture. Il écrit pour la tonalité, la rythmique de chaque acteur. C’est pour ça que c’est facile de jouer ses personnages. Le texte arrivait le matin du tournage et j’arrivais à l’apprendre très facilement, car il correspond à ma musicalité, à mon rythme.