Loéva Claverie
25 ans. Un quart de siècle. Qu’on les attende ou qu’on les redoute, on a souvent envie de célébrer ces vingt-cinq bougies en grandes pompes, histoire de marquer le coup. En revanche, fêter ses 25 ans pendant les Eurockéennes a quelque chose de magique et d’euphorisant. Et c’est mon cas, ce samedi 5 juillet. Un événement mémorable pour un anniversaire inoubliable. À cet âge charnière où tout se bouscule, beaucoup de jeunes du même âge voient dans les Eurockéennes une bulle d’air, un moment hors du temps.
« Je prends les places directement quand elles sortent. Depuis trois années d’affilée que je viens, je ne m’en lasse pas. » En ce vendredi soir 4 juillet, deuxième jour des Eurocks, Cindy Alamichelle fête son début de vacances. Accompagnée de plusieurs amis, cette enseignante en maternelle depuis trois ans a du mal à réaliser à quelle vitesse le temps est passé depuis sa majorité. « À 25 ans, on est adulte mais pas trop. Ça va trop vite. On a le permis, on cligne des yeux et on est adulte. » Etre présente au festival est d’autant plus important pour elle qu’elle a vu deux ans de sa vie être volés par le Covid. « Ce sont des années qui ne se rattrapent pas » regrette-elle amer.

Assise à ses côtés, Marie C. a l’éthanol joyeux. Ayant déjà profité de plusieurs verres, elle n’est pas en mesure de répondre aux questions mais son amie répond pour elle. « Ça lui fait du bien d’être ici, confie Cindy. Ça lui permet de décompresser. Elle travaille aux ressources humaines dans une maison de retraite et elle a repris des études pour travailler dans un hôpital, alors elle est assez stressée. Les Eurocks lui permettent de relâcher la pression et de profiter. »
Transition ado-adulte
À quelques mètres de là, devant la Grande scène, l’affiche « Presse recherche témoignages jeunes 25 ans » accrochée à mon sac à dos retient l’attention de trois copines. Le concert du groupe australien Parcels bat son plein et il faut crier pour se faire entendre.
« Être ici cette année, c’est pour moi une pure nostalgie de tous les concerts que j’ai déjà vécus et l’excitation pour les prochains à venir. Je ne viens qu’à ce festival », s’enthousiasme Eléna Roedel, électrisée par la musique. Née en fin d’année, la jeune femme n’a pas tout à fait 25 ans et voit son anniversaire se rapprocher avec un sentiment étrange. « Un quart de siècle ça fait bizarre. Tu te dis que tu as déjà vécu toute ta jeunesse, tu as tous les trucs d’adulte qui remplacent les choses de l’enfance. C’est vraiment une transition ado-adulte. »

« Ça fait mal, j’ai l’impression de devenir vieille, confirme son amie Fanny Besaut. Toutes les réductions s’arrêtent, on commence à te poser des questions sur le mariage… La société te fait comprendre que c’est différent. » Etudes, mariage, enfants… Personne n’a la même vie à 25 ans et cela accentue ce sentiment étrange selon les deux jeunes femmes. « C’est vraiment une période chelou. »
Noël, Pâques et les Eurocks
Entre fin des études, début de la vie active, départ du domicile parental et tous les changements qui s’opèrent à cet âge, la route durant cette période est loin d’être lisse ou linéaire. Et les bifurcations peuvent s’avérer douloureuses. « Je n’ai pas trouvé de travail à la sortie de mes études, avoue Jeanne Soltner, la troisième copine. C’est une déception et ça crée un manque de confiance sur ses propres capacités. » Détentrice d’un bac+5 en communication, la jeune femme a dû se rabattre sur un poste de vendeuse de prêt-à-porter pour payer son loyer. Idem pour Eléna Roedel, qui est passée de l’hôtellerie à un poste de responsable dans la boutique familiale de chocolats. « Pendant un an, j’étais en crise identitaire totale. J’étais persuadée de faire ma vie autour du monde et une mauvaise expérience a mis un stop net à ma carrière. Je l’ai très mal vécu. »
Avec le recul, Eléna voit tout de même les choses de manière positive : « Je suis contente d’être passée par là, c’est un mal pour un bien. Il ne faut pas chercher un job pour l’argent, mais quelque chose qui te passionne ».
Habituée des Eurocks depuis ses 14 ans, Eléna y a entrainé ensuite ses copines. Cet événement est devenu un lieu de retrouvailles, pour souffler et oublier l’âge et les pressions. « C’est mon meilleur moment de l’année, celui que j’attends le plus, s’exclame Jeanne Soltner. C’est comme une safe place. Tout va bien , il y a une super ambiance, tu peux parler avec tout le monde. » « C’est devenu quelque chose de normal, renchérit Fanny Besaut, il y a Noël, Pâques et les Eurocks. »

Le festival du Malsaucy est également devenu une tradition pour Adrien B. doctorant en imagerie médicale. « J’ai fait beaucoup de festivals et les Eurocks ont une saveur particulière. Elles ont été pour moi une manière de m’émanciper car c’est là que j’ai fait mes premières grosses soirées à 17/18 ans. » Même musique du côté de Pierre Gilbert. Originaire d’Eloi, le jeune homme habite et travaille aujourd’hui en Suisse et les Eurocks sont une occasion de retrouver ses amis chaque année, quelle que soit la programmation.
À 25 ans, chaque histoire est différente et les situations changent parfois du tout au tout. Sur les sites des Eurockéennes, en cette année 2025, un élément universel réunit en revanche tous ces jeunes : tous ont été piqués par cette passion des Eurocks et comptent bien y revenir, malgré les âges et les années.
