Le Trois –

Les bailleurs sociaux subissent de plein fouet la crise de l’énergie 

Les bailleurs sociaux mettent en place des plans de « sobriété » pour essayer de limiter la casse. | ©Le Trois - EC​
Dans le nord Franche-Comté, Territoire Habitat et Néolia gèrent environ 27 000 logements sociaux, dont près de la moitié en chauffage collectif. Les hausses des tarifs des énergies, le renouvellement des contrats de gaz : autant de sujets d’inquiétudes que les bailleurs sociaux doivent gérer tant bien que mal pour limiter la casse pour leurs locataires.

Pour les bailleurs sociaux, quelques jours après le début de l’automne, l’inquiétude monte. D’autant plus que l’humidité et la fraîcheur sont arrivées plus tôt que l’an passé. Le directeur de Territoire Habitat, Jean-Sébastien Paulus, avoue avoir « des craintes énormes » concernant l’augmentation massive des tarifs des énergies. Tout comme Alain Rotschi, directeur du patrimoine locatif chez Néolia.  « Ce qui nous travaille le plus, ce sont les charges pour les locataires », confirme le directeur de Territoire Habitat, qui, tout comme Néolia, fonctionne, pour une partie de son patrimoine, avec des chauffages collectifs et un système de provision sur charges. Un système qui a permis jusqu’à l’an passé, dans le Territoire de Belfort, de rembourser de belles sommes aux locataires qui attendent ce chèque de régularisation d’énergie pour partir en vacances ou faire différentes courses de rentrée. « Jusqu’en mai 2021, nous avons remboursé 85 % de nos locataires de manière importante », explique Jean-Sébastien Paulus. 

Depuis fin 2021, cette tendance s’est arrêtée. Au premier trimestre 2022, les deux bailleurs sociaux ont même dû exiger l’augmentation du niveau de provision pour atténuer le choc et éviter une régularisation trop importante. Environ 9 % en plus de provisions sur le chauffage pour Néolia depuis avril. Cela a marché : les régularisations n’ont pas été très importantes du côté de Territoire Habitat. Dans certains cas, des remboursements ont pu être effectués. Mais ils sont moins importants qu’avant (environ 50 % de moins).

Ce qui inquiète, c’est aussi que le choc – en plus d’être absorbé par les augmentations de provisions sur charge – a aussi été pondéré par « la rigueur climatique », explique Alain Rotschi. Cet indicateur, qui permet de mesurer les évolutions de consommation d’énergies liées aux besoins de chauffage, a été inférieur de 13% durant le premier trimestre 2022 par rapport au premier trimestre 2021. C’est à la fois une bonne nouvelle, et une mauvaise : cela laisse entendre que sans ce facteur, l’augmentation des provisions n’aurait pas suffit à contrer les hausses.

Augmentation des charges, baisse des températures

De nouvelles augmentations de charges sont à prévoir. « On attend les renégociations des marchés gaz », explique Jean-Sébastien Paulus. Chez Néolia, un contrat gaz a permis, de 2019 à 2022, de ne pas subir trop fortement les hausses. Mais en 2023, « ce sera triple peine », expose le directeur. Pour le gaz, les prix ont quadruplé pour 80% du patrimoine. Pour l’électricité, ce sera fois deux sur l’ensemble des immeubles. Des réunions sont prévues avec les cinq associations de locataires dans les semaines à venir pour décider des hausses à venir. Ce qui est sûr : il y en aura. 

De leur côté, les locataires sont compréhensifs, reconnaissent les deux directeurs. Bien plus que ce qu’ils auraient pensé. En revanche, les coups de fil reçus, durant la dernière semaine, se sont multipliés. « Il fait froid. Ils souhaitent la mise en route du chauffage.»

Dans une année normale, le chauffage aurait déjà été mis, « depuis une semaine », admet Jean-Sébastien Paulus. Mais cette fois, Territoire Habitat a préféré attendre jusqu’au lundi 26 septembre, pour tenter de limiter la casse. L’an passé, il avait été ré-enclenché le 19. Tandis que chez Néolia, l’idée était d’enclencher le plus tard possible. Mais finalement, le froid et l’humidité l’ont emporté : il est aussi remis à partir de ce lundi. 

« Il fait froid. Ils souhaitent la mise en route du chauffage.»
Jean-Sébastien Paulus
Directeur de Territoire Habitat

Les bailleurs sociaux craignent pour l’hiver à venir. Pour contrer au maximum les hausses, ils imposent  un nouveau « comportement » dans leur patrimoine locatif. Jusqu’ici, les normes recommandaient aux bailleurs sociaux de chauffer à 19 degrés les logements. En mars 2022, un décret a réduit la température minimale dans les HLM à 18 degrés. 

Territoire Habitat a toujours chauffé d’un degré supplémentaire, soit 20 degrés, raconte le directeur. Tout comme Néolia : qui chauffait généralement ces logements entre 20 et 21 degrés. « Il y a un changement de paradigmes. Nous devons passer de confort à sobriété », analyse Alain Rotschi, directeur du patrimoine locatif de Néolia. « Du coup, cet hiver, nous passons à 19 degrés. Nous ne voulons pas que cela soit trop violent », explique le directeur de Territoire Habitat. Même chose pour Néolia.  Ce qui permettra aux bailleurs sociaux d’économiser environ 7% sur les coûts. 

La nuit, en revanche, la chaufferie sera baissée à une température de « 16, 17 degrés », pointe le directeur de Territoire Habitat. L’heure à laquelle la température descend sera également revue : Territoire Habitat devrait couper vers 22h ou 22h30, à la place de 23h avant. Pour le matin, c’est 5h30 qui a été retenu pour rallumer le chauffage. « Si on recule, les gens vont avoir très froid. Ce sera déjà le cas pour ceux qui se lèvent tôt.» 

Dans les bureaux de Néolia et Territoire Habitat, les mêmes règles ont été mises en place pour réduire les coûts… et limiter ceux de fonctionnement. Chez Néolia, depuis 5, 6 ans, une décision a été prise. Priorité aux travaux concernant les rénovations énergétiques. Le reste : peinture, rénovation en tout genre, passe au second plan. 

Chez Territoire Habitat, le budget de fonctionnement « s’amenuise comme peau de chagrin », regrette le directeur. D’habitude, l’argent en excédent est réinjecté dans les fonds propres pour permettre des investissements et des travaux. Cette année, les marges de manœuvre sont plus que réduites.

« L’énergie la moins chère est celle qu’on ne consomme pas »

Territoire Habitat, qui possède 11 166 logements et une trentaine de chaufferies collectives sur 4 réseaux de chaleur, s’inquiète. Aujourd’hui, les immeubles sont chauffés au gaz, par biomasse, ou encore, pour certains, au mazout. « Tous nos modèles sont en train de disparaître », reconnaît Jean-Sébastien Paulus. « Dans le raisonnement actuel, on constate que l’énergie la moins chère, c’est celle qu’on ne consomme pas. Comme avec la pompe à chaleur. » Il réfléchit aux investissements à venir. Comment chauffer, sous quelles formes ? « On se bat contre des moulins à vent », déplore-t-il concernant les questions d’énergie. Les marges de manœuvre pour réduire les coûts sont limitées. Il faut investir, placer de l’argent dans des énergies comme les pompes à chaleur, pense-t-il, pour éviter aux locataires des régularisations trop élevées. Mais pour l’hiver 2022/2023, c’est trop tard. 

Dans le Doubs, Néolia possède 16 168 logements, dont 7 912 en chauffage collectif. Pour réduire les coûts, plusieurs réflexions sont menées aussi. Individualiser les frais de chauffage : pour commencer, avec des compteurs dans chaque logement. « Selon des études, cela permettrait de faire des économies allant jusqu’à 15 % », explique Alain Rotschi. Néolia mène aussi des expérimentations sur des pavillons en auto-consommation grâce à des panneaux solaires et un système de réutilisation de l’électricité. La même manière de faire est testée sur 4 bâtiments chauffés jusqu’ici en chauffage collectif. « Si cela fonctionne bien, on massifiera. »

Opérations de communication

Dans ce contexte, une communication est menée sur les bons gestes, pour limiter au maximum la casse : ne pas obstruer les bouches d’aération, aérer malgré le froid pour éviter la moisissure, bien s’habiller, débrancher sa box internet la nuit…. Pour aider les locataires, des ampoules LED sont distribuées aux nouveaux locataires chez Territoire Habitat. « On travaille sur de petites choses comme ça. C’est un travail répétitif mais nécessaire.»

Des plans de sobriété énergétique sont aussi présentés à tous, dans les immeubles avec chauffage collectif comme pour ceux ayant des chauffages individuels. « Nous leur expliquons notre réalité, leur réalité », replace Alain Rotschi. Avec les cinq associations de locataires de Néolia, des accompagnements sont mis en place à destination, surtout, de deux types de publics : les personnes âgées et/ou porteuses de handicap, ainsi que les personnes ayant des enfants en bas-âge de 0 à 3 ans. Et donc, qui ont besoin de plus chauffer. Le directeur réfléchit, déjà, à mettre en place un système de récupération d’eau de pluie, pour la réutiliser dans les réseaux. Car pour lui, après l’électricité, ce sera sûrement au tour de l’eau de devenir une denrée rare : alors, il faut s’y préparer. 

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