L’image du geek enfermé dans sa chambre derrière son PC est dépassée. Désormais, il s’affiche dans les conventions, comme le Necronomi’Con 2020. Du 1er au 2 février, les geeks de tout l’Est de la France et de la Suisse se rassemblent pour célébrer avec fierté leur passion.
Valentin Machard
L’image du geek enfermé dans sa chambre derrière son PC est dépassée. Désormais, il s’affiche dans les conventions, comme à la Necronomi’Con saison 3. Du 1er au 2 février, les geeks de tout l’Est de la France et de la Suisse se rassemblent pour célébrer avec fierté leur passion. Une passion qui réunit des générations et des univers différents.
Pendant que Spiderman affronte en duel à l’épée laser Chewbacca, des R2D2 roulent à travers les allées de la Necronomi’Con où jeunes – et moins jeunes … – ont les yeux qui brillent devant les stands de figurines, potions magiques et armes factices. Cette « convention » réunit chaque année depuis 3 ans plus de 7 000 personnes qui y partagent leur passion des mondes imaginaires, inspirés des mangas, des sciences-fictions ou des jeux vidéo. Ces personnes, ce sont les « geeks ».
Aujourd’hui leur culture est largement reconnue. « C’est notre revanche » s’enthousiasme le magicien Kerfalt, regard rieur sous son large chapeau marron. De son vrai nom, Stéphane Van Herpen, ce passionné de jeu de rôles a longtemps été moqué. « On était vus comme des satanistes » se souvient-il. Ce pionnier en France anime ses premières communautés de joueurs dans les années 1980. Un loisir alors mal vu par son patron. Banquier à l’époque, il perd son emploi.
Il aura fallu attendre vingt ans pour que ces marginaux soient enfin considérés. Depuis la première Japan Expo à Paris en 1999, le mouvement « geek » s’est imposé dans la culture populaire. Pour Kevin, c’est notamment grâce aux associations de passionnés. « Le terme de ‘’geek’’ a éclos dans les années 2000 et était très péjoratif, puis avec l’essor des consoles et des conventions, il a permis d’affirmer une identité », explique-t-il, derrière ses petites lunettes, les sourcils froncés. Avec une quinzaine d’autres geeks, il a fondé cospl@y.cow, une association qui leur permet de se retrouver pour créer leurs costumes, se photographier et organiser leurs propres concours comme lors de cette Necronomi’Con.
Et selon lui, le numérique a aussi changé le regard porté sur leur culture : « Dès que les gens ont commencé à communiquer entre eux, grâce à internet dans les années 2000, les premières associations se font formées. » Pour Luna, 21 ans, geek assumée depuis 10 ans, « les vieux clichés n’existent plus », et cette culture « est plutôt celle d’internet et des technologies plutôt que celles du Japon ou des Etats-Unis, même s’il y a des influences ».
À chacun son geek
Ils l’admettent eux-mêmes, définir le « geek » n’est pas chose aisée. Pour notre magicien Kerfalt, « le geek est avant tout quelqu’un qui crée des mondes imaginaires ». Une vision partagée par Aurélie, de cospl@y.cow : « Ça nous permet de jouer des rôles différents. On change de personnages pour s’évader. »
Et pour s’évader, aucune limite à l’imagination : « Aujourd’hui, il y a les cosplayeurs, les gamers, les cinéphiles, les otaku, … » énumère un groupe de visiteurs. Pour eux, le mot « geek » ne suffit plus à exprimer toute la créativité de leur mouvement. Aurélie distingue même des modes au fil du temps : « dans les années 2000, on était fan du Moyen Âge, puis ça a été le cosplay… » et maintenant la nouvelle vague c’est le « mermaiding »… ou l’art de nager dans la peau d’une sirène ou d’un triton.
Stéphane Van Herpen, lui, se réjouit de voir que cette culture est mieux acceptée et fait de plus en plus d’adeptes. En semaine, lorsqu’il troque sa tunique pour sa blouse blanche d’aide-soignant, Kerlaft continue de faire usage de sa magie auprès de ses patients. « Je leur apporte le sourire, c’est ma façon de les aider », reconnait-il, modestement. Dans les allées la Necronomi’Con, un Chewbacca passe et lance, enjoué : « Je suis maitre d’apprentissage, mes élèves m’appellent « maitre », je les appelle mes padawans ! » Autant de nouvelles recrues pour le mouvement geek. Une passion, comme un sortilège, difficile à briser.