Julian, quelle image aviez-vous du Fimu avant d’en devenir directeur ?
Pour moi, le Fimu était un diamant brut, une pépite et j’avais envie d’y apporter énormément de choses. C’était un terrain de jeux. Ce que j’adore dans mon métier, c’est l’idée de réinventer, essayer d’aller plus loin, réorganiser. Avec le Fimu, j’ai eu le sentiment que je pouvais faire plein de nouvelles choses et aujourd’hui j’ai le sentiment d’être sur cette voie et j’en suis très satisfait.
Qu’aviez-vous envie d’y apporter ?
Il fallait mettre en valeur d’avantage ce festival, lui donner la noblesse qu’il mérite et qu’il aurait dû avoir bien avant. Cela a été un travail qui a commencé avec une affiche, qui se veut très graphique. Puis il y a eu un travail de valorisation sur les réseaux sociaux. Nous avons désormais de très belles images, de beaux contenus. En suivant nos réseaux, l’on peut désormais voir une image très fidèle à ce qu’est le Fimu. Il est désormais valorisé à sa juste valeur.
Après, il y a eu aussi toutes ces nouveautés qui forment la réussite, comme l’aménagement de la place de la République par exemple. Et nous avons entretenu ce qui existait, comme la qualité de recherches et l’expertise pour construire une belle programmation.
Delphine, Julian, qu’est ce qui vous fait dire à ce stade que l’édition est réussie ?
Delphine Mentré – Déjà la place de la République. C’est une franche réussite. On en est très contents. De la proposition qui a été faite de la scène à cet endroit-là, de l’esthétique musicale proposée. On voit que le public y est présent. Désormais, j’ai hâte du point d’orgue qui est le concert du parrain avec des artistes du Fimu. Ce travail de création est une richesse pour clôturer le festival et pour montrer l’ADN du Fimu.
Julian Catusse – La réussite, je la mesure aux sourires, j’ai toujours fait comme cela partout où je suis passé. Quand je me balade dans le festival, je vois des sourires de partout. Les festivaliers, les équipes, les techniciens, les permanents. À partir de là, je pense qu’on a gagné. C’est bien là l’essentiel : pouvoir offrir des parenthèses dans la vie des gens et gratuitement grâce au choix politique qui est fait à Belfort, et qui permet d’offrir cette culture au plus grand nombre sans distinction. C’est un choix fort et assumé qui se poursuivra dans le temps.
A ce stade, voyez-vous des pistes d’amélioration pour la suite ?
Delphine Mentré – Globalement, au bout de 37 éditions, il y a des choses qui sont bien rodées. Ce qui n’empêche pas de se réinventer et d’avoir des idées innovantes. L’équipe est force de propositions. Le festival n’est ni figé ni statique mais il est dans une belle maturité. Mais oui, il y a plein de petites choses qu’on pourra revoir et le regard, le vécu de Julian va nous aider sur de plusieurs choses.
Julian Catusse – Ils ont un peu peur, ils se demandent à quelles sauces ils vont être mangé. (Rires)
Delphine Mentré – Non, on n’a pas peur ! C’est bien de se reposer des questions. Il y a une ADN qui doit rester, comme la gratuité par exemple. Ou le fait d’avoir des groupes amateurs et une diversité des esthétiques musicales. Après, sur le reste, le débat est ouvert.
Avez-vous eu des coups de coeur sur le festival ?
Delphine Mentré – J’ai eu la chance de pouvoir un peu plus me balader que Julian. J’ai capté des petits moments de joie très simples de festivaliers. Hier, sur le concert de Guifà, le parrain du Fimu Gio Evan, est venu danser avec une grande légèreté. Lui qui est extrêmement connu en Italie n’a peu être pas l’occasion de se lâcher dans un festival. Là, il a pu le faire. Ca a été une possibilité offerte en toute simplicité.
Un autre moment, au concert de Tarabeat. Un des musiciens est descendu avec sa flûte et a joué un morceau traditionnel libanais, connu de beaucoup. J’ai vu toute une communauté libanaise se mettre à danser, du plus jeune au plus âgé. Trois hommes de plus de 60 ans se sont mis à danser une danse traditionnelle et j’en ai été très émue. Pour eux, c’était un moment particulièrement émouvant alors qu’ils sont éloignés de leur pays qui vit une situation difficile en ce moment. Voilà, des petites joies toutes simples qui sont assez touchantes. Le Fimu, c’est ça, il touche les coeurs de tout le monde grâce à la diversité musicale et de tous les pays représentés. On sait que les Libanais ont une grande diaspora à Belfort. Un petit bout de leur pays est venu jusqu’à eux et c’était chouette.
Julian, en tant que nouveau directeur, quel sentiment avez-vous en ce dernier jour ?
Je réfléchissais à ce sentiment de bonheur qui me nourrit. Cela peut paraître égocentrique mais j’ai un sentiment de fierté et une gratitude énorme envers Damien Meslot, Delphine Mentré et David Houzer qui m’ont permis d’avoir ce poste et d’occuper cette fonction car cela m’offre une fierté folle. Hier soir, j’ai eu un moment avec Alix Duprez, régisseur général du festival. On s’est pris une petite pause pendant un concert tous les deux. En regardant la scène, on a eu une bouffée de plénitude. Le job était fait grâce aux personnes qui ont pris du plaisir. Finalement, on oeuvre chacun à notre petite échelle. On est 500, 550 à travailler sur le Fimu. Nous sommes tous une infime partie de la chose, même à la direction. Mais le sentiment reste incroyable. Quand on y goûte, on ne peut pas revenir en arrière. On se sent utiles.
Au mois d’octobre, vous évoquiez l’un de vos défis majeurs, l’accessibilité. Pari réussi ?
Julian Catusse – Je crois que nous avons réussi à rendre accessibles toutes nos scènes. Nous avons fait des investissements humains, techniques et financiers pour y arriver. Ce n’était pas une mince affaire !
Tout à l’heure, je suis passé place de la République. J’y ai vu des personnes en situation de handicap qui ont pu profiter du concert au même titre que tous les autres en ayant une bonne visibilité. J’en suis fier. Tout comme quand je vois la plaquette du Fimu des enfants et que je vais voir les spectacles. Ce festival est fou et les gens qui en sont fiers ont raison. Ceux qui n’en sont pas encore conscients, ça viendra. On va tout faire pour que les gens, jusqu’au dernier, se rendent compte de la chance qu’ils ont d’avoir le Fimu de Belfort.
Retrouvera-t-on un jour le Fimu le lundi ?
Delphine Mentré – Tous les paramètres vont dans le même sens. Le choix a été fait il y a trois ans. On s’est rendu compte qu’il y avait une forte attente pour que le Fimu soit plein et entier dès le vendredi. Ce qui n’était pas le cas avant, il n’y avait que quelques scènes ouvertes. Sur le lundi, tous les pays n’ont pas de jour férié et les groupes repartaient avant. La programmation s’appauvrissait. Le public repartait, et on avait un festival qui se terminait en eau de boudin. Là, le dimanche, tout se termine en apothéose avec le concert du parrain. Donc il n’y aura pas de retour du lundi, ce n’est pas pertinent.
Julian Catusse – Nous continuerons à terminer le dimanche,au bout de la nuit et c’est très bien comme ça !