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5 raisons d’encourager Safran à s’installer à Belfort

Cyril Abad / CAPA Pictures / Safran

L’intersyndicale de la branche turbine à gaz de GE Energy de Belfort milite depuis six mois pour un projet de diversification de GE autour de l’aviation, en invitant Safran à s’installer dans le nord Franche-Comté. Un projet permettant de traverser la période délicate du marché des turbines à gaz et de construire l’avenir. Ce projet repose sur des logiques historiques, conjoncturelles et structurelles. Le point.

1. L’histoire

Les ailettes font partie de l’histoire industrielle belfortaine et de ses turbines. On trouve même à Cravanche une rue des Ailettes, assurant la jonction entre l’entrée de la Découverte à Belfort et le Techn’hom 5 à Cravanche. Aubes et ailettes sont des éléments qui composent aussi bien les turbines à vapeur, à gaz que les moteurs d’avion. Une usine belfortaine d’Alstom a même assuré la production d’aubes pour ces trois fabrications. « L’usine de Bourogne réalisait au même moment la production de carters et de tambours pour les moteurs d’avions CFM 56 », note un délégué syndical CFE-CGC de la branche turbine à gaz de GE Energy. Cette activité a été arrêtée en 1999 lors du rachat, par le géant américain General Electric, d’EGT, la branche turbines à gaz d’Alstom. Historiquement, Belfort a donc un lien avec l’aviation et avec CFM International (lire ci-dessous).

2. Le précédent CFM International

« Une prouesse de coopération industrielle transatlantique comme peu d’autres existent. » Le propos est signé du New York Times et est repris par L’Usine nouvelle dans un article de 2014. Il parle de la co-entreprise créée en 1974 entre General Electric – plus particulièrement la division aviation – et le groupe Safran, intitulée CFM International. Cette entreprise est leader mondial de la production de moteurs d’avion. Selon Les Echos, CFM International détiendrait même 70 % des parts de marché. L’entreprise a d’abord développé le moteur CFM 56 devenu le moteur d’avion le plus vendu au monde, que l’on retrouve notamment sur le Boeing 737 et l’Airbus A320, « les mono-couloirs », détaille l’ingénieur. 32 500 moteurs ont été livrés dans le monde. Cela représente « un avion motorisé “CFM” qui décolle toutes les deux secondes (…) Transportant chaque jour plus de 7 millions de voyageurs ! » relève avec fierté le groupe Safran dans sa présentation de sa division aéronautique. Les deux entités ont renouvelé en 2008 leur partenariat pour se lancer dans la production du moteur Leap (lire plus bas), successeur du CFM 56. GE et Safran travaillent donc déjà conjointement.

3. La proximité technologique

« En termes de technologie, les turbines à gaz sont issues de la technologie des moteurs d’avion, avec des contraintes et des tailles différentes », relève le délégué syndical. Selon l’intersyndicale, les processus de fabrication concernant les aubes sont par exemple identiques : aubes monocristallines, projection plasma, rechargement, usinage en pied de sapin (pour la fixation sur le rotor). Si des connaisseurs du secteur sont dubitatifs quant à cette proximité – « ce ne sont pas forcément les mêmes métiers », dixit deux industriels – l’intersyndicale reconnaît que le projet n’est pas forcément facile à élaborer. Elle sollicite surtout les besoins de Safran pour envisager le travail à réaliser. Que ce soit comme simple sous-traitant sur quelques pièces ou dans une stratégie industrielle de diversification à plus long terme. 

« Ce choix de faire venir Safran est une décision politique, qui permet ensuite de définir une stratégie industrielle, note-t-il. On n’a pas de faits aujourd’hui qui prouvent que cette diversification n’est pas possible, poursuit-il, avant de noter : Corinne de Bilbao (P-DG de GE France, NDLR) nous cite un audit de l’usine de Belfort pour nous dire que la fabrication de moteurs d’avions n‘est pas réalisable. Cet audit n’existe pas et l’inexistence de cet audit a été confirmée par la direction locale (entité turbines à gaz) en comité social et économique (CSE) du 14 février 2019. »

Au cœur du réacteur. Vue rapprochée sur les aubes de soufflante du moteur LEAP (© Cyril Abad / CAPA Pictures / Safran x 2).

4. La hausse de production de Safran

Le successeur du CFM 56, le turboréacteur Leap, a passé ses tests en 2014 et est en service depuis 2016. Son succès est au rendez-vous. 700 appareils, des Airbus A320 Neo et des Boeing 737 Max, en sont déjà équipés. « CFM doit livrer cette année 1 800 moteurs Leap, puis 2 000 moteurs par an d’ici 2020 », annonce le groupe Safran dans un communiqué de presse du 19 février annonçant la construction en Inde d’une usine de production de pièces à destination de ce moteur. La demande est là. Les besoins aussi. Un document interne de General Electric confirme cette demande croissante. CFM International a vendu 1 118 moteurs Leap en 2018, contre 459 en 2017. « Le moteur a un succès important et le concurrent, Pratt & Whitney, a rencontré des soucis techniques », souligne le délégué syndical. Pour répondre à cette production, Belfort dispose d’une main-d’œuvre qualifiée. Un point fort. « Selon nos collègues délégués syndicaux de Safran, l’une des problématiques du groupe est de recruter des ouvriers qualifiés », note le délégué CFE-CGC, pour compléter son plaidoyer. Aujourd’hui, Safran n’a pas de position officielle sur ce dossier. Le groupe fait preuve de prudence dans les dossiers impliquant les territoires. Cependant, l’organisation de la conférence de presse sur les résultats annuels 2018 de Safran pourrait être l’occasion d’avoir une position.

5. Un accueil facilité

Sur le site de General Electric de Bourogne, le bâtiment 331 devait être intégrée à l’usine du futur imaginée par le géant américain. 50 millions d’investissements étaient annoncés. GE a construit ce bâtiment… Mais aujourd’hui, il sert d’entrepôt. « Il devait accueillir des machines-outils. Il y a donc tous les fluides nécessaires et des ponts pour accueillir une activité », avance le délégué syndical. Le message est de dire qu’il y a de la place pour accueillir une nouvelle production. De fait, pourquoi pas une activité de sous-traitance pour Safran, une activité de Safran elle-même, voire une unité de GE Aviation. « La société d’économie mixte Tandem peut aussi être un support », relève l’ingénieur. Et l’intersyndical cible le fonds de soutien annoncé par Bercy comme un levier à la diversification de Belfort vers l’aviation. Une politique d’envergure qui doit correspondre à une vision de l’avenir industriel du nord Franche-Comté.

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